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La chute d’un empire : les dessous de l’implosion du groupe Saint Aubin

Saint Aubin La MCB demande la vente des avoirs du groupe, qui comprennent trois grands domaines, dans le but de récupérer Rs 792,4 millions.

Le groupe Saint Aubin est au bord de l’effondrement. La MCB demande la vente des avoirs du groupe, qui comprennent trois grands domaines, dans le but de récupérer Rs 792,4 millions. Les actionnaires du groupe familial jouent leur va-tout pour empêcher cette vente.

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Il faut sauver les meubles ! Ou plutôt un patrimoine familial estimé à Rs 3,1 milliards. Le groupe Saint Aubin se retrouve dans une situation où elle conteste en cour sa mise sous administration judiciaire sur une demande de la Mauritius Commercial Bank (MCB). Cette dernière lui réclame la somme de Rs Rs 792 415 448.62 et veut vendre les avoirs de la compagnie afin d’être remboursée.

Le 20 septembre, Mushtaq Oosman et Anjeev Hurry sont nommés Receivers and Managers de Saint Aubin Ltée. Les actionnaires de Saint Aubin, constitués de membres de la famille Guimbeau et menés par Eric Guimbeau, CEO et ex-député, objectent. Le 26 septembre, la cour leur accorde un « stay of execution ». À vendredi, aucune date n’avait été fixée pour l’audition.

Naufrage

L’histoire de ce naufrage date du début des années 2000. Dans un contexte où le sucre commence à aller mal avec la fin des accords préférentiels, les Guimbeau, gros propriétaires fonciers, se lancent dans une importante diversification de leurs activités. L’usine sucrière de Saint Aubin est transformée en distillerie ultramoderne. Le groupe Saint Aubin se lance dans la fabrication de rhum et ses rhums seront reconnus comme étant de très bonne qualité.

L’histoire de ce naufrage date du début des années 2000

Pour financer cette transformation, le groupe emprunte lourdement auprès de la MCB avec laquelle elle est en affaires depuis des décennies. Néanmoins, le projet ne décolle pas. Les dettes s’accumulent et il faut des investissements supplémentaires. Ensuite, d’autres pôles sont développés dans l’espoir de provoquer un revirement de la situation mais le succès n’est guère au rendez-vous.

Ces dernières années, le groupe n’a fait qu’accumuler des pertes. Pour l’année financière 2014, par exemple, Saint Aubin Ltée a accusé des pertes de Rs 163 144 330 et de Rs 139 099 529 en 2013. En 2012, les pertes étaient de Rs 196 496 348. L’année d’avant, les pertes étaient de Rs 120 441 545.

Restructuration

« En 2014, l’endettement total du groupe était de Rs 870 millions. Ses facilités bancaires ont été restructurées en emprunts en long terme de Rs 205 millions à La Digue Ltd et de Rs 665 millions à Les Pailles Ltée », peut-on lire dans l’affidavit déposé par la MCB à la Cour des faillites. La Digue Ltd et Les Pailles Ltée font partie des 15 filiales du groupe.

Si les dettes du groupe St Aubin sont redirigées vers ces deux dernières, c’est pour permettre au groupe de se désendetter et d’obtenir de nouveaux financements. Cette restructuration est accompagnée de certaines conditions. Parmi : le remboursement de la dette de Rs 870 millions au plus tard le 31 mars 2016 et le fait que le groupe se porte garant.

Toutefois, selon la MCB, « aucun paiement n’a été effectué par le groupe Saint Aubin et aucun plan de remboursement viable et crédible n’a été proposé ». Le 1er avril 2016, la MCB informe le groupe Saint Aubin qu’elle fera valoir ses droits pour récupérer les sécurités bancaires.

Offre d’achat

Toutefois la veille, Saint Aubin demande une injonction pour empêcher la MCB de procéder. Le 3 juin, Saint Aubin fait enlever l’injonction. Le même jour, La Digue Ltd et Les Pailles Ltée sont mises sous administration. Les avoirs de Les Pailles Ltée sont vendus. Un acheteur est trouvé pour un terrain de 227,15 arpents à Pailles appartenant à La Digue Ltd. Vincent Ah Chuen, « Managing Director » du groupe ABC est disposé à acheter le lot à Rs 80 millions seulement. Or, le 29 mai dernier, St Aubin objecte en cour et empêche le Receiver Manager Mushtaq Oosman de procéder.

La MCB décide alors de s’attaquer directement au groupe Saint Aubin. La banque lui reproche de n’avoir jamais respecté ses engagements. Selon la banque, « les opérations de Saint Aubin ne peuvent générer suffisamment de cash pour liquider son énorme dette ». Elle l’accuse d’être « de mauvaise foi », de n’avoir tenu que « de fausses promesses » et de « ne pas être digne de confiance ».

Les Receivers Managers sont autorisés à prendre possession de l’ensemble des avoirs du groupe et de ses subsidiaires et à les vendre pour rembourser la dette de la MCB. À partir de là, c’est l’avenir direct de plus d’un millier de travailleurs qui est directement touché.

Une nouvelle fois, les actionnaires du groupe contre-attaquent. Le 27 septembre, ils obtiennent un ordre de la cour pour bloquer la procédure. Ils soutiennent qu’ils n’ont pas été entendus avant la mise sous administration judiciaire et que les procédures n’ont pas été respectées.

Maintenant, c’est à la Cour suprême de décider qui des deux camps a raison. Sollicité pour des éclaircissements, Eric Guimbeau n’a pas souhaité réagir. Dans un communiqué émis début octobre, il affirme que « le groupe Saint Aubin is a growing business with lots of forthcoming opportunities ».


Cinq secteurs d’activités

Le groupe Saint Aubin s’articule autour de plusieurs « clusters » :

  • Agro (plantation de thé, sucre, diversification agricole)
  • Distillerie (plusieurs variétés de rhum, eau, thé glacé)
  • Tourisme et loisirs

Trois domaines :

  • Le Domaine des Aubineaux : Grand de plusieurs dizaines d’arpents, le domaine abrite une grande demeure coloniale construite en 1872. Gustave Guimbeau, armateur français qui s’est installé à Maurice et a fait fortune dans le sucre, achète la demeure de Louis de Rochecouste à la fin du XIXe siècle. La propriété fusionnera avec celle, juste à côté, que Louis de Rochecouste avait donnée en héritage à sa fille unique, Valentine. Celle-ci s’était mariée à Maxime Guimbeau, le fils de Gustave Guimbeau.
  • Le domaine de Bois Chéri : D’une superficie de plusieurs centaines d’arpents, le domaine a été acheté par les Guimbeau en 1958. La propriété abrite une usine qui produit du thé sous une marque très connue des Mauriciens, à savoir Bois Chéri. Actuellement, elle produit plus de la moitié du thé de Maurice. Le domaine est ouvert au public avec un musée qui raconte l’histoire de l’usine qui remonte à 1892 et un grand restaurant inaugure en décembre 2008.
  • Le Domaine de Saint Aubin : Ancienne usine sucrière entourée de plusieurs centaines d’arpents de terre, le domaine est dans l’escarcelle des Guimbeau depuis 1948 quand Jean-Baptiste Guimbeau devient actionnaire de la société avec Henri Pitot et son associé Gaillardon. L’usine sucrière a été transformée en distillerie et l’Auberge de Saint-Aubin, maison créole plus que centenaire, est devenue une chambre d’hôtes.
 

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