Perte de confiance dans nos institutions : couper à la racine la politique tentaculaire du pouvoir

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Le sondage d’Afrobarometer, publié dans le courant de la semaine, fait état d’une érosion de la confiance des Mauriciens dans les institutions. De l’Assemblée nationale à la police, en passant par la présidence, les instances de l’administration publique font pâle figure. Un revirement de situation est-il possible ? Analyse.

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Tout est à refaire. Il faut, selon l’historien Jocelyn Chan Low, une réforme en profondeur. Et cela doit, dit-il, avant tout se faire à travers notre système d’enseignement. « À Maurice, on a tendance à voir les choses en blanc ou en noir. Il n’existe aucun programme de socialisation politique. Ce manque d’intérêt des jeunes Mauriciens pour la vie politique du pays est le résultat de notre pauvre culture démocratique », fait ressortir l’historien. Il y a, de ce fait, urgence dans ce domaine, affirme-t-il.

Jocelyn Chan Low est d’avis que le système éducatif mauricien impose des visières aux écoliers. Il plaide ainsi pour l’enseignement de l’Histoire et pour des programmes qui inciteront les jeunes à s’intéresser « au fonctionnement de leur pays ». Jocelyn Chan Low considère, par exemple, qu’un « collégien doit savoir comment est élaboré le budget pour la gestion de son pays ».

Indépendance

Il en appelle aussi aux personnalités occupant des postes constitutionnels. Selon lui, il est impératif que ces derniers prennent « conscience qu’ils doivent apprendre à opérer en toute indépendance ». « Notre Constitution garantit l’indépendance de certains postes. C’est, par exemple, le cas pour le poste de commissaire de police. Cependant, on constate que nombreux sont ceux qui ont le sentiment que la police est plus que jamais au service du pouvoir », souligne-t-il.

Jocelyn Chan Low propose finalement la mise en place de garde-fous bien définis pour prévenir contre tout dérapage et garantir davantage de démocratie. Il plaide ainsi pour la Freedom of Information Act, car « le fonctionnement du pays est souvent miné par l’opacité ».

Responsabilité des partis politiques

Une réflexion s’impose au niveau des formations politiques, clame pour sa part l’avocat Ashok Radhakissoon. Il fait ressortir que, fondamentalement, ce sont les partis politiques qui décident de la « qualité » des hommes et des femmes appelés à diriger le pays, que ce soit au niveau du Conseil des ministres que des institutions gouvernementales. « Il ne faut pas oublier que ce sont les partis qui alignent 60 candidats lors des élections générales. Les leaders politiques doivent, de ce fait, s’assurer de proposer des personnes compétentes pour briguer les suffrages. Actuellement, les critères qui sont pris en considération lors de ce choix laissent à désirer  », déclare-t-il.

L’ancien gouverneur de la Banque de Maurice (BoM), Dan Maraye, propose, lui, une dépolitisation des institutions gouvernementales. « Les politiciens doivent rester à l’écart des institutions. Ils doivent se contenter d’avoir un droit de regard et de n’intervenir qu’en cas de dérapage », explique-t-il.

Dan Maraye considère aussi que la composition des conseils d’administration est un autre facteur crucial pour veiller au bon fonctionnement des institutions. « C’est un fait que nos institutions pullulent de nominés politiques. Ces derniers doivent s’assurer d’être au courant du fonctionnement de l’institution qu’ils sont appelés à administrer. Ils doivent aussi être pleinement conscients de leurs droits et des limites à ne pas franchir. Le Board ne doit pas être impliqué dans la gestion au quotidien », fait-il ressortir.

L’ancien gouverneur de la BoM soutient finalement que les nominés politiques doivent avoir une culture de bonne gouvernance. « C’est de cette façon que nos institutions pourront se refaire une santé et ainsi inspirer confiance », avance-t-il.

Crise à plusieurs niveaux

L’avocat et militant au sein du Muvman Premye Me, Dev Ramano, est, quant à lui, d’avis que cette perte de confiance dans nos institutions met en évidence « une crise qui s’étend à différents niveaux ». « Nous souffrons aujourd’hui d’une crise sociale, économique, politique et écologique », explique-t-il.

Et d’ajouter que la solution ne peut se trouver à l’intérieur du système, qui est déjà la cause fondamentale de cette crise. « La vérité, c’est que notre démocratie ressemble aujourd’hui à une coquille vide », affirme-t-il. Dev Ramano considère, de ce fait, qu’il est grand temps de procéder à la création d’une nouvelle République, capable de rassembler et de fédérer tous les Mauriciens. « L’État doit changer de mission statement », dit-il.

Confiance dans nos institutions

Government accountability vs efficiency

Does Mauritius need many political parties ?

 

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