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Affaire des coffres-forts : le spectre d’une accusation formelle plane sur Navin Ramgoolam

Il a donné des directives : aucune célébration à sa sortie du tribunal. Navin Ramgoolam est loin d’être tiré d’affaire, bien que l’accusation provisoire de blanchiment d’argent logé contre lui ait été rayée. Le spectre d’une accusation formelle en cour intermédiaire plane sur l’ancien Premier ministre.

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La prudence est de mise pour le camp de Navin Ramgoolam, dans l’affaire dite des coffres-forts. L’heure n’est pas aux célébrations bien que l’ultime accusation provisoire dont faisait l’objet l’ancien Premier ministre ait été rayée par la magistrate Meenakshi Bhogun, siégeant au tribunal de Curepipe.

D’ailleurs, dès son arrivée dans la salle d’audience, Navin Ramgoolam, leader du Parti travailliste (PTr) a échangé quelques mots avec Patrick Assirvaden. Ce dernier a bondi de son banc pour se rendre à l’extérieur de la salle d’audience où il a mis en garde les partisans contre toute manifestation de joie excessive, avant de reprendre place aux côtés de son leader.

Accusation provisoire justifiée

La magistrate Meenakshi Bhogun n’a pas lu son ruling de treize pages dans son intégralité, mais elle en a évoqué les points saillants. Elle a notamment fait ressortir que, contrairement à ce qu’avait dit la poursuite, le tribunal a la compétence de rayer une accusation provisoire.

Selon la magistrate, il est du devoir du tribunal de veiller à ce que l’imposition d’une accusation provisoire soit justifiée.

De plus, la magistrate a conclu que Navin Ramgoolam est sous le coup d’une accusation provisoire depuis 29 mois et que cela constitue « un retard inexpliqué et injustifié ». Elle a ainsi rayé l’accusation provisoire de blanchiment retenue contre Navin Ramgoolam à la suite de la perquisition de son domicile et la saisie de ses coffres-forts contenant Rs 220 millions.

Toutefois, la magistrate Meenakshi Bhogun a précisé plus d’une fois que le Directeur des poursuites publiques (DPP) peut à tout moment loger une accusation formelle contre Navin Ramgoolam, s’il le souhaite.

Rs 220 millions

Une information qu’est venu confirmer le titulaire à ce poste, Me Satyajit Boolell, Senior Counsel. Ce dernier a indiqué que l’ancien Premier ministre et leader du PTr sera effectivement poursuivi sous une accusation formelle de blanchiment d’argent en cour intermédiaire.

À sa sortie du tribunal, Navin Ramgoolam s’est refusé à tout commentaire, mais a laissé le soin à son avocat, Me Gavin Glover, de faire une déclaration à la presse. L’ancien Premier ministre était également défendu par Sir Hamid Moollan, Me Showkat Oozeer et Me Hisham Oozeer.

Plusieurs membres du PTr s’étaient rendus au tribunal de Curepipe pour soutenir leur leader : Patrick Assirvaden, Anil Bachoo, Stéphanie Anquetil, Cader Sayed Hossen, Devanand Rittoo, Lormus Bundhoo et Michael Sik Yuen. Le pandit Suryadeo Sungkur, qui avait obtenu un terrain sur la plage de Trou-aux-Biches, était aussi présent.

Navin Ramgoolam avait été arrêté le 6 février 2015. Une perquisition de sa maison à Riverwalk, Floréal avait débouché sur la saisie de deux coffres-forts et des sacs contenant une somme de Rs 220 millions.


Me Gavin Glover : «Nous restons vigilants»

Pour Me Gavin Glover, Senior Counsel et un des avocats de Navin Ramgoolam, cette décision du tribunal de Curepipe « n’est qu’une petite victoire ». Il précise que le Directeur des poursuites publiques a signifié son intention de loger une accusation formelle avant fin septembre 2017 contre son client. « Ce n’est qu’une accusation provisoire qui a été rayée. Nous savons très bien que le DPP a déjà informé qu’il allait déposer une accusation formelle avant la fin de septembre. Ce n’est qu’une petite bataille que nous avons gagnée aujourd’hui », souligne-t-il.

C’est pourquoi le Senior Counsel dit rester vigilant, car la possibilité que Navin Ramgoolam fasse l’objet d’un « main case » existe toujours.

L’avocat a néanmoins exprimé sa satisfaction quant au dénouement de cette affaire : « La magistrate a retenu les arguments mis en avant par la défense. Ce ruling servira à protéger d’autres Mauriciens contre l’utilisation abusive des accusations provisoires ».


Accusation provisoire et accusation formelle, quelle différence ?

L’accusation provisoire est un mécanisme qui puise son origine de l’article 5 de l’Ordinance 23 de 1888. À l’époque, Maurice était une colonie britannique et un prévenu était présenté devant un magistrat après son arrestation. Le magistrat est alors informé des faits reprochés au prévenu et décide si ce dernier doit être libéré sous caution ou maintenu en détention. Cette pratique permet d’éviter une détention administrative en plaçant le prévenu sous le contrôle judiciaire. Le prévenu est ainsi tenu de se présenter à échéance régulière devant le magistrat jusqu’à ce que l’enquête policière soit complétée.

C’est le Directeur des poursuites publiques, en vertu des pouvoirs qu’il détient sous l’article 72 de la Constitution, qui décidera alors si le prévenu fera face à un procès au pénal. Si tel est le cas, une accusation formelle sera retenue contre le prévenu et l’acte d’accusation provisoire sera abandonné puisqu’elle n’a plus sa raison d’être. L’utilisation de l’accusation provisoire a souvent été critiquée à Maurice. Les opposants à cette pratique y voient un outil de répression et une restriction des libertés. D’autres qui la défendent, soutiennent que l’accusation provisoire sert justement à éviter la détention administrative des personnes en les plaçant sous contrôle judiciaire.

Que lui reprochait la police

Navin Ramgoolam est poursuivi pour avoir eu en sa possession de fortes sommes d’argent qui proviendraient de sources illicites. L’acte d’accusation provisoire se lit comme suit : « On 6th February 2015, being criminally, knowingly and unlawfully in possession of money which is in whole or in part directly or indirectly represent the proceeds of a crime, to wit, over four million rupees composed of Mauritian rupees and foreign currencies and another high amount of around Rs 200 millions rupees, suspected to be proceeds of corruption and bribe, found in two safes seized by the CCID, which had to be forced open, as access there was not available ».

 

 

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