Economie

Le salaire minimal : ses conséquences positives et négatives

zone_franche Les travailleurs exerçant dans le segment 'Export-Oriented' (la Zone Franche) toucheront Rs 9 000 au final.

Trois ans après son annonce dans le programme électoral du présent gouvernement,  le salaire minimal fera désormais partie du paysage économique mauricien à partir de janvier 2018. En effet, le gouvernement a agréé à un salaire minimal de Rs 9,000, alors que le National Wage Consultative Council avait proposé Rs 8,500. Mais quel sera l’impact sur l’économie ?

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Le salaire minimal tant attendu sera enfin en vigueur à partir de janvier 2018. Désormais, quelle que soit la nature du travail, personne à Maurice ne touchera moins de Rs 9,000 comme salaire mensuel. Cette importante décision provoquera la mise à jour de plusieurs barèmes salariaux, tant sous le Pay Research Bureau (PRB) que sous les National Remuneration Orders (NRB).

Le salaire minimal concerne environ 120,000 travailleurs, dont 20,000 exerçant dans le segment ‘Export-Oriented’ (anciennement connu comme la Zone Franche).  Dans la pratique, le salaire minimum sera en effet de Rs 8,140 auxquelles s’ajoutera la compensation salariale de

Rs 360 et une contribution spéciale de Rs 500 de la Mauritius Revenue Authority. Mais c’est quoi le salaire minimal ou minimum ? Le salaire minimum est le salaire le plus bas qu'un employeur peut accorder à ses employés. En d’autre mots, à partir de janvier 2018, plus personne ne pourra employer quelqu’un à plein temps à un salaire moins de Rs 8,140, car ce serait illégal.

Véritable mesure de relance ou décision symbolique, le salaire minimum aura bien évidemment des conséquences économiques. Bien que le salaire minimum peut être économiquement néfaste pour certaines petites et moyennes entreprises, il peut tout aussi être indispensable pour soutenir la consommation, et par ricochet la croissance économique du pays. À terme, il pourra contribuer à amener le pays vers le statut de pays à hauts revenus.

L’impact Sur les entreprises

Certaines entreprises peuvent ne pas avoir la capacité de payer un niveau de salaire élevé à leurs employés. Le coût additionnel de la masse salariale peut avoir une incidence sur la liquidité ou la viabilité de ces entreprises. Certaines entreprises pourront revoir le nombre d’effectifs et mettre certaines personnes à la porte.

Il y aura aussi un effet sur les nouveaux recrutements, car les entreprises seront contraintes de limiter les embauches, si cela leur coûtera plus cher. À noter que le salaire minimal s’appliquera aussi aux travailleurs étrangers.

Sur les employés

Le réajustement des salaires de ceux au bas de l’échelle permet indirectement à une revalorisation de l’emploi. Par exemple, un employé qui jadis touchait Rs 6,000 par mois peut aspirer maintenant à un salaire de Rs 9,000. Cette hausse aura également un effet psychologique positif sur l’employé qui sera plus motivé dans son travail.

Cela peut résulter en un gain de productivité pour l’entreprise. Mais il y a aussi l’effet contraire. Les autres catégories d’employés qui touchaient déjà un minimum de Rs 9,000 par mois ne verront aucun changement dans leurs salaires, à part la compensation salariale. Certains pourront demander une augmentation de leur grille salariale.

La frustration peut gagner certains employés qui sont hiérarchiquement plus hauts que les autres, mais qui touchent maintenant presque le même niveau de salaire. D’autre part, il y a aussi le risque que des employeurs augmentent le volume de travail de ceux qui toucheront plus que d’habitude.

Sur la consommation

Les consommateurs satisfaits mais plus prudents.

Avec 120,000 personnes bénéficiant d’une augmentation de revenus, ce sera une injection dans le circuit monétaire et cela augmentera la demande. C’est le secteur de la consommation qui gagnera. La relance de la consommation bénéficiera aux commerçants, aux PME, mais aussi à l’État sous forme de recettes additionnelles de la TVA.

Il est un fait dans toutes les économies du monde que les salariés les moins bien rémunérés ne consacrent qu'une part infime de leurs revenus à l'épargne, donc la consommation sera bien stimulée à partir de janvier 2018.

Sur l'emploi

Il est souvent perçu qu’une hausse de salaires peut entraîner l'abolition de l’emploi. Mais avec la formule préconisée par le gouvernement, c’est la Mauritius Revenue Authority qui vient à la rescousse des employeurs en payant la somme de Rs 500 (et Rs 860 pour la zone franche) sous forme de contribution spéciale.

Et la MRA devra bien puiser ces fonds quelque part. En effet, la stimulation économique engendrée par l’injection monétaire et l’effet multiplicateur vont renforcer les recettes fiscales. Par contre, faute de trouver un emploi, il y aura toujours des gens qui accepteront de travailler pour moins de Rs 9,000 par mois, car refuser équivaut à rester au chômage.

Cela se passera plutôt dans le secteur informel. Un employeur ne peut embaucher une personne que si le produit de son travail a, à ses yeux, plus de valeur que le salaire qu'il doit lui verser. En imposant un salaire minimum, le législateur ferme l'accès à l'emploi formel à tous les travailleurs, dont, la valeur de la production est inférieure à celle du salaire minimum.

Sur le niveau de vie

Des milliers de familles au bas de l’échelle percevront une augmentation conséquente dans leurs revenus, et pourront améliorer leurs conditions de vie, surtout à travers une meilleure alimentation ou plus de loisirs. Cela améliorera la qualité de la vie et sera bénéfique à la productivité sur le lieu du travail.


Arvind Nilmadhub : « Cela créera une anomalie dans la grille salariale »

L’économiste Arvind Nilmadhub dit qu’un salaire minimal est une bonne chose, mais qu’il y a aussi ses inconvénients. « Bien qu’il y a des Remuneration Orders, c’est la loi du marché qui détermine ce qu’un employeur est disposé à payer à un employé.

Dans le secteur du transport par exemple, des employeurs acceptent de payer deux ou trois fois la moyenne en vigueur, car ils n’arrivent pas à trouver assez de chauffeurs de poids lourds compétents par exemple. » Il explique qu’un employeur satisfait de la contribution de son employé n’hésite pas à payer au-delà du barème préconisé.

Il faut noter que le salaire minimum ne concerne que ceux qui touchent des salaires moins de Rs 9,000, alors que le salaire de la grande majorité des travailleurs demeure inchangé. Cela va créer une anomalie dans la grille salariale de plusieurs secteurs d’activités et il n’est pas à écarter que les syndicats demandent bientôt une révision salariale à tous les niveaux.


Rishi Callychurn : « Baisse de criminalité, mais… »

Rishi Callychurn, travailleur social et dirigeant de l’ONG Greenlife, pense qu’un salaire minimal peut entraîner une baisse de la criminalité. « Les gens toucheront plus d’argent, ils seront plus motivés à travailler au lieu de rester chômeurs, et cela aura une incidence positive sur la criminalité, surtout les vols. »

Mais, il appréhende aussi le risque que des accros aux drogues synthétiques, par exemple, trouvent moyen de consommer plus que d’habitude. Les travailleurs peuvent aussi être attirés davantage vers les jeux du hasard. Il prévoit aussi une explosion dans le nombre de deux roues, car plus de travailleurs de la classe moyenne pourront acheter une moto à crédit. « C’est au gouvernement de prévoir pour renforcer la sécurité des usagers sur nos routes. »

 

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