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Sacs plastique : ce qui a vraiment changé

Cela fait dix-huit mois que les sacs en plastique non-biodégradables sont interdits sur le marché. Si les Mauriciens et les grandes chaînes de distribution se sont plutôt bien adaptés à la situation, certains petits commerces font encore de la résistance.

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Depuis plus d’un an, chacun a dû changer ses habitudes à la suite de l’interdiction des sacs plastique gratuits à la sortie des caisses.

Désormais, il faut choisir entre trois solutions, selon les enseignes : sac en papier à Re 1,50 voire Rs 3, sac en plastique biodégradable entre Rs 3 et Rs 10 ou de grands sacs réutilisables vendus à environ Rs 40. Ainsi aujourd’hui, l’achat d’un nouveau sac au passage en caisse est plutôt l’exception.

« En fait, le plus souvent on est pris au dépourvu.  D’habitude, j’apporte mes sacs. Mais en cas d’urgence, en faisant un détour imprévu par le supermarché en route, on est obligé d’en acheter », fait ressortir Karen, munie de deux sacs  plastique à sa sortie d’une grande surface.

Et d’ajouter : « Très souvent, je passe au supermarché pour seulement un article mais après je me retrouve à acheter d’autres choses. Et au final, je suis contrainte d’acheter en caisse un sac recyclable alors que j’en ai plusieurs à la maison. »

Santosh, lui, ne risque pas de se laisser prendre. « J’ai toujours des sacs réutilisables dans ma voiture depuis que la nouvelle loi est entrée en vigueur. Et s’ils ne suffisent pas pour mes courses de fin de mois, je me rabats sur les boîtes en carton que la plupart des supermarchés mettent à notre disposition. Je n’achète pratiquement plus de sacs plastique. »

Les consommateurs préfèrent les sacs réutilisables.

En effet, ils sont nombreux les Mauriciens à avoir adopté de nouvelles habitudes de consommation. « Aujourd’hui, on constate une demande en régression des sacs plastique biodégradables vendus aux caisses », souligne Shah-Nawaz Shakhun, le responsable des opérations de la chaîne Winner’s. En une année, l’enseigne a vu ses ventes de sacs plastique aux caisses réduites de 75 %.

« Les sacs en papier ne sont pas très demandés  non plus. Le Mauricien est devenu un adepte des sacs réutilisables, ce qui prouve que l’objectif initial est en passe d’être atteint », estime Shah-Nawaz Shakhun. Même son de cloche du côté de Somags qui regroupe les enseignes Jumbo et Spar. Mylene Casquette, de la centrale d’achat de cette société, note un changement notable des habitudes des consommateurs. « Mais il y a ceux qui continuent à acheter des sacs à la caisse, en dépit du prix à payer. Quoi qu’il en soit, on est sur la bonne voie. »

Par ailleurs, un non-respect des règlements est déploré chez les petits commerçants. « Alors que dès le départ, nous avons adapté notre offre de manière à offrir des alternatives à nos clients, les marchands de rue ou encore les maraîchers ne jouent pas pleinement le jeu. Je trouve que c’est dommage », dit Yannick Lew, responsable qualité chez Super U.

Selon le ministère de l’Environnement, depuis l’entrée en vigueur des nouvelles règles en janvier 2016, 210 contrevenants ont été verbalisés pour la vente et la distribution illégales de sacs interdits. Cependant, hormis les quelques « récalcitrants », le ministre de tutelle note un changement positif et une prise de conscience des Mauriciens par rapport à l’environnement. « Je constate que les sacs plastique noirs, qui jadis enlaidissaient le paysage, ont disparu », se réjouit Étienne Sinatambou.


Toute une réadaptation !

L’interdiction des sacs plastique non-biodégradables s’applique à tous les commerces : alimentation spécialisée (boulangeries, boucheries, fast-food), petites et grandes surfaces, stations-service, pharmacies, marchés couverts et de plein air, etc. Si la plupart des supermarchés étaient préparés aux changements annoncés, en revanche  l’adaptation pour les petits commerçants s’est révélée un peu plus compliquée.

« Au début, c’était très difficile d’autant que les sacs plastique bio n’étaient pas disponibles sur le marché », explique Anjanee, maraîchère. Une situation compliquée pour elle et ses confrères marchands de légumes. « Dimoune lamem rod sac kan li vinn lafwar. Nous n’avions eu d’autre choix que de continuer à en distribuer, même les sacs qui n’étaient pas aux normes. » Aujourd’hui encore,  les sacs en plastique noirs circulent dans les foires, que ce soit pour les produits alimentaires ou de l’habillement. « Nou travay lor ti profi, donc difficile de s’acheter des sachets spéciaux, en plastique ou en papier, qui coûtent plus cher. En plus, le client ne voudra pas payer un sac à Rs 10 pour trois pommes à Rs 10 », lance Annif, marchand de fruits.

Dans les supermarchés, le constat est différent. Shah-Nawaz Shakhun, le responsable des opérations de Winner’s indique que « comme cette annonce était attendue depuis plusieurs années déjà, nous avions décidé, depuis 2010, de trouver des alternatives ». Il poursuit : « C’est ainsi que nous proposons des sacs en papier (recyclés). Beaucoup de nos clients ont apprécié et en sont aujourd’hui utilisateurs ». 

Certes, ces sacs sont moins résistants et moins pratiques, mais tout dépend de ce qu’on veut y transporter. « Ce n’est pas approprié pour des produits frais ou réfrigérés. Le papier se déchire facilement dans ce cas-là », note Yannick Lew, responsable Qualité de Super U. Ainsi, en l’absence d’engouement pour ces sacs en papier, l’enseigne n’en propose plus et se limite à du plastique biodégradable ou de grands sacs réutilisables. « Dépendant de la disponibilité, nous proposons aussi à nos clients des boîtes en carton dans lesquelles arrivent nos marchandises », précise Yannick Lew.

Pas de papier chez Jumbo et Spar non plus, si ce n’est pour la boulangerie et la pâtisserie. « Avant même l’entrée en vigueur des nouvelles règles, nous avions recherché des fournisseurs de sacs écologiques. En sus d’avoir affaire à des fournisseurs locaux, nous importons nos sacs personnalisés, plus grands, plus pratiques et plus esthétiques », souligne pour sa part Mylene Casquette de la centrale d’achat de Somags.


Ce que dit la loi

La peine maximale pour tout contrevenant aux règlements est de Rs 10 000. Importateurs, fabricants et commerçants sont régulièrement contrôlés par la police de l’Environnement. Sont interdits à la vente : les sacs en plastique avec manches, les sacs noirs avec ou sans manche, ainsi que les sacs non-biodégradables. Les sacs autorisés sont :

  • les rouleaux de sacs transparents pour les besoins alimentaires, dont les fruits et légumes, les produits réfrigérés, la charcuterie et autres produits frais
  • les sacs-poubelle
  • les sacs d’emballage scellés avant la vente sur le marché local
  • les sacs à des fins agricoles
  • les sacs utilisés pour l’échantillonnage
  • les sacs pour le marché de l’exportation
  • les pochettes transparentes ne dépassant pas 300 cm
  • les sacs transparents utilisés par les passagers en transit à l’aéroport
  • les sacs pouvant contenir des liquides, aérosols ou gels.

Trois questions au ministre de l’Environnement - Étienne Sinatambou : «Un pas en avant vers une économie verte»

Quel est votre constat un an et demi après l’entrée en vigueur des nouveaux règlements concernant les sacs en plastique ?
Déjà, je constate que les sacs plastique noirs, qui jadis enlaidissaient le paysage, ont disparu. Par ailleurs, à la suite de l’interdiction des sacs plastique fabriqués à base de produits pétroliers, un marché pour les sacs biodégradables, recyclables et compostables, s’est développé. Ces sacs sont fabriqués localement ou importés. Les fabricants ont compris la démarche du gouvernement et ont pris les actions nécessaires pour redynamiser le secteur. À ce jour, 22 millions de ce type de sacs ont été fabriqués à Maurice et quelque 8 millions importés.

Direz-vous que tous ont adopté la « Green attitude » ?
Les gros commerçants (supermarchés, grandes chaînes de magasins) s’y sont pliés dès la promulgation du règlement. Je les félicite pour leur engagement pour la cause environnementale. C’est un pas en avant pour faire de Maurice une économie verte, promouvoir l’innovation, la consommation et la production durable, ainsi que la création d’emplois. Malheureusement, ce n’est pas le cas du côté de la plupart des maraîchers, marchands ambulants et autres petits commerces. Je tiens à rappeler aux citoyens que c’est leur devoir de respecter les règlements et aussi de protéger l’environnement pour les générations futures.

Quid des sanctions à l’égard des contrevenants ?
À ce jour, 97 importateurs ont été appréhendés pour l’importation d’environ 540 000 sacs plastique prohibés. 403 000 de ces sacs ont été détruits à travers le recyclage et quelque 15 000 ont été réexportés. Il faut dire que la police de l’Environnement est active sur tous les fronts. Ainsi, environ 210 contrevenants ont été verbalisés pour la vente et la distribution illégales des sacs prohibés. Nous avons aussi enclenché 38 cas de poursuite judiciaire où 16 contrevenants ont déjà été trouvés coupables et ont dû payer une amende. Il faut rappeler que la peine maximale pour tout contrevenant aux nouveaux règlements est de Rs 10 000.

 

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