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«J’étais l’esclave sexuelle de mon employeur», confie Mariam, une Rodriguaise vivant à Maurice

mariam Son calvaire était à la fois au boulot et à la maison.

Elle est née à Rodrigues. Enfant, Mariam est maltraitée sans raison par un père alcoolique. Ne pouvant plus subir les coups de son bourreau, elle s’enfuit avec l’homme qui devient plus tard son mari. À 18 ans, elle met le cap sur Maurice pour une nouvelle vie. Sous le toit conjugal, elle est abusée à plusieurs reprises dans son sommeil. Mère de famille, elle doit absolument trouver du boulot pour nourrir ses enfants. Des années plus tard, elle devient, malgré elle, l’esclave sexuelle d’un de ses employeurs. 

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Après s’être longtemps murée dans le silence, cette habitante du Nord, âgée aujourd’hui d’une quarantaine d’années, raconte son calvaire au Défi Plus. Le visage marqué par le temps, Mariam, 40 ans, est en pleine prière lorsque nous frappons à sa porte. Dix minutes plus tard, elle commence à tout dévoiler. « Si vous n’étiez pas venu me voir, j’aurais emporté cette histoire au fond de ma tombe. Je peux en parler aujourd’hui, car Dieu est devenu ma force. Je ne vis plus dans la peur. Mais par où commencer ? J’ai tellement connu d'atrocités… » 

Elle débute avec l’histoire de son premier bourreau, son père, alors fonctionnaire. «Sous l’emprise de l’alcool, il se défoulait sur moi à la moindre occasion. Il n’y avait pas d’heure ni de raison. Il me tabassait à coups de bois. J’avais constamment des plaies à la tête et sur le corps ». Elle continue: " J’étais quotidiennement maltraitée. On m’a souvent dit que je n’étais pas la fille de ma mère. Je me suis fait à cette idée, car elle ne me protégeait pas contre mon père. Depuis qu’elle s’est remariée, il y a 20 ans, elle vit à Maurice. Elle m’a présentée des excuses et nous avons des relations cordiales. Quant à mon père, je ne l’ai pas revu depuis que je suis ici. Je n’ai plus de ses nouvelles. » 

Après le Certificate of Primary Education, Mariam reste à la maison pour faire le ménage et s’occuper de ses frères et sœurs. À 14 ans, elle travaille dans un champ agricole. Un garçon que nous prénommerons Jamel lui fait la cour. Sachant que sa famille et celle du garçon ne s’entendent guère, l’adolescente ne donne pas suite à cette relation par peur de représailles. « Ma famille était très orthodoxe, tout était interdit et au moindre faux pas, on nous frappait. » 

En allant rendre visite, un jour, à son parrain en compagnie de son père, elle aperçoit Jamel qui arrive en face. Elle l’évite, histoire de ne pas se faire réprimander par son père. En vain. De retour à la maison, le papa s’en prend à elle et la traite de prostituée. Blessée par les propos de son paternel, Mariam décide de mettre fin à ses jours. « J’ai bu un flacon de rhum au goulot jusqu’à devenir presque inconsciente. En me voyant dans cet état, mon petit frère, sachant que j’allais me faire lyncher par mon père, a essayé de me faire dormir. Ce faisant, il m’étouffait en voulant me cacher sous un drap. Je ne pouvais plus respirer, J’ai hurlé. Mes parents ont accouru mais j’ai réussi à m’enfuir. » 

Deuxième tentative de suicide

Mariam, craignant d’y laisser sa peau si elle rentrait à la maison, se jette devant les roues du premier véhicule qui arrive. Elle est rattrapée de justesse par ses proches et sa mère qui lui couraient après. « J’essayais d’expliquer que je voulais me suicider, mais ils me traitaient de saoularde. Ils m’ont frappée et j’ai perdu connaissance. » Elle se réveille le lendemain avec, à son chevet, son petit frère qui lui badigeonne ses bras d’huile de paraffine. Ne pouvant retenir ses larmes, elle poursuit : « Je n’avais que mes sous-vêtements, j’étais couverte de bleus.  Je ne pouvais plus bouger. Je suis restée clouée au lit pendant deux semaines. » 

À peine sur pied, Mariam reprend son boulot dans les champs. Elle continue à être le souffre-douleur de son père. Elle n’en peut plus. Elle décide de quitter la maison. Elle se confie à sa petite sœur qui comprend sa souffrance. Elle devient sa complice en mentant : « Mariam est partie faire pipi dans les bois et je ne l’ai plus revue. » Auparavant, elle avait parlé à Jamel pour la première fois à travers une fenêtre. « Je l’ai imploré de m’aider, il a accepté et j’ai fugué. » Ils se cachent dans les bois pendant des heures, histoire de trouver une solution. « J’étais à un point de non-retour. C’est mon chien qui m’a retrouvée lors d’une battue organisée par mes proches et mon père mais j’ai pu m’échapper en passant par la terrasse. Ils n’ont pu me rattraper et je me suis refugiée chez Jamel où ses parents m’ont bien accueillie. »

La fouille des poubelles…

Mariam doit quand même faire face à son père. Elle ajoute : « Il m’a reniée après m’avoir remis Rs 1 000 et un porcelet. Je ne sais toujours pas pourquoi il me les a donnés, car il ne m’a jamais aimée… Mais puisque Jamel se rendait à Maurice pour travailler, l’argent offert par mon père est bien tombé. Je me suis acheté un billet d’avion pour Maurice. » À son arrivée, elle est abritée chez sa belle-sœur pour un certain temps. Elle trouve du travail dans une usine. À la naissance des enfants, Mariam et Jamel décident de louer une maison. 

Cependant, le jeune couple se retrouve à court d’argent, car Jamel ne travaille pas régulièrement. Elle décide donc d’aller habiter chez sa mère qui est venue vivre à Maurice. En raison des conflits, Mariam n’y reste pas longtemps et elle n’a d’autre choix que de louer une maison dans une cité ravagée par le fléau de la drogue. Jamel, qui n’a toujours pas de boulot fixe, a un penchant pour la bouteille et elle subit la violence domestique. Elle prend son mal en patience. Elle se retrouve livrée à elle-même. Faute d’argent, elle fouille les poubelles pour trouver de la viande et de la nourriture périmée pour nourrir ses enfants. Elle récupère des bouts de savon pour le bain et autres babioles qui peuvent servir. « J’ai fait ça pendant longtemps mais en raison d’une mauvaise alimentation, nous étions souvent malades. » 

Sous l’emprise de son patron

Pour joindre les deux bouts, Mariam réussit à trouver un petit boulot dans l’empaquetage des aliments. Son employeur n’est pas insensible à ses conditions de vie. Il la couvre d’attentions et Mariam succombe à ses charmes. De cette histoire, naît une relation. « Pour une fois quelqu’un me traitait bien... Mais sachant que je commettais l’adultère, je me suis retrouvée à détester mon reflet dans le miroir… » Ensuite, Mariam décide de se lancer à son compte en tant qu’entrepreneure. Cela ne marche pas. Tout comme sa relation avec son employeur. 

Elle sait travailler la terre et elle trouve un emploi dans un champ agricole. Nuit et jour, elle fait pousser des légumes à la sueur de son front et fait fructifier les comptes en banque de son employeur. Ce dernier, ravi de sa performance, commence à s’intéresser à elle bien qu’il soit marié et père de famille. Après avoir amadoué Mariam en lui offrant des repas décents, il épie ses faits et gestes jusqu’à s’intéresser à sa vie privée. 

Pensant que son patron se soucie de son bien-être, Mariam se confie volontiers. Elle est loin de se douter de ses intentions réelles. 

« Au début, quand il sympathisait avec moi, je voyais en lui quelqu’un de confiance. Très vite, il a commencé à avoir une emprise sur moi. Il venait me chercher à la maison et il n’y avait pas d’heure pour avoir des relations dans son champ. J’étais devenue son esclave sexuelle", dit Mariam. "Il devenait de plus en plus possessif et il menaçait de s’en prendre à mes enfants si je ne lui obéissais pas. »  

La prière pour sauveur

Mariam subit en silence les caprices de son employeur qui va jusqu’à lui imposer de suivre sa religion. Elle se plie à sa volonté, car elle craint de perdre son emploi. « En plus de me forcer à coucher avec lui, chaque matin il vérifiait si j’avais eu des relations sexuelles avec mon mari. Je dois dire que ce dernier abusait souvent de moi... J’étais comme une épave. Mon calvaire était à la fois au boulot et à la maison. Mon employeur me martyrisait de plus en plus. Une fois, il m’a humiliée dans les champs dans lequel je travaillais. Il m’a forcée à me dénuder en public. Il m’a dit qu’il allait me tuer si je ne le faisais pas. Il a fait de ma vie un enfer. »

Désespérée, Mariam ne sait à quel saint se vouer pour sortir de ce gouffre. C’est un groupe de prières qui va l’aider. « Je n’en pouvais plus et je me suis confiée à des personnes qui m’ont accompagnée spirituellement jusqu’à ce que je sois assez forte pour me défaire de cette situation. »

Actuellement, Mariam s’occupe de ses enfants et continue son cheminement spirituel. Elle vit encore avec son mari même s'il continue à boire. Si avant elle avait peur des représailles et des conséquences, aujourd’hui Mariam affirme haut et fort: « Désormais, j’arrive à me défendre lorsqu’on me malmène. Tout ce qui m’importe aujourd’hui, c’est la prière et l’éducation de mes enfants».

 

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