Interview

Koshik Reesaul, Commissaire de la NTA : «Il faut réorganiser notre système de transport public»

Koshik Reesaul

Le commissaire de la NTA s’explique sur les changements qu’il veut apporter dans le secteur du transport public, notamment pour les vans marron et la qualité des lignes desservies par les autobus.

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« À terme, la plupart des voitures pas aux normes seront décelées. (...) Tous ces tests contribueront à réduire le nombre d’accidents. »

Les propriétaires de vans bénéficient d’un sursis sur les autocollants à afficher sur leur véhicule. Pourquoi avoir cédé alors qu’il fallait y mettre bon ordre ?
Les opérateurs n’étaient pas d’accord avec les nouveaux règlements. Nous avons accordé un sursis durant lequel il n’y aurait pas contravention. Nous avons invité ces opérateurs à une table ronde, animée par le président de la NTA, pour étudier leur problème. Ils ont approuvé cette initiative visant à traquer les vans marron. Les propriétaires sont classés en trois catégories : vans pour écoliers, pour touristes et pour employés. Un van sans sticker qui embarque des passagers sera facilement repérable. Les opérateurs ont suggéré une réduction de la taille des autocollants. Ils devront soumettre leurs suggestions d’ici avril.

Les propriétaires de vans scolaires souhaitent opérer ailleurs après les heures de classe. Cette requête sera-t-elle acceptée ?
Il faut examiner cas par cas. Ceux qui véhiculent les écoliers le matin pourront transporter des employés le soir. Mais ceux qui véhiculent les touristes ne pourront travailler dans une autre catégorie. Les propriétaires de vans scolaires veulent entrer dans l’enceinte de l’aéroport pour usage personnel. Attention ! Il faudra peut-être y placer des inspecteurs à plein temps pour veiller qu’ils ne transportent pas de touristes au détriment des taxis et des tour-opérateurs.

Cette mesure vise à traquer les vans marron, qui survivent malgré tout, car le service de transport public laisse à désirer. Comment résoudrez-vous cette situation ?
Dans le passé, le transport public était adapté au niveau de développement du pays. Avec les développements tous azimuts (morcellements, routes), il faut de nouveaux autobus. Une étude de PwC India a conclu à la nécessité de réorganiser notre système de transport public. La section planification de la NTA examine déjà quelle route doit/peut être étendue. Surgit le problème du coût : toutes les requêtes du public ne peuvent être satisfaites, car cela concerne plutôt des opérateurs privés. Nous identifions les lieux/situations les plus propices, comme lors de la construction de nouvelles écoles.

L’introduction des Smart Cards pour payer le ticket de bus est-elle réalisable ?
Cela se fait déjà ailleurs. Il faut simplement adapter cette mesure à Maurice. Il y a un aspect technique (maîtrisable) et un aspect financier de la chose. Le transport gratuit pour les écoliers complique les choses. Il faut aussi veiller à ce qu’une personne n’utilise pas la carte d’une autre. Comment gérer les revenus ? L’argent ira-t-il à l’opérateur ou transitera-t-il par la NTA avant ? Autant de problèmes à résoudre...

Et quelle sera la place du Metro Express dans tout cela ?
Une fois le projet Metro Express concrétisé, qu’est-ce qui vous empêchera d’utiliser la même smart card ? On pourrait spécifier à quelle heure le voyage est gratuit, ou le tarif est réduit. Nous planchons aussi sur un projet permettant de régler ses déclarations à la NTA en ligne.

Après plusieurs mois d’opération des centres de fitness privés, quel bilan dressez-vous ?
Cela fonctionne très bien. Il faut désormais 20 minutes maximum pour examiner une voiture. Avec les appareils utilisés, impossible de se tromper. Tout est automatisé. Certains n’y sont pas encore habitués. Certains conservent les autocollants remis à la fin de l’examen au lieu de les coller sur le pare-brise. On me reproche souvent la présence de vieilles voitures sur nos routes. Ce sont simplement celles qui n’ont pas encore été aux centres de fitness. Même si les examens sont plus stricts, le taux d’échec reste inchangé. Désormais, les gens remettent leur voiture en état avant de passer leur fitness. Les petites fuites d’huile, problèmes de freins sont réglés au garage au préalable.

La privatisation a été en partie justifiée par le nombre d’accidents sur nos routes. Peut-on prouver que ces trois centres privés ont un impact à ce niveau ?
Aucune étude ne prouve ce fait… ou son contraire ! Les appareils des centres vérifient tout : freins, roues trop lisses, suspensions endommagées... À terme, la plupart des voitures pas aux normes seront décelées. Je reste convaincu que tous ces tests contribueront à réduire le nombre d’accidents.

La NTA a installé des caméras de surveillance dans ces centres. Pourquoi ?
Nous avons exigé des caméras sur tous les bassins où les tests sont effectués sur les voitures. Ces images sont conservées durant 28 jours. S’il y a des plaintes, nous pourrons vérifier si les procédures ont été respectées. Le centre de contrôle de la NTA est relié à tous les centres. Nous pouvons vérifier en direct les opérations. Si nous notons quelque chose de suspect, nous pouvons demander à l’un de nos officiers postés dans ces centres privés de vérifier. Des personnes surveillent ces écrans en permanence.

Plusieurs de vos services ont été décentralisés. Quelle est la prochaine étape ?
Nous avons décentralisé nos services à SGS (le centre de Forest Side) et à celui de Laventure. Nous attendons qu’Autocheck (à Plaine-Lauzun) soit prêt avec ses bâtiments pour en faire autant là-bas. Nous avons lancé un appel d’offres pour trouver un local à Bambous. Si nous trouvons un bâtiment, nous décentraliserons également nos services dans l’Ouest. Nous allons aussi signer un Memorandum of Understanding avec la municipalité de Curepipe pour obtenir un local situé dans le marché central. Nous y placerons des inspecteurs pour surveiller les taxis et vans marron. Si les lieux s’y prêtent, on pourrait étendre nos services pour inclure la possibilité d’effectuer des paiements sur place.

De nouveaux centres seront-ils inaugurés à l’avenir ?
Ça, c’est une question de politique. Je ne saurais vous dire. Avec la flotte de véhicules que compte le pays aujourd’hui, ces trois centres suffisent. S’il faut inaugurer d’autres centres, il faudra tenir compte, parallèlement, de l’augmentation du nombre de véhicules.

La fraude sur la puissance des moteurs a fait beaucoup de bruit durant un moment, mais depuis on n’en entend plus parler. Que s’est-il passé et quelles leçons la NTA en a-t-elle tirées ?
Tous les cas traités par la NTA ont été référés au Central Criminal Investigation Division. La police poursuit son enquête. Une partie de ces dossiers ont été adressés au bureau du Directeur des poursuites publiques. Nous décelons encore quelques cas, de temps à autre, que nous référons à la CID. C’est à la police de poursuivre les procédures ultérieures.

Vous avez signé un accord avec la Financial Intelligence Unit pour le partage des données. En quoi la NTA est-elle concernée par le blanchiment ?
Sur de nombreuses enquêtes, la FIU, la police ou la Mauritius Revenue Authority demandent l’accès à notre base de données (NDLR : sur les voitures et leurs propriétaires). Ils nous réclament des renseignements sur tel ou tel véhicule. S’ils accèdent à notre système, ils obtiendront les données en temps réel. En mode manuel, ils reçoivent des informations qui ne sont pas à jour. Le gouvernement veut mettre sur pied une Information Highway qui permettra à toutes les institutions de partager de telles informations vitales. C’est ce système que compte utiliser la NTA. Nous attendons l’approbation du ministère des TIC.

 

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