Société

Les enfants face aux dangers: quid de la responsabilité parentale ?

Le rôle des parents se résume souvent à assurer la sécurité de son enfant et en veillant à sa santé et à son éducation. Or, malgré tous les efforts qu’ils déploient, les enfants se retrouvent souvent exposés à des dangers… Depuis la journée mondiale des droits des enfants, le 20 novembre dernier, ces derniers sont au centre des débats. Toutefois, plusieurs faits divers font souvent mention des cas où les enfants se retrouvent dans des situations à risques et où la responsabilité parentale est remise en question. Dans les articles 5 et 19 de la Convention des droits de l’enfant, les responsabilités parentales sont clairement stipulées. Dans les cas d’accidents, graves ou pas, il est important de situer la responsabilité des parents, mais doit-on s’arrêter à la sécurité et à l’éducation ? Le Dr Pavi Ramhota, sociologue, affirme que nombreux sont les parents qui ont de plus en plus de mal à assurer leur rôle correctement. Selon notre interlocuteur, le cadre familial semble perdre ses valeurs. «Il semblerait que certains parents n’arrivent pas à assumer leur rôle comme il le faut. Ils ne sont pas les ‘responsables’ des accidents dont leurs enfants sont victimes, mais ils n’arrivent pas à gérer les choses correctement.  Mieux vaut prévenir que guérir.Toutefois, il est malheureux de constater que de nombreux parents n’adoptent pas cette mentalité avant-gardiste. Par ailleurs, avec la globalisation, plusieurs parents n’ont pas le temps nécessaire pour se consacrer aux enfants. Que ce soit à la maison ou lors d’une fête, les enfants sont pratiquement sans surveillance. Ils surfent sur Internet sans contrôle parental ou sont délaissés. On a tendance à imiter les pays occidentaux, à vouloir être trop indulgents. Il doit avoir une certaine liberté mais nous ne devons pas accorder aux enfants le droit de faire tout ce qu’ils veulent. Il est important de définir les limites dès le plus jeune âge. Un enfant a besoin d’être guidé», explique-t-il. Par ailleurs, notre interlocuteur affirme que les parents ainsi que les enfants ont besoin de formation. «La solution, c’est de travailler en équipe. Les parents ne doivent plus laisser les responsabilités aux crèches et aux écoles. Il est vrai que les parents n’ont pas été formés mais auparavant ils parvenaient tant bien que mal de veiller à ce que leurs enfants soient en sécurité. Ces derniers pouvaient passer leur temps loin de chez eux et revenir sains et saufs. Alors qu’aujourd’hui, la situation se détériore », lance le sociologue. Madhvi, 40 ans, nous livre son témoignage de détresse d’une voix émue. Elle nous confie qu’elle ne sait plus quoi faire pour améliorer sa situation familiale. Elle affirme qu’elle essaie tant bien que mal d’exercer ses devoirs parentaux mais les choses ne font que s’empirer. « Nous ne pouvons plus sortir en famille. À chaque fois, on se dispute devant tout le monde à cause de nos enfants, douze ans et sept ans respectivement. Ils sont tout le temps en train de courir pendant les dîners. Nous ne savons pas si nous devons passer notre temps à les surveiller ou si nous devons nous détendre. Il m’est déjà arrivé d’essayer de me déconnecter pendant quelques minutes… Peine perdue, car tout de suite après j’entends mon fils hurler car il s’est blessé. Mon mari m’accuse souvent d’être une mère qui ne peut pas contrôler ses enfants. Alors que moi, j’attends à ce qu’il soit plus présent pour m’épauler et partager les responsabilités. On n’est pas sur la même longueur d’ondes quand il s’agit de prendre des décisions sur les sorties de nos enfants. Ces derniers profitent de cette situation pour faire ce qu’ils veulent quand on se dispute. De plus, nous travaillons tous deux jusqu’à fort tard. Nous n’avons pas le choix que de les laisser avec leur tante», relate-t-elle.
 

Myriam Narainsamy: « La cellule familiale se fragilise»

 
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/div> Myriam Narainsamy, qui œuvre dans le social, avance que la famille est la cellule de base de la société. Elle précise que l’exemple doit venir des parents car ils sont les premiers éducateurs. « La nouvelle génération est composée d’enfants qui affirment connaître leurs droits. Or, il appartient aux parents d’établir des règles. Il faut activer le verrouillage parental sur la télévision, gérer l’argent de poche de l’enfant et surtout suivre ses déplacements. Il faut montrer aux enfants qu’ils sont dignes de notre confiance tout en maintenant de la discipline». Et d’ajouter : « Les parents n’adoptent pas les moyens nécessaires pour maîtriser le comportement turbulent de leur enfant». « Pendant les fêtes, les enfants consomment de l’alcool et les parents sont occupés à s’amuser sans se rendre compte de ce que font ces derniers. Certains affirment que c’est dans nos mœurs. Un parent doit toujours donner des consignes avant de sortir et cela doit être fait dès l’enfance pour inculquer ces valeurs à l’enfant. Dans plusieurs familles, les pères ont tendance à tout mettre sur le dos des mères. Ils se contentent que d’être le maître de la maison et estiment que c’est le rôle de la mère de s’occuper de l’enfant. Pourtant, les responsabilités doivent être partagées », affirme-t-elle. Selon Myriam Narainsamy, « nous avons pris du retard en ce qui concerne la sexualité des enfants ». « Les parents peuvent se tourner vers les travailleurs sociaux pour un travail au niveau de la communauté. On n’explique pas aux enfants qu’ils sont exposés à divers dangers. Pourtant, les jeunes enfants sont particulièrement vulnérables. L’Ecole des parents est un must à Maurice. Cela doit être fait pour les enfants et les parents. Ces derniers doivent être formés afin de pouvoir concilier leur vie familiale, sociale et professionnelle. Il est certes d’être parents de nos jours mais si la cellule familiale se fragilise, la situation peut être alarmante ».  
   

Que dit la loi? - Me Germain Wong Yuen Kook: «  Négliger son enfant est un délit »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"4968","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-8167","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1920","height":"960","alt":"Enfants"}}]]   L’avocat Germain Wong Yuen Kook affirme qu’en matière d’autorité, les droits des parents, si étendus soient-ils, ne sont pas sans limites. Tout doit être fait dans le respect dû à l’enfant et dans son intérêt. Il est à noter qu’il n’y a pas de loi spécifique quant à la négligence des parents envers leur enfant. Il faut donc se tourner vers la ‘Child Protection Act’. Ainsi, la section 13 prévoit que quiconque qui maltraite un enfant ou qui l’expose à un danger commet un délit. Si cette personne est trouvée coupable, elle risque une amende ne dépassant pas Rs 25 000 et un terme d’emprisonnement maximal de 5 ans. En cas de décès de l’enfant dû à la négligence des parents, la police peut poursuivre les parents pour homicide involontaire sous la section 239 du Code Criminel.  Si les parents sont trouvés coupables, ils risquent une amende de Rs 150 000 et une  peine d’emprisonnement ne dépassant pas 10 ans », dit-il.  
 

Dr Anjali Bungaleea: « Le manque d’écoute et  l’absence des parents peuvent être une forme de maltraitance »

 
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Garantir la sécurité d’un enfant ne s’arrête pas à s’assurer de son bien-être physique. En effet, nous explique la psychologue Anjali Bungaleea, la négligence affective peut être une forme de maltraitance. « Elle se traduit souvent par le manque d’écoute, par l’absence des parents, l’absence d’attention et de disponibilité émotionnelle », avance-t-elle. Selon elle, les dangers psychologiques sont souvent sous-estimés, voire même ignorés. « La maltraitance psychologique ou émotionnelle peut être résumée par des souvenirs bien traumatisants qui peuvent durer des années. De tels dangers psychologiques peuvent mener les enfants à ne pas s’adapter à son environnement scolaire. En outre, les enquêtes indiquent que les enfants ayant des contraintes psychologiques ont une croissance bien plus lente du cerveau. Ces enfants peuvent aussi avoir des difficultés à se concentrer dans leurs études, souffrant constamment de la fatigue. Ils ont un retard de développement dans toutes les phases avec des troubles obsessionnels compulsifs. Au pire, il y a aussi l’évolution du trouble bipolaire chez les enfants ainsi que l’anorexie ou la boulimie.  En revanche, nous les parents, nous voyons tout cela dans un autre sens. Nous nous posons des questions telles que : « qu’est-ce que j’ai bien pu faire pour avoir un enfant difficile et têtu comme ça ?» Les parents cherchent à comprendre la personnalité de l’enfant et associe le comportement de l’enfant à une maladie mentale au lieu de comprendre les circonstances qui poussent l’enfant à réagir ainsi», affirme-t-elle. Pour la prise en charge, Dr Anjali Bungaleea estime qu’il est essentiel d’identifier et protéger un enfant d’une maltraitance psychologique le plus tôt possible pour éviter des traumatismes chroniques et sévères. « Cela a des conséquences sur leur socialisation, leur scolarisation ainsi que sur leur santé. Il est nécessaire de prendre conscience de la maltraitance faite aux enfants et la combattre efficacement, afin d’éviter les conséquences à long terme sur leur santé psychique, physique et sociale. Car elles constituent le départ d’un véritable cycle de la violence. Il est primordial de protéger l’enfant et le soigner le plus tôt possible. Sans prise en charge à un stade précoce, un enfant maltraité sera tout d’abord confronté à un grand risque d’échecs scolaires, suivi par la colère, le désespoir», conclut-elle.  
   

La Convention des droits de l’enfant

Maurice a signé la Convention des droits de l’enfant en 1989. Les Articles 5 et 19 font mention de la responsabilité parentale. [padding-p-1 custom_class=""][/padding-p-1]

Article 5

Les États parties respectent la responsabilité, le droit et le devoir qu’ont les parents ou, le cas échéant, les membres de la famille élargie ou de la communauté, comme prévu par la coutume locale, les tuteurs ou autres personnes légalement responsables de l’enfant, de donner à celui-ci, d’une manière qui corresponde au développement de ses capacités, l’orientation et les conseils appropriés à l’exercice des droits que lui reconnaît la présente Convention. [padding-p-1 custom_class=""][/padding-p-1]

Article 19

  1. Les États parties prennent toutes les mesures législatives, administratives, sociales et éducatives appropriées pour protéger l’enfant contre toute forme de violence, d’atteinte ou de brutalités physiques ou mentales, d’abandon ou de négligence, de mauvais traitements ou d’exploitation, y compris la violence sexuelle, pendant qu’il est sous la garde de ses parents ou de l’un d’eux, de son ou ses représentants légaux ou de toute autre personne à qui il est confié.
  2. Ces mesures de protection doivent comprendre, selon qu’il conviendra, des procédures efficaces pour l’établissement de programmes sociaux visant à fournir l’appui nécessaire à l’enfant et à ceux à qui il est confié, ainsi que pour d’autres formes de prévention, et aux fins d’identification, de rapport, de renvoi, d’enquête, de traitement et de suivi pour les cas de mauvais traitements de l’enfant décrits ci-dessus, et comprendre également, selon qu’il conviendra, des procédures d’intervention judiciaire.
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