Interview

Ashit Gungah : «Les reçus seront obligatoires pour les achats de plus de Rs 500»

Ashit Gungah

Le ministre du Commerce et de l’Industrie, Ashit Gungah, indique qu’une nouvelle loi est en préparation pour la protection des consommateurs. Concernant les projets pétroliers, il explique que le gouvernement fera bientôt connaître sa position.

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« La baisse du prix du gaz ménager  requiert des subsides d’un un montant de Rs 267 millions l’année 2016/17. »

Commençons cet entretien par le commerce. À quand les nouveaux règlements sur la qualité des produits électroménagers ?
C’est l’une des priorités du gouvernement, surtout qu’il y va de la sécurité des Mauriciens. Des règlements ont déjà été promulgués en janvier 2017 pour une première liste de 20 produits, afin que les normes de sécurité prescrites par le Mauritius Standards Bureau (MSB) soient respectées. Nous avons eu des consultations avec la Chambre de commerce et d’industrie et d’un commun accord, une période moratoire de neuf mois a été agréée avant que les règlements ne deviennent effectifs, c’est-à-dire à partir du 1er octobre.

Les opérateurs ont été informés en ce sens. On travaille actuellement sur les normes pour une quarantaine d’autres produits. Cela prend du temps de par l’aspect technique du sujet. Les contrôles de qualité et les normes de sécurité seront plus stricts. Les produits qui ne répondent pas aux normes ne seront pas autorisés par le MSB à être mis sur le marché.

Irez-vous de l’avant avec le projet de loi qui exigera aux commerces d’émettre des reçus pour les achats ?
La législation actuelle régissant la protection des consommateurs a déjà  fait ses preuves, mais date de 1991. Nous devons nous adapter aux changements et à l’évolution qui s’opèrent dans le domaine du commerce. Il y a beaucoup de facteurs à prendre en considération.  Nous travaillons sur un nouveau Consumer Protection Bill, qui inclura l’obligation pour les commerçants d’émettre des reçus pour les achats de plus de Rs 500. C’est la pratique dans les supermarchés d’émettre des reçus pour tout achat.

Pourquoi pas également pour les services, comme les honoraires des avocats ?
Si vous vous référez à la fixation des honoraires, je dois dire que ceux des avocats, aussi bien que ceux d’autres professionnels sont conclus après discussion avec le client. Les honoraires diffèrent selon les cas. Ce n’est pas à l’agenda.

Secteur privé et syndicats souhaitent la détaxe des produits de consommation. Qu’en pensez-vous ?
L’année dernière, lors de la présentation du budget, le ministre des Finances a enlevé des taxes et des frais douaniers sur une panoplie de produits, tels que les céréales, les couches... Une des autres mesures phares a été la baisse du prix du gaz ménager par Rs 60 sur la bonbonne de 12 kilos. Elle requiert un montant de subsides de Rs 267 millions pour l’année 2016/17. Cet effort a été consenti pour soulager la population. On aura des indications lors de la présentation du prochain budget, mais je ne peux en dire plus. Attendons voir.

« Si les prix ne sont pas compétitifs, nous risquons de perdre certains marchés. Il y a des pays émergents où le coût est moindre qu’à Maurice et la main-d’œuvre moins chère »

Le renforcement de la Consumer Affairs Unit est-il toujours d’actualité ?
Je dois souligner que les inspecteurs de la Consumer Affairs Unit (CAU) font du bon travail. Ils sont sur le terrain à travers l’île pour des vérifications et pour s’assurer que les commerces respectent les lois. En 2016, ils ont effectué 10 000 inspections. Des 3 800 plaintes du public, 3 420 ont été réglés après l’intervention des inspecteurs, soit 90 % des cas. Une partie de ces cas est référée à la justice.

Je peux dire qu’avec la nouvelle loi en préparation, nous allons donner plus de pouvoirs aux inspecteurs pour qu’ils puissent, en plus des contraventions, entrer des actions en justice. Actuellement, la CAU doit transmettre les cas à la police, qui, à son tour, suit l’action à être logée en cour. Cela prend beaucoup de temps. La simplification des procédures réduira le temps requis pour traiter une plainte.

Après la récente hausse du prix du carburant, des voix se sont élevées contre le nombre de taxes et le « levy » imposés par le gouvernement. N’y a-t-il pas lieu d’alléger ce fardeau ?
Les taxes et le levy dans la structure du prix des carburants existent depuis des années. Cet argent est utilisé pour financer des projets de développement. Il ne faut pas oublier qu’en 2015, nous avons changé les règlements dans la structure du prix de l’essence et du diesel.

Et c’est grâce à ce changement qu’il y a eu deux baisses conséquentes totalisant Rs 7,10 sur le litre de l’essence et Rs 6 sur le litre du diesel. Nous importons ces produits et nous sommes à la merci des pays producteurs. La population a bénéficié de Rs 2,1 milliards du Price Stabilisation Account (PSA) à travers la baisse et le maintien du prix des carburants. Le fonds du PSA a des limites. Donc, en février dernier, nous n’avions guère le choix que de passer la hausse aux consommateurs.

Il était question d’étendre les activités de la State Trading Corporation (STC). Est-ce pour bientôt ?
Le rôle principal de la STC est de veiller à ce que la population soit approvisionnée en produits de base comme le riz, la farine, le gaz ménager et les produits pétroliers. S’il y a des abus, par exemple concernant l’importation du riz basmati, la STC amène une stabilisation dans le prix de ce produit qui, autrement, aurait pris l’ascenseur. Il y a aussi eu des changements pour que l’organisme puisse investir dans des projets comme le Mer Rouge Oil Storage Terminal, dont la STC est actionnaire. Le gouvernement peut ainsi, à travers la STC avoir un droit de regard sur le stockage de ce produit stratégique.

Beaucoup d’entreprises fabriquant des produits Made in Moris n’arrivent pas à concurrencer avec les produits importés. Comment comptez-vous les aider ?
Je suis d’accord que, de nos jours, il y a un grand nombre d’opérateurs important des produits à bon marché. Souvent, ces produits affichent même le drapeau de Maurice. Ce qui est au détriment de ceux qui font du Made in Moris. Nous sommes en discussion avec tous les acteurs concernés pour faciliter la tâche de ces manufacturiers mauriciens.

Pour pouvoir mettre le quadricolore mauricien sur un produit, il faut le feu vert du bureau du Premier ministre. Ainsi, pour contrer les exportateurs étrangers qui l’utilisent, il faut des contrôles plus stricts sur ces produits. Ils ne peuvent aller à l’encontre des lois du pays. Avec la Mauritius Export Association (MEXA), la Mauritius Chamber of Commerce and Industry (MCCI) et l’Association of Mauritian Manufacturers (AMM), nous nous penchons sur ce dossier.

L’achat en ligne est en nette progression. À quand un cadre légal pour sécuriser les transactions virtuelles ?
Il y a deux mois, mon ministère a organisé un atelier de travail avec tous les secteurs concernés. Nous avons noté les points de vue des participants. Désormais, nous travaillons avec le ministère de la Technologie, de l’information etde la communication (Tic) pour un cadre légal. Ce n’est pas aussi simple. Il faut prendre en considération ce qui se fait à travers le monde. Il faut avant tout rassurer les personnes que les transactions sont sécurisées et qu’elles ne vont pas perdre leur argent.

Qu’en est-il de la mise sur pied d’une plate-forme d’e-commerce ?
C’était l’une des mesures du dernier budget. Sa mise en place est en cours. Le ministère travaille avec la MEXA sur ce projet. Des discussions ont été entamées avec la Southern African Development Community (SADC) pour une étude de faisabilité. On avance dans la bonne direction. Je dois souligner que la Mauritius Post gère déjà une plate-forme
d’e-commerce.

Abordons maintenant les affaires. Maurice a régressé dans le classement « Ease of Doing Business » de la Banque mondiale.

Qu’est-ce qu’on doit changer, selon vous ?
Effectivement, nous avons régressé et cela ne fait pas du tout plaisir. Un grand pas a été franchi avec la Business Facilitation Act. Au cours des débats à l’Assemblée nationale, le gouvernement a expliqué clairement comment cela aidera les opérateurs économiques. Il n’y aura plus de lourdeur administrative.

Les procédures ont été simplifiées. Certaines ont été abolies. La législation est en phase de finalisation.  Déjà, le permis pour un importateur de bunker fuel est émis en moins de 24 heures. L’approbation pour le déchargement des produits pétroliers est émise électroniquement après la réception des tests par le ministère. L’informatisation des services est déjà entamée et sera étendue à d’autres secteurs.

Qu’en est-il des projets pétroliers, dont le « petroleum hub » ?
Le gouvernement est en présence de plusieurs offres d’investisseurs pour opérer dans ce secteur. Nous étudions ces projets. Très bientôt, le gouvernement fera connaître sa position. Aujourd’hui, la situation nous pousse à avoir un port pétrolier. Port-Louis est saturé. Nous ne pouvons plus nous satisfaire de ce que nous avons. L’endroit idéal est Albion, de par sa position géographique. C’est le seul lieu où la profondeur de l’eau permet aux gros tankers de s’approcher. Il est aussi nécessaire d’avoir une jetée qui coûtera énormément. Le gouvernement indien nous accordera son aide dans la réalisation de ce projet, qui permettra à Maurice d’aspirer à devenir le hub entre l’Afrique et l’Asie.

Un grand nombre de bateaux traverse l’océan Indien. Nous n’arrivons à attirer que 10 %. Il y a une progression. Nous sommes passés de 250 000 tonnes métriques de bunker fuel à 300 000 tonnes métriques en une année. Notre but est d’atteindre un million de tonnes métriques annuellement. Il faut donc être plus compétitif. C’est un gros défi à relever, mais c’est à notre portée.

Raj Makoond, de Business Mauritius, déplore que le secteur de l’exportation souffre de contraintes systémiques. Comment comptez-vous remédier à la situation ?
C’est vrai que ce secteur passe par des moments difficiles. Si les prix ne sont pas compétitifs, nous risquons de perdre certains marchés. Il y a des pays émergents où le coût est moindre qu’à Maurice et la main-d’œuvre moins chère. Prenons le secteur manufacturier, qui fait face à des difficultés.

Les acheteurs attendent le dernier moment pour passer leurs commandes, qui sont, de ce fait, envoyées par voie aérienne. Cela affecte les revenus. Depuis le 1er avril dernier, le speed to market a été mis en place pour relancer ce secteur. Il y a encore d’autres mesures à prendre. J’ai des réunions régulières avec ceux concernés, dont Business Mauritius. Il y a eu des propositions qui seront considérées lors du prochain budget.

L’interdiction d’exporter de la vieille ferraille favoriserait Samlo. Qu’en est-il au juste ?
Il n’y a pas de favoritisme. Samlo n’est pas  la seule fonderie à Maurice. Il y a en d’autres. Les dealers peuvent se tourner vers plusieurs autres opérateurs pour vendre de la vieille ferraille. J’encourage d’ailleurs l’ouverture de nouvelles fonderies.

 

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