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Corinne Stoutenbeek : sans frontières

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Après avoir travaillé pour l’ONG Médecins Sans Frontières à Amsterdam, la Mauricienne Corinne Stoutenbeek est de retour sur son île natale. Forte de plus de 20 années d’expérience à l’étranger, elle occupe depuis quelques mois le poste de « Project Manager » au sein du Groupe Rogers.

Présentez-vous. 

Je m’appelle Corinne Stoutenbeek. Je suis Mauricienne. Je suis mariée à un Hollandais et maman d’une petite fille. Ma carrière s’est déroulée à l’international et sur plusieurs continents, que ce soit au Cambodge pour le Centre culturel français, puis au Liberia, au Soudan, au Sri Lanka, au Zimbabwe et au Népal pour l’ONG Action Contre La Faim. J’ai ensuite travaillé en République centrafricaine, en République démocratique du Congo, au Tchad et à Amsterdam pour l’ONG Médecins Sans Frontières (MSF). Et depuis quelques mois, je suis Project Manager pour le Groupe Rogers.

Parlez-nous de votre parcours académique.

Après avoir grandi à Maurice et obtenu mon baccalauréat économique et social, j’ai eu la chance de partir à l’étranger pour poursuivre mes études universitaires. J’ai obtenu un master en communication à Paris avant de plonger dans l’humanitaire avec un master en affaires humanitaires à Dublin, Uppsala et New York. L’année 2003 a marqué un bref retour aux sources à Maurice chez DCDM où j’ai notamment travaillé sur des projets au Malawi. 

Parlez-nous de votre enfance à Maurice. 

J’ai passé une enfance joyeuse à Grand-Baie, proche de la mer dans un village chaleureux. J’en garde plein de bons souvenirs que je suis ravie de partager aujourd’hui avec mon époux hollandais et notre fille. C’est certain que mon enfance a déterminé mes choix universitaires et professionnels. 

Ma mère, très engagée dans l’éducation des plus démunis dans les années 1990, a monté une école pour les enfants défavorisés à Triolet. Un engagement qu’elle continue de porter aujourd’hui encore. Mon père, qui est Écossais, nous a toujours encouragées, mes deux sœurs et moi, à nous intéresser au monde, bien au-delà des frontières de Maurice.

J’ai eu la chance de grandir dans une famille élargie bienveillante et impliquée dans le développement économique et social de notre pays. Ces « role models » m’ont inspirée et ils continuent de m’inspirer dans ma quête de « justice sociale ». 

Qu’est-ce qui vous a poussée à quitter votre pays natal pour poursuivre vos études à Paris ? 

Baccalauréat en poche, j’avais envie de prendre le large et de découvrir de nouveaux horizons. Être étudiante à Paris est le cadeau d’une vie. C’est une ville tellement inspirante, du fait de sa beauté, de sa diversité et de son patrimoine culturel. Ayant grandi à Maurice dans un village du littoral, j’ai adoré l’énergie urbaine de cette ville. J’ai aussi aimé me sentir anonyme !  

Adolescente, vous souhaitiez faire quel métier ? 

Adolescente, je voulais devenir « grand reporter » pour mettre en lumière les conflits internationaux. J’ai finalement fait le choix de travailler sur le terrain humanitaire, qui me correspondait plus. C’est un métier en contact direct et en solidarité avec les communautés les plus vulnérables et résilientes. 

Ces sept dernières années, j’ai travaillé au siège de MSF à Amsterdam en tant que responsable du département communication opérationnelle et plaidoyer. Avec mon équipe très dynamique, nous avons mobilisé et alerté l’opinion publique et les dirigeants sur les crises humanitaires au Soudan, en Éthiopie, au Yémen, en Syrie, en Méditerranée, en Ukraine/Russie ou encore au Bangladesh. Un métier tout aussi fascinant qu’épuisant. 
 
Vous avez travaillé dans de nombreux pays différents. Pourriez-vous partager une expérience particulièrement marquante ?

Toutes ces expériences m’ont façonnée et ont fait de moi la femme que je suis aujourd’hui. J’ai vécu des moments très durs tels que le kidnapping d’un collègue et ami en Somalie. Mais je préfère retenir les moments touchants qui, aujourd’hui encore, m’inspirent. 

Au Congo notamment, j’ai travaillé avec une femme exceptionnelle qui était aide-soignante dans le centre de santé de MSF. Elle accompagnait les victimes de violences sexuelles dont elle avait été elle-même victime à plusieurs reprises lors des conflits violents du M23. Elle a porté et élevé le fils d’un de ses agresseurs avec une joie de vivre et une détermination extraordinaires. 
C’est ce genre de « femme courage » qui m’inspire, me motive et me donne foi en la vie. 

Un moment particulier dans votre carrière qui vous a fait réaliser que vous étiez sur la bonne voie, que vous faisiez exactement ce que vous étiez censée faire ?

Je suis arrivée au Liberia en décembre 2005 pour ce qui devait être une mission humanitaire de trois mois. Dès mon arrivée à Monrovia, en plein bouillonnement avec l’élection de la première présidente en Afrique, j’ai senti que j’étais là où je devais être. J’étais face à un pays traversant un changement politique majeur, avec des communautés encore marquées par des décennies de guerre intense, mais aussi un peuple débordant d’espoir. Finalement, je suis restée 15 mois au Liberia. C’était un baptême humanitaire certes du feu, mais tellement formateur. 

Après 23 ans passés à l’étranger, vous êtes maintenant de retour à Maurice. Pourquoi ?

Après des années chez MSF, bien que passionnée, j’étais épuisée. Mon époux et moi ressentions le besoin de ralentir le rythme effréné de nos carrières européennes. Nous avons pris la décision de nous installer à Maurice, attirés par la douceur de vie et la proximité de ma famille. 

Lorsque nous avons quitté les Pays-Bas, je n’avais pas de plan de carrière défini. Je souhaitais avant tout renouer avec mes racines et voir comment nous nous adapterions à cette nouvelle vie. À mon arrivée, j’ai ressenti un réel dynamisme dans la société et le milieu professionnel. J’ai compris qu’il y avait une ouverture pour des profils professionnels plutôt atypiques, comme le mien.

Quel conseil donneriez-vous à quelqu’un qui aspire à suivre un chemin similaire, en travaillant à l’international et en s’engageant pour des causes humanitaires et sociales ?

J’encourage vivement les jeunes à suivre un parcours international et humanitaire. C’est fascinant ! Se lancer dans l’humanitaire, c’est répondre à un appel exigeant. Il faut avoir une formation universitaire et des compétences précises. Mais encore, une grande empathie, une passion pour la solidarité internationale, l’envie d’aller à la rencontre d’autres cultures et un appétit pour la prise de risques (sans être une tête brûlée non plus). Allez-y, foncez, vous ne serez pas déçus !

Quelles sont vos passions ?

Je ne sais pas si j’ai une passion en tant que telle. J’aime les gens, les voyages, la mer, l’art surtout contemporain. Mes centres d’intérêt évoluent au gré des saisons (rires).

Et votre rêve ?

Je rêve d’une île Maurice verte où les forêts et les lagons sont protégés. Une île où les différentes communautés cohabitent en paix et où la prospérité ne creuse pas d’écart économique. J’espère que les jeunes et les moins jeunes continueront d’aspirer à une île Maurice meilleure ! 

Un message aux Mauriciens qui vous liront ce dimanche ?

J’aimerais faire un appel aux jeunes : soyez inspirés par votre île, respectez-la et soyez des acteurs actifs d’un développement socio-culturel, environnement et économique de notre beau pays !

Son passage à Médecins Sans Frontières 

Corinne
Au sein de l’ONG Médecins Sans Frontières, Corinne Stoutenbeek a œuvré dans plusieurs pays africains.

Ses collègues la décrivent comme « Sans Frontières », « hyper-énergique », « engagée » et « prête à repousser les limites ». Comment Corinne Stoutenbeek repousse-t-elle les limites pour atteindre un objectif ? « Après mon stage de Master au siège d’Action Contre la Faim (ACF) à Paris, j’ai compris les exigences et les opportunités du métier humanitaire », répond-elle. 
Ce stage, ajoute-t-elle, lui a donné envie de poursuivre une carrière dans ce domaine. « Je n’avais qu’une idée en tête : partir en mission sur le terrain », affirme-t-elle. Corinne Stoutenbeek nous apprend que sa première affectation a été au Liberia en tant que coordinatrice des ressources humaines, gérant le personnel local. De là, elle a enchaîné des missions. 
En rejoignant Médecins Sans Frontières (MSF), Corinne Stoutenbeek a gravi les échelons pour devenir coordinatrice de projet. Ce rôle consiste à gérer les activités d’urgence de l’ONG dans diverses régions comme la République centrafricaine (RCA), la DR Congo, le Soudan ou le Tchad. Ses responsabilités incluaient la gestion d’équipe, la gestion budgétaire et logistique, l’analyse contextuelle en prenant en compte les facteurs sécuritaires, économiques et sociaux ainsi que la supervision des programmes humanitaires. « C’était une expérience extrêmement enrichissante », confie-t-elle.

Après presque dix ans sur le terrain, Corinne Stoutenbeek explique qu’elle a souhaité se poser en Europe. « Je me suis alors jointe à l’équipe du siège de MSF à Amsterdam en tant que coordinatrice de l’unité de la communication opérationnelle et plaidoyer. » 
Ces expériences humanitaires ont été intenses et l’ont façonnée. « Je suis qui je suis aujourd’hui grâce à cela. J’ai eu la chance de travailler avec des collègues particulièrement inspirants. J’ai appris à sortir de ma zone de confort, à repousser mes propres limites pour servir une noble cause. » 
Elle souligne qu’il était impossible pour elle d’être insensible à l’injustice ou à la vulnérabilité des communautés qu’elle côtoyait au Soudan ou ailleurs. « J’ai été particulièrement sensible aux défis auxquels sont confrontées les femmes en situation de conflit. Elles portent tellement de choses sur leurs épaules avec une telle résilience. C’est une véritable source d’inspiration », dit-elle. 

 

 

 

 Son nouveau défi professionnel à Maurice

Depuis quelques mois, Corinne Stoutenbeek occupe les fonctions de « Project Manager » au sein du groupe Rogers. Pourquoi ce choix ?

« Lors de discussions avec le Groupe Rogers, j’ai été séduite par la qualité des échanges, et particulièrement par leur réelle volonté de développer Bel-Ombre d’une manière responsable, prenant en compte les considérations environnementales et sociétales », répond-elle. Corinne Stoutenbeek affirme qu’elle a souhaité participer au « projet ambitieux de faire de Bel-Ombre une référence en matière d’art de vivre tropical et durable ».

Elle se dit consciente du défi. « Mais nous devons absolument nous fixer de telles ambitions pour l’île Maurice de demain. » D’ailleurs, elle est persuadée qu’« avec l’engagement fort de Rogers, le soutien de [s]es collègues et des acteurs des secteurs public et privé, ainsi que des ONG, nous pourrons faire de grandes avancées à Bel-Ombre et pour Maurice ».

Elle se décrit comme une personne passionnée par les gens, animée par un sens du but et toujours en quête de justice sociale. Comment fait-elle pour contribuer à la réalisation de ces idéaux ? « Alors, c’est tout un programme ! » lance Corinne Stoutenbeek. 

Elle explique être animée par un fort idéal de justice sociale qu’elle essaie de vivre au quotidien. « Au travail, je suis à l’écoute de mes collègues. J’essaie de les soutenir dans leurs projets et surtout de veiller à ce que ‘no one is left behind’ dans les projets sociaux et environnementaux. » Cette « posture bienveillante », ajoute-t-elle, requiert également « de garder un sens critique dans ce qu’on fait, de nous remettre en question pour revoir et réajuster ce que nous faisons en fonction, si besoin ».

Elle entend mettre ses expériences passées et les compétences qu’elle a acquises au service de cette nouvelle mission professionnelle. « L’expérience que j’ai acquise au niveau international, notamment en comprenant le fonctionnement des organismes mondiaux, ainsi que le réseau que j’ai construit ces dernières années, seront utiles pour ma nouvelle mission. » Entourée, chez Rogers, « de personnes inspirantes », elle confie avoir hâte d’en apprendre davantage d’eux. 

Et comment entend-elle intégrer les valeurs de l’engagement, de la diversité ainsi que de la justice sociale qu’elle porte dans ses initiatives professionnelles ? « Je vis mes valeurs au quotidien chez Rogers. Ceux qui me connaissent et ceux que je viens tout juste de rencontrer, savent que je suis une femme entière. Je suis un ‘full package’, ‘what you see is what you get ! » dit-elle dans un éclat de rire.

 

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