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Affaires Bissessur, Laurette, Valayden, Sabapati…SST : une unité hautement controversée

Selon le commissaire de police Anil Kumar Dip, la SST est une équipe performante qui obtient des résultats.

La Special Striking Team (SST), placée sous l’autorité directe du commissaire de police, est sous le feu des projecteurs depuis sa création l’an dernier. Ses méthodes et certaines de ses arrestations sont vivement commentées et critiquées. 

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Le 3 août 2022, la Police Headquarters Special Striking Team (SST) est mise sur pied par le commissaire Anil Kumar Dip. À sa tête, l’assistant surintendant de police Ashik Jagai, un ancien pilier de l’Anti-Drug and Smuggling Unit. Son unité a pour mission de traquer les caïds de la drogue et de lutter contre le grand banditisme. Mais les « major operations » de cette équipe suscitent beaucoup d’interrogations. 

Nombre d’observateurs, dans l’espace public, font remarquer que la SST vise particulièrement les opposants au régime.  D’abord, Akil Bissessur, proche du Parti travailliste. Puis l’activiste Bruneau Laurette. Ensuite, l’avocat Rama Valayden, cofondateur de Linion Pep Morisien. La dernière arrestation polémique en date est celle de Vimen Sabapati, membre de la garde rapprochée de l’ancien Premier ministre Navin Ramgoolam.

Ce vendredi, Vimen Sabapati, interpellé le 3 mai à Port-Louis avec plus de 10 kg d’héroïne dans sa voiture, a saisi la Cour suprême. Dans un affidavit, il tire à boulets rouges sur Ashik Jagai et ses hommes, se disant victime d’une machination orchestrée pour le piéger avec de la drogue. Le Vacoassien de 39 ans revient aussi sur une perquisition à son domicile menée en avril 2021 par l’Adsu de Rose-Hill. « Rien d’incriminant n’avait été trouvé, mais on m’a fait comprendre que je devais donner du ‘protection money’ pour éviter ce type de perquisition ou que de la drogue soit plantée chez moi », déclare-t-il. 

Cet entraîneur de muay-thaï parle également de messages qu’il aurait reçus d’un policier de la SST. Selon lui, ce dernier l’aurait prévenu, il y a quelque temps, qu’il était devenu une cible en raison de sa proximité avec Navin Ramgoolam. Vimen Sabapati, qui a déposé une clé USB avec son affidavit, demande à la Cour suprême d’ordonner au commissaire de police de dessaisir la SST de l’enquête portant sur la suspicion de trafic de drogue pour laquelle il est provisoirement inculpé.

Quatre jours plus tôt, devant la New Court House, la SST a essuyé un revers. Le 19 mai, l’unité avait arrêté Rama Valayden pour avoir évoqué, sur Radio Plus, la possibilité d’un « drug planting » dans l’affaire Sabapati. L’avocat a été inculpé de « conspiracy to pervert the course of justice ». Le Directeur des poursuites publiques (DPP) a réclamé et obtenu que cette accusation provisoire soit annulée. Par l’intermédiaire de son représentant, Rashid Ahmine a aussi recommandé au commissaire de police « de ne pas avoir recours systématiquement à des charges provisoires et de solliciter au préalable l’avis juridique du bureau du DPP. » 

À sa sortie du tribunal de Port-Louis, Rama Valayden n’a pas mâché ses mots à l’égard de la SST : « Dimoun bizin konpran ki travay malprop Striking Team pe fer dan nou pei. Personn pa pou kav anpes mwa kontinie denons zot. Zordi li enn viktwar pou la demokrasi. »

« Nou dan enn leta polisie »

Vendredi soir, Me Antoine Domingue, Senior Counsel, intervenant dans l’émission « Au cœur de l’info » sur Radio Plus, a salué l’initiative du DPP de demander à mettre un frein à la tendance de la police de déposer des accusations provisoires pour « perverting the course of justice ». « Avec cette façon de faire, on n’est plus en mesure de donner notre opinion librement. (…) Maintenant, le Premier ministre vient dire qu’il va en parler [de cette affaire] avec le CP. Ou pa fini tir ou konklizion. Nou dan enn leta polisie, se tou ! » a-t-il déploré. Par ailleurs, cet ancien président du Bar Council a souligné que la SST ne peut pas à la fois porter plainte, procéder à des arrestations et mener l’enquête, tout cela avec la bénédiction du commissaire de police. 

En novembre 2022, c’est Bruneau Laurette qui avait été arrêté par la SST. Les policiers ont saisi 42 kg de haschisch dans le coffre de sa voiture à son domicile de Saint-Pierre. Libéré sous caution après trois mois passés en détention préventive, l’activiste social et politique a toujours clamé son innocence. Il continue de pointer un doigt accusateur en direction de l’équipe d’Ashik Jagai, l’accusant de l’avoir piégé avec la complicité d’autres protagonistes.

La première arrestation de la SST à avoir défrayé la chronique avait été celle de l’avocat Akil Bissessur, le 19 août 2022. La toute nouvelle unité de police a débarqué chez sa compagne, Doomila Moheeputh, à Palma, pour une perquisition qui a débouché sur la saisie de 53 g de drogue synthétique. Le couple est resté plusieurs semaines derrière les barreaux. Finalement, le 28 mars dernier, l’accusation provisoire de trafic de drogue pesant sur Akil Bissessur a été rayée. L’homme de loi se dit lui aussi victime de la SST. « Je maintiens haut et fort que de la drogue a été ‘planted’ chez ma compagne dans le but de me piéger », a-t-il encore affirmé récemment. 

Un haut gradé des Casernes centrales : « SST pann aret okenn depite lopozision »

Face aux pluies de critiques qui s’abattent sur la Special Striking Team, un haut gradé des Casernes centrales répond que l’unité d’Ashik Jagai fait seulement son travail. « SST pann aret okenn depite lopozision. Si SST ti aret enn depite lopozision, ou kapav dir ki li pe aret opozan pouvwar. Me SST pe aret trafikan ladrog ki servi politik pou kasiet zot pese », soutient-il. 

Ce policier met ainsi en garde contre ceux qui, selon lui, veulent freiner le combat contre le trafic de drogue : « Nou dir dimoun kontinie denons bann trafikan, avoy let biro komiser, lanket pou fer. Kontinie fer lapolis konfians e kan laverite pou trionfe zot ava trouve. Pa ekout bann dimoun pe kasiet derier politik pou fer trafik ladrog. Partou zot pe fer konplo. Enn bouncer pa enn lopozision li ! » insiste-t-il.

Le commissaire de police Anil Kumar Dip avait, en octobre 2022, après la saisie à Rivière-Noire d’une importante cargaison de cannabis soupçonnée de provenir de la Réunion, salué les efforts de la SST. « Lekip ki monn mete, li enn lekip serye, li enn lekip ki pe amenn rezilta. Nou pena personn lor nou ‘hit list’. Si ou fer enn infraksion ou pou bizin pare pou pey bann konsekans. Se enn warning ki mo pe avoye », avait-il déclaré.

Ces autres saisies notables effectuées par la SST

15 août 2022. Peu après sa création, la SST a interpellé un habitant de Bambous sur l’aire de stationnement du stade Germain-Comarmond. Ce quinquagénaire avait sur lui 377 grammes d’héroïne, d’une valeur marchande estimée à Rs 5,5 millions. Le suspect était dans le collimateur des équipes de lutte antidrogue depuis un bon moment.

Lundi 3 octobre 2022. Lors d’une opération au Morne, trois véhicules sont interceptés. Les membres de la SST trouvent 58 kg de cannabis. Sept suspects sont arrêtés sur les lieux. La valeur marchande de la drogue est estimée à Rs 90 millions.

 

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