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Antoine Tse Sun Lin : un centenaire qui aime la danse

Josette Koon nous a aidés à parler avec Antoine Tse Sun Lin, qui est dur d’oreille.
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Antoine Tse Sun Lin a le sourire facile. Il a sans doute fait tomber les filles dans sa jeunesse. Puis, il s’est assagi pour devenir commerçant afin de nourrir sa tribu. Il va fêter ses 100 ans, le 3 avril. Il dit espérer vivre encore quelques années, car il en a les moyens physiquement.

Quel bonhomme ! Vêtu d’un polo-shirt blanc et d’un pantalon bleu ciel, Antoine Tse Sun Lin nous attendait. Il a le sourire chaleureux et à sa démarche, on ne lui donne pas son âge. Le seul bémol, qu’il refuse de porter une oreillette pour nous entendre. C’est une question de fierté.

J’ai voulu venir vivre au Bergonia Garden. Je suis bien traité, je mange de tout »

Il a insisté pour vivre dans ce home qu’il appelle « couvent ». La raison est qu’il ne voulait pas que ses filles s’occupent de lui, alors qu’elles ont un commerce à faire tourner. « J’ai voulu venir vivre au Bergonia Garden. Je suis bien traité, je mange de tout », explique-t-il.

Puis, il a toujours été indépendant dans la vie. Pas question qu’on lui dise : « papa, va te reposer, on va prendre le relais à la boutique ». « Il a tenu, jusqu’à l’âge de 95 ans, à servir les clients et à s’occuper de son commerce », relate Françoise, sa fille aînée.

Il a tenu, jusqu’à l’âge de 95 ans, à servir les clients et à s’occuper de son commerce»

Il était bon de papoter avec lui à travers la directrice Josette Koon, qui lui posait nos questions à l’oreille. Elle criait souvent pour qu’il entende. Et lui souriait en répondant. Les souvenirs lui viennent par moments. Ce qui le ravissait et le ramenait à sa jeunesse qu’il a mordue à pleines dents, selon son entourage. Et lui, il n’en est pas peu fier et sourit.

Regard de Clint Eastwood

Son regard est frappant. Touchant même. Mais il sait qu’il est en spectacle devant un journaliste. Il ne fait pas l’acteur. Il nous rappelle Clint Eastwood. Il y a une osmose entre la directrice et lui. Mais surtout du respect.

Il a travaillé très dur et a fait crédit à ses clients. Il comprenait la souffrance des gens»

Cet homme a tout perdu le 1er janvier 1975, quand sa boutique a pris feu. Mais il a rebondi pour ouvrir une boutique au coin des rues Madame et Labourdonnais, à Port-Louis. « Il a travaillé très dur et a fait crédit à ses clients. Il comprenait la souffrance des gens », dit Françoise.

Quand on rencontre une telle personne, on se demande pourquoi il y a autant d’indifférence, autant de laissés pour compte dans le monde. 

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Photo de famille avant le décès de Li Chun, la mère.

Josette Koon : une mère pour ses patients

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Josette Koon est aux petits soins pour ses résidents.

Elle est aux petits soins pour ses résidents. Josette Koon, épouse de Philippe, ex-propriétaire d’écurie, a décidé de transformer son immense bâtisse en un home. Il y a actuellement 24 pensionnaires. « On a construit cette énorme maison pour les enfants, qui ont tous émigré. Alors, je me suis dit que je n’allais pas rester là à poireauter avec mon mari. On a alors décidé de créer Begonia Garden », explique-t-elle.

« Les résidents ont droit à un petit-déjeuner : oatmeal, cornflakes, sandwich, confiture, banane, beurre pistache et fromage. Après le petit-déjeuner, on les fait marcher dans la cour et on change les couches. À 11 h 30, c’est le déjeuner, un dessert, du yaourt, puis c’est la sieste. À 14 h 30, c’est le thé, du pudding de maïs, des biscuits. À 17 h 30, c’est le dîner. »

Begonia Garden emploie dix-huit assistantes-spécialistes. 

Au menu du déjeuner, ce jeudi-là : calebasses, songes, curry de dholl, curry de foie, salade de poisson et riz blanc.

Une vie remplie

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Those were the days…

Il a vécu sa vie à sa façon. Il aimait faire la fête à son jeune âge et adorait danser. Mais, quand il s’est calmé, il a fait des petits à sa femme et a ouvert un commerce. Il nous raconte son parcours.

Comment étiez-vous dans la vie en tant que jeune homme ?
Mo ti enn zoli garson. Ah, ah, ah. Mo finn ne Moris, monn al la Sinn pou apran, mo ti ena 8 ans, me monn bizin retourne a laz de 15 ans akoz lager ek Zapon.

À votre retour, avez-vous repris le collège ?
Non, mo ti gayn onte pou retourn lekol.

Combien de frères et sœurs avez-vous ?
On était trois frères et trois sœurs. Ils sont tous morts. J’étais le 3e fils.

À quel âge vous êtes-vous marié ?
J’avais 30 ans et j’ai eu six enfants, trois filles et trois garçons. Ainsi que huit petits-enfants et deux arrière-petits-enfants. Je suis un homme heureux. J’ai accompli mes devoirs envers eux.

Quand vous étiez jeune, comment était votre vie ?
J’aimais danser, faire la fête. La danse, je l’apprenais en payant des cours. La rumba, le cha-cha-cha, le one-step, le tango, le twist, le classique, le slow. Bref, de tout. Sauf le séga.

Les filles vous couraient sans doute autour…
Il est vrai que j’étais beau gosse. Je m’amusais et je me suis calmé quand je me suis marié à 30 ans. 

Vous avez été commerçant, puis boutiquier…
Ma boutique a pris feu, le 1er janvier 1975. J’ai tout perdu et j’ai recommencé à zéro à la rue Labourdonnais. Je l’ai fait pour ma famille et mes enfants. J’ai travaillé jusqu’à mes 95 ans.

Êtes-vous satisfait du parcours de vos enfants ?
Mes fils ont étudié et occupent de grands postes. Mais, bann tifi pa ti oule apran, zot ti pans mariaz. J’ai un fils qui est interprète, un autre banquier. Ils sont au Canada et en Grande-Bretagne. Mes filles sont dans le commerce.

Vous aurez, dans quelques jours, 100 ans. Quelle est votre recette ?
Je fais de l’exercice tous les jours depuis 70 ans. Je ne fume pas et je ne bois pas. Mais j’aimais danser les samedis. Il y avait des bals à La Chaussée et à l’hôtel National, près du Champ de Mars. Mo ti kontan life et je n’avais aucune intention de me marier. J’ai fait la guerre et j’étais posté en Égypte. Puis, j’ai rencontré mon épouse Li Chun, qui était protestante.

On dit de vous que vous croquiez la vie, mais que vous étiez sérieux avec vos enfants, alors que votre épouse était souffrante…
Je ne me souviens plus, mais j’ai été un papa tout court, avec ses joies et ses peines.

Et comment se passe votre séjour dans ce home, loin de la famille ?
Je suis heureux, je me débrouille et quand je ne peux pas, les filles m’aident et aussi Josette, qui a une attention spéciale pour les résidents. Mes enfants viennent me voir et on va faire la fête pour mes 100 ans dans un restaurant, le 3 avril.

Une famille unie

Solidarité. C’est le maître-mot des enfants d’Antoine Tse Sun Lin. Françoise est l’aînée, suivi de Jean-Pierre, qui est au Canada, puis Gabrielle, Carla, Éric et Laval. Jean-Pierre et Laval ne pourront être de la fête, le 3 avril, pris par leurs occupations professionnelles.

Carla nous raconte que leur père voulait qu’on organise, après le dîner, une soirée dansante, mais la demande a été rejetée. « Il aime le foot, les douceurs, le Coca-Cola. Puis, quand nous étions à la boutique, il allait chercher du pain, des gato piman. Il lavait lui-même ses vêtements, préparait le thé. Il a été un très bon père », dit Carla.

Megalingum Veerasamy a fêté ses 99 ans 

verasamy

Megalingum Veerasamy a eu 99 ans, mercredi. Il a deux fils, une fille et sept petits-enfants. Sa femme Panjalay est décédée. « J’ai travaillé comme clerk au port, à Albion Docks. Je suis végétarien, les vendredis. J’ai un fils qui travaille au ministère de la Sécurité sociale, l’autre est Principal Assistant Secretary et ma fille est maîtresse d’école. J’habite avec ma fille à Belle-Étoile, mais chaque fois qu’elle va au Canada voir ses enfants, elle me place ici. Je suis bien ici, je prie beaucoup », relate-t-il. 


172 centenaires à Maurice et Rodrigues

Le pays comptait 25 centenaires masculins et 139 féminins, soit un total de 164. Rodrigues a deux centenaires hommes et six femmes, soit un total de huit. Finalement, la république de Maurice a 172 centenaires. Sans compter Antoine Tse Sun Lin, qui viendra s’ajouter à cette liste le 3 avril.

 

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