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Aliments trop sucrés, trop salés, présence d’additifs…Mécanisme de contrôle : un arrière-goût d’inachevé

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Trop sucré, trop salé, trop d’additifs… Une récente enquête du magazine français « 60 millions de consommateurs » lève le voile sur la composition de certains aliments que l’on retrouve également à Maurice. Quel mécanisme de contrôle ? Tour d’horizon.

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Le Dr Sameer Edun, médecin généraliste.

Frosties, les Trésor de Kellogg’s, biscuits Choco pépites de Milka, Granola de Lu, Kinder Délice, Lulu l’Ourson… Autant de produits importés qu’on retrouve sur les étagères des supermarchés à Maurice. Leur point commun : ils contiennent tous une forte teneur en sucre, pour certains un taux élevé d’acides gras et de sel, et de nombreux additifs, soit neuf dans le cas de Lulu l’Ourson, selon une récente enquête publiée par le magazine « 60 millions de consommateurs » dans son édition d’octobre. 

Alors que Maurice compte une forte prévalence de maladies non-transmissibles comme le diabète et l’hypertension, la question se pose : les produits importés sont-ils suffisamment contrôlés ? Les avis sont mitigés.

Jayen Chellum, secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM), rappelle le contrôle fiscal sur les aliments et boissons à forte teneur en sucre. « Sous le présent gouvernement, l’entrée de sucre dans la préparation du produit est taxée. Cette mesure de contrôle a été introduite dans l’intention de décourager la consommation de sucre, surtout avec la grande prévalence du diabète au sein de la population », explique-t-il.   

Contrôle de qualité inexistant

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Yovanee Veerapen, diététicienne et consultante en nutrition.

Sauf qu’il met en doute son efficacité. « J’ai toujours déploré l’entrée en vigueur de cette mesure en raison de l’absence d’étude sur l’impact de la taxe du sucre sur la qualité de l’alimentation ». Dans la foulée, Jayen Chellum fait remarquer que le quantum sur cette taxe ne cesse d’augmenter. « Finalement, c’est l’argent qui prévaut sur la santé, considérant que la somme récoltée en termes de taxe l’année dernière s’élève à Rs 800 millions. »

Ainsi, pour le secrétaire général de l’ACIM, l’accent n’est pas suffisamment mis sur la qualité. « Nous mettons l’accent sur un contrôle fiscal au lieu d’un contrôle de qualité permettant d’empêcher l’importation de certains produits avec un taux d’additifs ou une teneur en sucre inacceptables », déplore-t-il.

Le Dr Sameer Edun, médecin généraliste, abonde dans le même sens. « Au niveau des autorités, il n’y a aucun protocole établi pour filtrer le contenu nutritionnel des produits importés. Les produits innombrables aux annonces mensongères dans les rayons des supermarchés en témoignent. Et malheureusement, les Mauriciens succombent à ces informations erronées », regrette-t-il. D’ailleurs, le médecin tire la sonnette d’alarme sur le rajeunissement des maladies comme le cancer, le diabète et l’hypertension, lié à une alimentation pas suffisamment équilibrée. 

Responsabilité individuelle

De son côté, la diététicienne et consultante en nutrition Yovanee Veerapen fait observer que le contrôle au niveau des valeurs nutritionnelles des produits – et les effets de leur consommation sur la santé – relève de la responsabilité individuelle. « Concernant les produits importés disponibles sur le marché, on ne peut blâmer un produit spécifique ayant une forte teneur en sucre ou contenant de nombreux additifs. Il est de la responsabilité de chaque individu de faire attention à ce qu’il consomme », fait-elle valoir. 

Pour la diététicienne, du moment qu’un produit est sur le marché, il est prêt à être consommé. Toutefois, Maurice ayant une grande prévalence de maladies non-transmissibles, elle recommande d’être vigilant quant au choix des produits et de revoir notre façon de consommer. 

« Souvent, on cherche des produits commodes. Cependant, ce n’est pas forcément ce qui est meilleur pour notre santé », met-elle en garde. Pour renforcer le contrôle alimentaire, Yovanee Veerapen encourage la promotion de l’éducation nutritionnelle à Maurice. « Il y a une volonté de la part des Mauriciens de s’alimenter sainement, mais il y a un certain manque de connaissances de base au niveau nutritionnel et c’est un frein à un changement concret », constate-t-elle. 

Bien choisir ses produits 

Selon le Dr Sameer Edun, quelques points importants sont à garder en tête lors de l’achat des produits alimentaires. « Premièrement, il ne faut jamais se fier uniquement à l’emballage des produits, car l’annonce est souvent trompeuse. » 

Les patients diabétiques doivent particulièrement faire attention aux produits aux prix exorbitants annoncés comme étant sans sucre, dit-il. « Faites vos propres recherches sur le contenu nutritionnel sur le dos de l’emballage, notamment sur la teneur en sucre de l’aliment. Idem pour les patients souffrant de maladies cardiovasculaires pour le sel, ceux souffrant de problèmes gastriques pour les produits épicés », recommande-t-il. 

Il est également conseillé de faire des recherches sur des options plus saines. Parmi ces options, on retrouve les produits naturels, souligne, pour sa part, Yovanee Veerapen. « Se rapprocher des produits naturels facilite et encourage une alimentation plus saine et nourrissante. Indirectement, ce choix permet de mieux gérer les achats ainsi que la consommation des produits ultra transformés », fait ressortir la diététicienne et consultante en nutrition. 

Yusuf Sambon, importateur et propriétaire du supermarché Lolo : «Les autorités assurent elles-mêmes le filtrage»

Quelles sont les procédures à respecter au niveau des importateurs ? 
« Pour les produits sucrés, on est taxé selon le grammage », répond Yusuf Sambon, directeur de l’hypermarché LOLO et importateur de produits alimentaires.

Les importateurs, explique-t-il, sont appelés à présenter des certificats phytosanitaires au bureau sanitaire ainsi qu’un échantillon provenant de l’usine des fabricants au Mauritius Standards Bureau. « Les autorités détermineront, en fonction de la loi de réglementation de vente et de consommation, si le produit est approprié pour le marché mauricien », dit-il. 

Une fois les procédures d’importation complétées, Yusuf Sambon avance que les supermarchés sont quasiment libérés de la majorité des formalités ayant trait au mécanisme de contrôle. 

« En tant que propriétaires de supermarché, nous avons confiance en le jugement des autorités qui ont elles-mêmes assuré le filtrage quant aux normes à respecter au niveau nutritionnel, de la qualité et sanitaire, entre autres, de l’importation à la douane pour atterrir dans nos rayons. »

Ainsi, fait-il comprendre, « à partir de là, nous faisons le contrôle uniquement au niveau du poids et de la date de péremption ».

Au ministère : un « effort » est fait sur les additifs

Yousuf Gaungoo, du Public Health and Food Safety Inspectorate du ministère de la Santé, évoque l’existence de plusieurs mécanismes de contrôle. La Food Import Unit, basée au port, s’assure notamment « du respect des normes et standards des Food Regulations des produits entrants. C’est la même procédure pour l’unité présente à l’aéroport Sir Seewoosagur Ramgoolam, à Plaisance », indique-t-il. 

Quid des produits contenant une forte teneur en sucre ? Yousuf Gaungoo parle d’une taxation plutôt que d’une réglementation. Toutefois, un effort est fait sur les additifs. « Des standards sont fixés dans le Food Regulation Act. À titre d’exemple, certains additifs sont permis, mais dépendant de la quantité présente et pour certains aliments spécifiques. » 

À quand un plan national de nutrition ?

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Jayen Chellum, secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM).

Le contrôle fiscal sur les produits sucrés est-il efficace ? Pour en déterminer l’impact sur la consommation, Jayen Chellum préconise une étude. 
« Une partie de l’argent récolté à partir du contrôle fiscal aurait pu être utilisée à bon escient à travers le Consolidated Fund, notamment pour une étude ou une campagne de sensibilisation sur la prévalence du diabète et les aliments à éviter ou dont il faut limiter la consommation », avance le secrétaire général de l’ACIM. Il souhaite également une sensibilisation auprès des enfants dès le plus jeune âge quant aux produits sucrés. 

Et ce n’est pas tout. Jayen Chellum plaide pour un plan national de nutrition. « Il y a un flou. Est-ce que le gouvernement a un plan national de nutrition ? Nous rapprochons-nous vers ce plan ? Quelles sont les stratégies ? »

Il cite la consommation de sel, qui fait partie des facteurs aggravants des maladies cardiovasculaires, notamment. 

« Selon une étude de l’Organisation mondiale de la santé, les maladies cardiovasculaires bouffent une grosse partie du budget national de la santé des pays industriels », fait-il remarquer. 

Dans le cadre de l’effort pour réduire la prévalence des maladies non-transmissibles à Maurice, qui serait ainsi synonyme d’une réduction du budget national destiné aux soins pour ces pathologies, « un plan national d’alimentation est primordial afin d’établir une stratégie alimentaire pour éviter une population malade », martèle le secrétaire général de l’ACIM. 

« Grace à cette stratégie alimentaire, le gouvernement pourrait s’orienter vers une approche holistique dans l’achat de produits plus sains », fait-il comprendre.

 

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