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Drug Users Administrative Panel : la réhabilitation remplace la répression… sous conditions

Dr Nitish Raj Sookool.
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Le Drug Users Administrative Panel est désormais une réalité. Mis en place en décembre 2023 après plusieurs années de préparation, le programme est effectif depuis le lundi 15 avril. Les consommateurs de drogues pourront éviter le système judiciaire s’ils acceptent de suivre un programme de réhabilitation.

«Tout consommateur de drogue intercepté par les services de police en possession d’une petite quantité de drogues destinées à sa propre consommation sera référé vers le Drug Users Administrative Panel (DUAP) », indique le communiqué du ministère de la Santé. Selon le concept du programme, effectif depuis ce lundi 15 avril, tout consommateur de drogue fera l’objet d’une enquête policière dont le rapport sera soumis au bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP). C’est à l’issue de ses recommandations que l’usager sera dirigé vers l’un des six centres de réhabilitation qui collaborent avec le ministère de la Santé. 

« Le programme vise avant tout à assurer la réhabilitation des consommateurs de drogues », souligne le Dr Nitish Raj Sookool, Officier en Charge de la Harm Reduction Unit. « Le but du DUAP est d’éviter qu’ils n’entrent dans le circuit de la justice criminelle car ils ont besoin de soins avant tout », ajoute-t-il. D’autant qu’il a été observé que de simples consommateurs de drogues connaissent d’autres travers après un séjour en prison et sont arrêtés pour d’autres délits criminels par la suite. Cette nouvelle approche vise ainsi à favoriser leur réintégration dans la société. Mieux, estime-t-il, cela contribuera à résoudre le problème de consommation de drogue avec le soutien des centres de réhabilitation.

Cependant, de prime abord, tout dépendra de la quantité de substance illicite trouvée sur les individus, et si l’enquête policière parvient à déterminer qu’elle était destinée uniquement à un usage personnel et non à la vente ou au trafic. L’enquête devra être complétée dans un délai prescrit, précise le Dr Nitish Raj Sookool. 

« Ceux qui seront placés sur le programme auront l’obligation de suivre le programme de réhabilitation pour bénéficier des soins et traitements appropriés afin de pouvoir sortir de leur dépendance à la drogue », ajoute-t-il. En cas de rechute, tout espoir n’est pas perdu. L’addiction est une maladie chronique et le risque de rechute est présent, rappelle-t-il. 

C’est la raison pour laquelle le DUAP va tout faire pour assurer la meilleure prise en charge possible. Il insiste sur le fait que les consommateurs de drogues ont avant tout besoin de soins, ainsi que d’une prise en charge psychosociale. Ils bénéficieront de diverses thérapies et d’un encadrement approprié. Le programme n’a aucune restriction en termes d’âge et concerne tous les patients qui ont besoin d’être réhabilités par rapport à leur problème de drogue. Les mineurs doivent cependant avoir le consentement de leurs parents. « Chaque cas sera traité de manière individuelle et en toute confidentialité », assure l’Officier en Charge de la Harm Reduction Unit. 

Tout au long du programme, les patients seront en « sursis » quant à une éventuelle poursuite judiciaire. Mais en cas d’un manque avéré d’intérêt pour le programme, le consommateur devra alors faire face à la justice, avec toutes les conséquences que cela comporte, dont une entrave pour obtenir un certificat de moralité, indique le Dr Sookool.

Bon accueil des travailleurs sociaux

travailleurs sociaux
Kunal Naïk, Imran Dhannoo et Danny Philippe.

Cette nouvelle approche en matière de politique des drogues à Maurice est bien accueillie par les travailleurs sociaux. « C’est un pas en avant pour le pays », déclare Kunal Naïk, psychologue et addictologue. « Cette démarche est louable », ajoute Danny Philippe, coordinateur de prévention et de plaidoyer au sein de l’entreprise sociale à but non lucratif DRIP. « C’est une bonne collaboration entre le ministère de la Santé et les ONG », souligne Imran Dhannoo du centre Idrice Goomany.

Kunal Naïk avance que cette approche moins répressive vis-à-vis des consommateurs de drogue était attendue depuis plusieurs années. En l’absence d’informations précises concernant le protocole qui a été mis en place, il espère que les travailleurs sociaux pourront faire des propositions pour éventuellement améliorer le programme. 

Imran Dhannoo ajoute que les consommateurs de drogues ne sont pas des criminels à la base, mais des malades qui ont besoin de soins. C’est ce que leur offre le DUAP, qui leur donne la possibilité d’éviter la prison à condition qu’ils adhèrent entièrement au programme. Selon lui, le nombre de détenus incarcérés pour consommation de drogue devrait diminuer, tout comme le nombre de consommateurs dans la société. « Le DUAP est une alternative pour éviter l’emprisonnement », souligne-t-il. Pour lui, le programme s’inscrit dans une logique de soins dont les usagers de drogues ont besoin.

Danny Philippe rappelle qu’il a plaidé en faveur de la mise en place d’un tel programme depuis plus d’une dizaine d’années. Il accueille favorablement ce changement d’approche en matière de politique de drogue, où les consommateurs de drogues ne seront pas confrontés à la justice et leur certificat de moralité ne sera pas entaché. 

Il souligne également qu’un travail de sensibilisation a été effectué avec divers chefs religieux pour faire comprendre que les usagers de drogue ont davantage besoin de soins que de se retrouver en prison. Danny Philippe espère maintenant qu’une campagne sera menée auprès de la population afin qu’elle comprenne le principe de ce programme.

Selon nos différents interlocuteurs, le DUAP sera un atout pour la société et le pays avec moins de dépenses de l’État en matière de délits liés à la drogue dans le système judiciaire, mais aussi pour la prise en charge des détenus en prison.

L’ancien juge Abdurrafeek Hamuth à la présidence

C’est à l’ancien juge Abdurrafeek Hamuth qu’a été confiée la présidence du DUAP. Il a été nommé en 2023. Le panel est constitué de plusieurs membres, dont deux travailleurs sociaux et deux médecins. Le panel compte deux divisions qui auront les mêmes fonctions. L’une est présidée par l’ancien juge Hamuth et l’autre par le vice-président du DUAP, avec un travailleur social et un médecin dans chacune d’entre eux, afin de faire avancer les dossiers, explique le Dr Nitish Ray Sookool de la Harm Reduction Unit du ministère de la Santé.

À noter que l’ancien juge Hamuth a également présidé la commission d’enquête sur l’échouage du MV Wakashio en janvier 2021. Il a été nommé Grand Commander of the Order of the Star and Key of the Indian Ocean (GCSK) en mars 2019.

La mise en place du DUAP est l’une des recommandations de la Commission d’enquête sur la drogue et fait suite aux amendements qui ont été apportés à l’article 34 du Dangerous Drugs Act 2022.

 

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