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Le droit à la justice

L'égalité devant la justice constitue un des piliers d'une démocratie digne de ce nom ; c'est aussi l’un des principes fondamentaux de tout état de droit. Or, certaines décisions de la cour ces derniers temps ne peuvent que renforcer la perception d'une justice à deux vitesses et justifier le principe abominable de « bail for the rich, jail for the poor ». L'institution concernée a le devoir de rétablir l'équilibre en éclairant la lanterne du public en général sur des questions somme toute pertinentes : Pourquoi la liberté conditionnelle est-elle accordée à certains notables à 17, 18 voire 19 heures, même un samedi ou un jour férié, ceux-ci étant autorisés à rentrer chez eux et à venir ensuite payer leurs cautions ? Pourquoi un magistrat est-il toujours disponible pour certains, les caisses restant ouvertes même après les heures normales de bureau ? De nombreux observateurs sont d'avis qu'un juge d'instruction dans notre système d'investigation au pénal aurait certainement permis la résolution complète de l'affaire Gorah-Issac dès la fin de la première enquête débutée en 1996. Idem pour l'affaire Azor Adélaïde qui fut rouverte en 1989, plus de 15 ans après le premier procès ! Il convient de reconnaître que, dans un système accusatoire comme le nôtre, où une personne est d'abord arrêtée et incarcérée sur une simple allégation, avant même que les enquêteurs aient pris le soin de faire la moindre vérification, même préliminairement, seule une supervision des services d'enquête en amont par une autorité indépendante pourrait améliorer la qualité des investigations et remédier aux carences soulevées lors des procès, tout en respectant les droits fondamentaux des citoyens, garantis par la Constitution. Aux interrogations des avocats de la défense lors des enquêtes, la police n'a, manifestement, qu'une réponse préconçue : « lord vine depi lao ». Ce qui a d'ailleurs fait sortir le ministre de la Bonne gouvernance de ses gonds en conférence de presse le 25 novembre dernier. Mais l'ordre vient réellement de qui : du Commissaire de police ? Du parquet ? Des politiciens ? Dans les enquêtes policières comme dans la justice dans son ensemble, l'élément de confiance repose principalement sur la crédibilité, la compétence et la transparence. Et vu que la grande majorité des prévenus ne retiennent pas les services d'un homme de loi et ne peuvent, encore moins, solliciter l'assistance d'un juge un samedi pour faire ratifier une injonction ou à 22 heures pour faire obstacle à une décision de la police de les placer en cellule, les cas d'abus de la part des enquêteurs ne peuvent être négligés. Et il n'est un secret pour personne que l'aveu souvent obtenu dans les conditions que l'on sait, constitue la méthode la plus répandue dans le domaine d'enquête criminelle à Maurice. L'affaire Michaëlla Harte est notamment un exemple flagrant des  failles dans les enquêtes policières qui reposent essentiellement sur des aveux. Il est évident qu'une Police and Criminal Evidence Act, annoncée pourtant depuis belle lurette aurait, dans une grande mesure, permis de rectifier le tir. Or, dans beaucoup de cas, le magistrat ne fait qu'approuver la requête de la police qui, à propos, ne possède aucune expertise en matière de droits constitutionnels, pour enlever la liberté à un suspect, ne jetant même pas un oeil sur ce dernier dans le box des accusés. L'opacité alimentant toujours la spéculation, il est temps de briser la glace et tordre le cou à l'existence de ce « mouvement conservateur dans le judiciaire », dont fait mention le juge Balancy lors d'une interview accordée à Le Dimanche/L’Hebdo dans son édition du 15 janvier 2012. Le député de la majorité Ravi Rutna, était même allé plus loin dans son discours sur le programme gouvernemental à l'Assemblée nationale, le 26 février 2015, en plaidant pour « une réforme en profondeur du judiciaire », « une révision des critères de recrutement des juges et magistrats » et « l'institution d'un Judicial Complaints Bureau », ce « afin d'avoir un contrôle sur la conduite des juges et magistrats ». En décembre 2014, l'Alliance Lepep avait obtenu un mandat populaire clair et sans appel « pou nettoye  sa pays la ». Il est temps, par conséquent, de casser les reins à toutes ces pratiques abominables qui continuent à pourrir la vie quotidienne des citoyens.
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