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Espionnage numérique : ligne tendue entre vie privée et sécurité

Me Nawaz Dookhee, spécialiste en droit des technologies, médias et télécommunications. Navin Ramgoolam a parlé d’espionnage le 28 juillet lors d’un congrès à Mare-d’Albert. Me Ashok Radhakissoon, ancien président de l’IBA.

Lors du premier meeting de l’alliance PTr-MMM-PMSD à Mare-d’Albert, le vendredi 28 juillet, Navin Ramgoolam a évoqué l’« espionnage » à travers une technologie SMAC. Deux avocats abordent les limites de la loi en matière de surveillance des réseaux sociaux et le droit à la vie privée.

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Des mesures légales sont en préparation pour contester les « violations de la vie privée » présumées, a fait savoir Navin Ramgoolam. Lors du premier meeting de l’alliance PTr-MMM-PMSD à Mare-d’Albert, le vendredi 28 juillet, l’ancien Premier ministre a dénoncé l’espionnage à travers la technologie SMAC (Social Media, Mobile, Analytics and Cloud). Selon l’opposition, la surveillance des réseaux sociaux va à l’encontre des libertés individuelles et de la Constitution.

Justement, que dit la loi en matière de surveillance sur les réseaux sociaux ? « Il n’y a pas de loi régissant spécifiquement la surveillance des réseaux sociaux. L’internet reste libre, le droit à l’information étant un droit fondamental », répond l’avocat Nawaz Dookhee, spécialiste en droit des technologies, médias et télécommunications.

Cependant, précise-t-il, « en cas d’abus au moyen des réseaux sociaux, des sanctions s’appliquent ». L’homme de loi évoque aussi des exceptions en vertu de l’article 28 du Data Protection Act (DPA), notamment quand « des donnés personnelles peuvent être sujettes à examen dans le but de contrecarrer une fraude ou autre délit au moyen d’internet ».

Interceptions des communications

Qui peut intercepter des communications et quand ? Me Ashok Radhakissoon, ancien président de l’Independent Broadcasting Authority (IBA), explique que l’acte d’interception doit principalement cibler « le fonctionnement d’un ordinateur ». Cela peut comprendre surveiller, enregistrer ou obtenir des informations importantes sur le fonctionnement d’un ordinateur, y compris sa signification et sa raison d’être.

« Les articles 32 et 46 de la loi sur les technologies de l’information et de la communication (TIC) établissent le principe de ‘non-interférence’ ou encore l’interdiction de détenir des messages circulant dans un réseau. On ne peut également pas les enregistrer ou les écouter », indique Me Ashok Radhakissoon. 

Il ajoute que l’article 32 autorise cependant un opérateur public, comme Mauritius Telecom (MT) par exemple, ainsi que ses employés ou préposés à intercepter un message. Mais uniquement lorsqu’ils ont des raisons de croire que ces messages sont de nature « indécente, abusive, ou encore vont à l’encontre de la loi sur les TIC ». La sécurité de l’État, la sécurité publique ou l’ordre public sont d’autres raisons qui peuvent justifier l’interception.
Néanmoins, fait comprendre Me Nawaz Dookhee, de son côté, « la règle est que toute interception de donnée est illégale ». À l’exception du contrôle que peut exercer le régulateur dans des cas spécifiques. 

Procédure

Concernant la procédure, les deux avocats s’accordent à dire que la police et l’Independent Commission Against Corruption peuvent demander l’autorisation d’un juge des référés pour procéder à des interceptions et enregistrements des communications et messages dans le cadre d’une enquête pénale visant à rechercher des preuves. Selon Me Ashok Radhakissoon, l’opérateur public doit impérativement référer ces messages interceptés au régulateur, qui peut donner des directives par écrit à l’opérateur public. « Cette autorisation reste valide pendant une durée de 60 jours. La police peut demander, avec cette autorisation, à un opérateur public d’intercepter lesdites communications », fait ressortir l’ancien président de l’IBA.

Le piratage passible de 20 ans de prison

Le piratage des comptes de réseaux sociaux est réprimandé, selon les dispositions du Cybersecurity and Cybercrime Act 2021, qui est entré en vigueur le 10 décembre 2021. « Par faux profils, on entend une fausse représentation en ligne existante ou non-existante. Lorsqu’une personne, individuellement ou avec le concours d’autres personnes, utilise un faux profil pour causer du tort, elle commetun délit. Si elle est reconnue coupable, elle risque une amende d’un montant maximal de Rs 1 million et un maximum de 20 ans de prison », rappelle Me Ashok Radhakissoon.

Violation potentielle du droit à la vie privée : les implications

Si les allégations de Navin Ramgoolam s’avèrent, quelles en seraient les implications, notamment quant au respect de la vie privée ?
Me Nawaz Dookhee explique que cela constituerait une violation de l’article 3(c) de la Constitution ainsi que de l’article 22 du Code civil. « Tout citoyen mauricien a le droit à la protection de l’intimité de son domicile », indique-t-il. De même l’article 22 garantit le droit au respect de sa vie privée. « Même si le Code civil est plus ancien que la Constitution, c’est la Constitution qui a préséance. »

Qu’il s’agisse du droit à la vie sentimentale et familiale, du secret médical, du respect du domicile et de la vie privée, ou encore du droit à l’image, si des délits sont commis en utilisant un outil informatique, les dispositions du Code civil peuvent être utilisées pour demander des réparations, ajoute Me Ashok Radhakissoon. « Si cet espace est envahi injustement et illégalement et que cela cause préjudice à une personne, elle a le droit de chercher réparation. »

Selon lui, une interception illégale est passible d’une amende pouvant aller jusqu’à Rs 1 million et d’une peine d’emprisonnement de 10 ans. « Ce sont les peines maximales pour ce genre de délits », dit-il. 

SMAC et les défis liés à la sécurité

La Social Media, Mobile, Analytics and Cloud (SMAC) est un ensemble de technologies et de pratiques qui jouent un rôle essentiel dans le domaine numérique moderne. En combinant ces quatre composantes, les entreprises peuvent développer des stratégies numériques puissantes pour interagir avec leurs clients, améliorer leur efficacité opérationnelle, innover et rester compétitives sur le marché en constante évolution du numérique. Cependant, il est essentiel de considérer également les défis liés à la sécurité, à la confidentialité des données et à l’éthique dans l’utilisation de ces technologies pour assurer une utilisation responsable et bénéfique.

 

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