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Le métro léger refait surface

À un moment où notre pays traverse « une situation économique extrêmement difficile », selon les dires mêmes du nouveau ministre des Finances Pravind Jugnauth, le projet de métro léger, estimé à des dizaines de milliards de roupies, bien que cette somme ait été revue à la baisse, revient sur le tapis. Or, force est de constater qu’avec la construction de Heritage City et la décentralisation prévue de nombreuses activités économiques et professionnelles à Highlands, le métro léger deviendrait rapidement superflu. D’ailleurs, une des principales raisons avancées par le gouvernement pour justifier le projet Heritage City était justement la résolution, une fois pour toutes, du sempiternel problème de congestion routière dans la capitale. Sur cette problématique, en effet, on a longtemps tergiversé. Il constitue même un boulet que traînent tous les gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays depuis les années 90. Le projet métro léger, qui a été évoqué pour la première fois dans un programme gouvernemental en décembre 1995, a englouti des dizaines de millions de roupies dans de nombreux rapports et études commandités – Iberinsa, Jonathan Richmond, Halcrow Fox, Gopinath Menon, Singapore Co-operation Enterprise... Mais une question se pose : au-delà de sa particularité écologique avantageuse, ce mode alternatif de transport constitue-t-il le moyen le plus convenable et efficace pour résoudre le problème de l’embouteillage à Maurice ? Vu le rythme effréné auquel le développement des activités économiques et administratives s’est effectué à Port-Louis ces dernières décennies, alors qu’aucune étude préalable n’avait été menée pour déterminer la capacité d’aménagement dans un endroit si exigu et déjà saturé par des infrastructures industrielles de toutes sortes, la solution la plus crédible et intelligente demeure effectivement une décentralisation graduelle de la capitale. C’est ce que préconise d’ailleurs le programme gouvernemental de l’Alliance Lepep, dont les dirigeants avaient vilipendé le projet métro léger que Navin Ramgoolam était sur le point de finaliser. Le leader du PTr avait déjà obtenu une ligne de crédit conséquente de la Grande péninsule. Mais quelques mois avant les législatives de décembre 2014, alors que le slogan « Viré mam » se consolidait sur le terrain, Pravind Jugnauth s’est prévalu de la situation politique dans le pays pour écrire au Premier ministre Narendra Modi concernant ce projet d’envergure. Qu’est-ce qui a bien pu susciter ce brusque retournement de veste de la part du gouvernement Lepep ? Aujourd’hui, nous nous trouvons toujours à la case départ. Port-Louis suffoque. Et même s’il a été libéré des marchands ambulants, des bâtiments en hauteur continuent à sortir de terre comme des champignons. Mais est-ce que le projet métro léger est vraiment rentable et viable dans les conditions actuelles ? En 2001, Halcrow Fox avait estimé les investissements à plus de Rs 6 milliards et le prix du ticket simple sur le trajet complet Curepipe-Port-Louis à Rs 20. L’on est en droit de se demander si aujourd’hui, le jeu en vaut toujours la chandelle. Quid du prix du ticket ? Sera-t-il toujours compétitif, d’autant que les trains du métro offrent normalement des possibilités de places assises pour seulement une personne sur 4 ? Une situation qui risque fort de décourager la pratique recommandée par les consultants singapouriens de « park and ride ». En outre, pour que le métro léger soit un succès, toute une série d’autres mesures, non prévues dans le coût initial, sont  également préconisées : la restructuration des services d’autobus, la construction de nouvelles voies et infrastructures pour le transit des passagers... Ainsi, du montant qu’engloutira le projet métro léger, des bus lanes modernes pourraient être aménagées, non seulement sur l’axe Curepipe-Port-Louis, mais aussi sur tout le territoire. Et avec le processus simultané de décentralisation dans le cadre de la construction de Heritage City, le problème de congestion routière à Maurice serait alors chose du passé.
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