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Cassam Uteem : «La démocratie a connu un recul extraordinaire»

Un état des lieux de la démocratie à Maurice a été dressé lors de l'émission "Au Cœur de l’Info" sur Radio Plus ce vendredi 15 septembre. Nawaz Noorbux et Jugdish Joypaul ont reçu plusieurs invités, parmi lesquels l'ancien président de la République, Cassam Uteem, qui a intervenu par téléphone. Il s'est notamment attardé sur la « mainmise politique sur les institutions ». Selon lui, il existe une mentalité prévalente parmi la classe politique, qui estime que si quelqu'un remporte une élection, alors « tout revient au vainqueur ». Cependant, avec une telle mentalité, Cassam Uteem estime que la démocratie n'existe plus. « Car à ce moment-là, je place 'mo bann dimounn' au sein de toutes les institutions, même si elles ne disposent pas des qualifications, des compétences ou du mérite, car 'the winner takes all' », déplore-t-il. Une situation qui, selon lui, laisse à penser que les institutions sont sous le contrôle de l'État ou de certaines personnes de l'État.

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Ce qui entraînerait alors une perte de confiance de la population envers la classe politique et les institutions. « C'est d'ailleurs ce qui pourrait expliquer le phénomène de fuite des cerveaux auquel le pays est actuellement confronté. Bien qu'il y ait des offres d'emploi, des personnes sont réticentes à postuler, estimant que ce sera une perte de temps, car tout est joué d'avance. Il n'y a pas de justice, de fair-play, et la méritocratie n'existe plus. La démocratie a connu un recul extraordinaire », dit-il.

Sur le même sujet, Rookaya Kasenally, spécialiste en matière de démocratie, a mis en avant les résultats d'un sondage d'Afrobarometer sur la perception de la population par rapport aux institutions. « L'étude a démontré qu'il y a un 'total mistrust' dans les institutions. En d'autres termes, ces institutions ne parviennent pas à jouer le rôle de 'checks and balances'. Et lorsque l'on n'autorise pas les institutions à fonctionner de manière indépendante, elles deviennent des 'rubberstamps' pour les personnes au pouvoir, et cela est très grave », estime-t-elle, en ajoutant que ces institutions opèrent alors dans l'opacité.

Le Senior Counsel, Me Hervé Duval, estime pour sa part qu'il n'a jamais constaté autant d'impunité qu'aujourd'hui, notamment de la part des élus. « Je ne rencontre pas beaucoup de personnes qui me disent que les institutions fonctionnent bien, qu'elles se sentent protégées face au gouvernement, qu'elles ont confiance dans les institutions fondamentales du bon fonctionnement du pays, qui croient en l'indépendance de la police et que le gouvernement est redevable envers la population », avance l'avocat.

Quant à Jean-Luc Mootoosamy, journaliste, il a notamment commenté deux rapports contradictoires sur le statut de la démocratie à Maurice, l'un évoquant que Maurice serait une « full democracy » et l'autre estimant que le pays serait au bord de l'autocratie. « Nous souffrons de notre réputation. On dit que nous sommes premiers en Afrique [en matière de démocratie], mais quel est le point de référence lorsque l'on sait qu'il y a récemment eu un coup d'État dans un pays africain ? » demande-t-il. Selon lui, Maurice a encore du chemin à parcourir. « Il ne suffit pas de dire que nous sommes un pays démocratique, il faut aussi le démontrer », estime-t-il.

 

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