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Commission de lutte contre la criminalité financière - Kessen Ramalingum : « Un signal fort pour améliorer notre juridiction » 

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Le Budget 2021/22 contient des mesures fiscales et de facilitation qui démontrent une volonté de faire de Maurice une juridiction plus attractive pour les investisseurs. C’est l’avis de Kessen Ramalingum, directeur de JurisTax.

Le secteur des services financiers a été l’un des seuls à avoir enregistré une croissance positive en 2020. À quoi attribuez-vous cette croissance ?

Cela fait une quinzaine d’années que je travaille dans ce secteur. Je l'ai vu évoluer, acquérir de la résilience, de l'agilité et de l'adaptabilité à un environnement qui ne cesse de changer. Au départ, le centre financier dépendait beaucoup des investissements vers l’Inde. Quand les traités ont changé, nous avons su être proactifs. En effet, le secteur financier mauricien a su rendre son offre attrayante pour de nouveaux marchés. Nous avons alors entamé une diversification sur l’Europe d’abord et, par la suite, vers l’Afrique, car nous avions les ressources, le capital humain et l’infrastructure nécessaires pour le faire. La croissance du secteur des services financiers a été rendue possible, car, pendant le confinement à Maurice et à l’étranger, ce secteur s’est très vite adapté  à la ‘new normal’. Après l’annonce du confinement et la fermeture des frontières, nous avons tous, et ce dans tous les secteurs, très rapidement mis en place le travail à domicile et nous n’avons jamais vraiment eu de coupures. Vu notre clientèle, nous étions obligés de faire à ce que ce soit du « business as usual », car les fonds devaient continuer à tourner. Et c’est ce qui explique la croissance soutenue du secteur. 

Quelle est votre impression générale du Budget 2021/22?

II faut comprendre le contexte dans lequel le Budget a été préparé. Cette situation provoquée par la Covid-19 est inédite et n'aurait jamais pu être envisagée. Depuis son premier Budget de 2020/21, le ministre des Finances a dû préparer des mesures budgétaires dans un contexte difficile et avec peu de marge de manœuvre. Beaucoup de secteurs de l’économie sont en crise et il ne serait pas réaliste de prétendre pouvoir tacler tous les problèmes. Mais il était important d’arrêter l’hémorragie et de maintenir le moral et la confiance des opérateurs économiques et du peuple. Le Budget a mis en place des mesures à court terme pour booster l’économie et préparer la voie à des stratégies de réforme sur plus long terme. 

" Le secteur financier mauricien a su rendre son offre attrayante pour de nouveaux marchés "

Comment accueillez-vous les mesures annoncées dans le Budget pour le secteur des services financiers ? Et comment ces mesures permettront-elles au pays d’améliorer son statut de centre financier en tant que juridiction adhérant aux normes internationales les plus élevées ?

Le gouvernement met en place des mesures comme les dividendes payés par un non-résident à un autre non-résident qui ne sera plus taxables à Maurice. Un autre exemple avec la ‘tax holiday’, qui a été étendue de 5 à 10 ans et l’élimination du ‘Global Business Licence’ pour mettre en place un ‘Family Office’ à Maurice. Cela permet aux gestionnaires de patrimoine d’attirer davantage de familles à gérer leur fortune à partir de Maurice. Le Family Office est une structure très utilisée dans les pays avec un secteur financier très développé, comme le Luxembourg et la Suisse. Il permet de gérer les finances de toute une famille, en général fortunée. En sus, afin d’attirer les compétences nécessaires pour renforcer le secteur financier mauricien, la durée des permis de travail a été étendue de 3 à 10 ans et les permis de résidence de 10 à 20 ans.  

Au chapitre de la facilitation des affaires, le Budget a prévu des mesures d’encouragement pour le secteur financier. L’introduction d’un portail en ligne pour l’octroi de permis d’opération et l’abolition des ‘Trade Fees’ pour des détenteurs de licences d'opérateurs touristiques et de GBL, qui n’ont pas de bureaux à Maurice, contribuent à améliorer la facilité de faire des affaires. 

Kessen Ramalingum, directeur de JurisTax.
Kessen Ramalingum, directeur de JurisTax.

Depuis 2019, Maurice figure sur la liste grise du Groupe d’Action Financière et de l’Union européenne (GAFI), ce qui lui a valu de figurer sur la liste noire de l'UE et de l'OCDE/GAFI. Êtes-vous satisfait de l’assurance donnée par le ministre des Finances pour achever la mise en œuvre du plan d'action en vue d’une sortie rapide de la liste des juridictions sous surveillance accrue du GAFI ?

En tant que juridiction, nous nous sommes efforcés d’adhérer à toutes les recommandations de l'OCDE et du GAFI pour sortir de ces listes. Les nouvelles législations introduites récemment contribueront grandement à cet effort, car elles vont renforcer des mesures de surveillance, de réglementation et d'application de la loi conformément aux recommandations. Les autorités mauriciennes ainsi que tous les partenaires de l’industrie sont motivés pour conjuguer leurs efforts afin de sortir Maurice de ces listes.

Il a été annoncé que la Financial Crime Commission sera établie pour une gestion encore plus efficace de la lutte contre le crime financier. Une telle commission était-elle nécessaire ?

Le succès d’un secteur financier dépend du niveau de confiance des investisseurs dans la juridiction. Une surveillance étroite, une 
application stricte des règlements et des sanctions appropriées pour des fautes professionnelles contribuent grandement à renforcer la confiance dans le secteur. L'annonce budgétaire relative à la création d'une Commission de lutte contre la criminalité financière est un signal fort et démontre la volonté des autorités d'améliorer l'application de la loi. Nous attendons avec impatience la mise en place de la commission, de voir le rôle qu’elle va jouer et dans quelles mesures va-t-elle renforcer le cadre AML/CFT et la lutte contre la criminalité financière.

Quelle est votre prévision de la croissance du secteur financier pour cette année-ci ?

Avec la pandémie de la Covid-19 qui sévit toujours dans le monde, il y a beaucoup d'incertitudes sur la façon dont les différents secteurs de l'économie vont se comporter. Il faut garder à l'esprit que l'année dernière, le secteur financier a progressé de 1,1 % malgré la pandémie et le fait que notre juridiction soit toujours sur la liste grise du GAFI. Si tous les acteurs du secteur des services financiers continuent à travailler ensemble et contribuer à la croissance de ce secteur, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrons faire mieux que l’année dernière. 

" Quand les traités ont changé, nous avons su être proactifs. En effet, le secteur financier mauricien a su rendre son offre attrayante pour de nouveaux marchés "
 

 

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