Débat

Portable Severance Allowance : les salariés du privé pourront-ils préserver leurs années de service ?

Le syndicaliste Chuttoo Le syndicaliste Chuttoo s'adressant aux licenciés qui ont perdu leurs années de service.

L’introduction d’un « Portable Severance Allowance Fund » dans le secteur privé fait son chemin. Un comité interministériel se penche actuellement sur la question dans le sillage des amendements qui seront apportés à l’Employment Relations Act et l’Employment Rights Act. Si cette proposition est approuvée, elle permettra aux salariés du secteur privé de préserver leur temps de service, qu’importe le nombre d’employeurs qu’ils ont eu durant leur vie professionnelle.

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Valeur du jour, les salariés du privé perdent leurs années de service lorsqu'ils quittent une entreprise pour une autre, que ce soit après un licenciement ou après avoir décidé de changer de travail. Ce qui veut dire qu’à chaque fois qu’ils changent d’employeurs, les compteurs sont remis à zéro.  Cette situation pourrait changer avec l’introduction du Portable Severance Allowance Fund. Tout comme les fonctionnaires, la totalité de leur temps de service pourrait être comptabilisée à l’âge de la retraite pour le calcul de leur gratification de retraite quel que soit le nombre d’entreprises où ils ont travaillé durant leur carrière.

J’ai perdu mon travail et mes années de service.»

C’est un long combat mené depuis des années par la Confédération des Travailleurs du Secteur Privé (CTSP). L’idée a germé quand ses dirigeants, Reaz Chuttoo et Jane Ragoo, ont été témoins du nombre de salariés du secteur privé, plus particulièrement ceux de la zone franche, qui perdent leurs longues années de service  après avoir été licenciés du jour au lendemain pour des raisons économiques.

C’est le cas de Margaret qui s’est retrouvée sur le pavé après plus d’une vingtaine d’années de service quand l’usine qui l’employait a fermé ses portes pour des raisons économiques « J’ai tout perdu, mon travail et mes années de service. On n’a eu droit qu’à un mois de préavis. Toutes ces années de travail pour rien », confie-t-elle amèrement. Elle a été embauchée dans une autre compagnie mais elle a dû quitter son emploi en raison des conditions qui n’étaient pas favorables. Aujourd’hui, elle gagne sa vie en faisant du repassage à domicile. Tout comme elle, de nombreux travailleurs, notamment dans les secteurs de la construction, manufacturier et autres, ont vécu cette expérience.

La formule proposée par la CTSP

Que propose la CTSP ?  Selon Reeaz Chuttoo, tout employeur du secteur privé devrait contribuer en donnant une somme d’argent équivalant à une journée de rémunération dans un fonds connu comme le Portable Severance Allowance Fund pour chaque employé. Il insiste sur la rémunération car, dit-il, la gratification de retraite est calculée sur les rémunérations de l’employé. Il souhaite aussi que le boni de fin d’année soit inclus.

Une journée de salaire par mois donnera 13 jours de salaires par an, si on inclut le boni de fin d’année. Ce qui fait que le salarié perd deux jours de contribution par an par rapport à la gratification de retraite qui est calculée sur 15 jours par année de service. Pour combler cette lacune, le syndicaliste propose que les contributions au Portable Severance Allowance Fund soient versées dans un Government Secured Bond et que les bénéfices accrus servent à combler ces deux jours manquants. Ce qui fait que tout comme la gratification de retraite, les travailleurs bénéficieront de 15 jours par année de service pour le Portable Severance Allowance Fund. Pour qu’il n’y ait pas d'abus, il souhaite que ce fonds ait un lien avec la Mauritius Revenue Authority et le National Pension Fund.

Au niveau du patronat, on laisse entendre qu’il est prêt à discuter d’un Portable Severance Allowance Fund dans le cadre des amendements des lois du travail. Toutefois, cela ne doit pas se faire au détriment des employeurs.


 

Pôle emploi

Reeaz Chuttoo estime que tout salarié doit avoir la possibilité de réclamer ses contributions au Portable Severance Allowance Fund en cas de licenciement. D’où sa proposition pour qu’on introduise un système de Pôle emploi. Ce qui fait que le nom de tout licencié entre automatiquement dans une base de données afin qu’il puisse retrouver au plus vite un emploi alternatif. 

Quant aux amendements aux lois du travail, il souhaite que tout salarié qui conteste son licenciement ait le droit de poursuivre son employeur en justice et ait droit à un dédommagement avec intérêts. Il regrette qu’à ce jour, le salarié n’ait droit qu’au montant de sa compensation malgré le nombre d’années qu’a duré le procès.


Dev Luchmun : «Un comité pour travailler sur la question»

Le consultant en relations industrielles, Dev Luchmun, est favorable à l’introduction d’un Portable Severance Allowance Fund pour les employés du secteur privé qui, estime-t-il, souffrent d’une discrimination par rapport aux fonctionnaires concernant leur temps de service. Cela dit, il plaide pour la mise sur pied d’un comité comprenant des représentants du gouvernement, des actuaires, du patronat et des syndicats pour travailler sur une formule acceptable du Portable Severance Allowance Fund. « Il est primordial de trouver une formule qui fasse l’unanimité », dit-il.

Concernant les employeurs qui parleraient de charge additionnelle, il attire l’attention sur le fait que la loi prévoit déjà le paiement d’une gratification de retraite qu’ils doivent obligatoirement payer. « Il vaut mieux qu’ils contribuent à un Portable Severance Allowance Fund selon une formule qui sera décidée au lieu de dire qu’ils n’ont pas d’argent à la fin pour payer les gratifications de retraite. »

 

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