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Metro Express : subsides de l’État ou pas de ‘feeder buses’

Métro Express est considéré comme une menace par les compagnies d'autobus.

Impossible de concilier la baisse de recettes et le maintien de tous les emplois. C’est ce qu’on maintient dans le milieu des compagnies d’autobus.  Le projet de Feeder Buses proposé par le gouvernement pour compenser la baisse de recettes est considéré comme financièrement non viable. On estime que c’est la responsabilité de l’État de leur éviter le pire en accordant des subsides.

À 23 jours du lancement, à titre d’essai, du Metro Express, le gouvernement et les compagnies d’autobus ne sont pas encore arrivés à un accord sur la mise en opération des 'feeder buses'. Ces autobus de 25 à 35 places feront la navette entre les stations et les régions avoisinantes. Pour la première phase du projet, 55 de ces bus seront en opération entre Port-Louis et Rose-Hill. Dont 23 de Rose-Hill Transport (RHT), 18 de l’United Bus Service (UBS), 11 de la Compagnie nationale du transport (CNT) et 3 de Triolet Bus Service (TBS). À terme, il y aura 110 'feeder buses' au total sur le trajet Port-Louis/Curepipe.

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Ce projet a pour but de compenser la baisse du nombre de passagers pour les compagnies d’autobus sur les lignes traditionnelles entre Port-Louis et Curepipe. Or, dans le milieu des compagnies de transport, chiffres à l’appui, on démontre que ce n’est pas un projet financièrement viable. D’ailleurs, des correspondances ont été envoyées au Premier ministre, Pravind Jugnauth, au ministre des Infrastructures publiques, Nando Bodha, et à la National Transport Authority pour les informer que leurs compagnies vont rouler à perte.

Coût d’opération de Rs 17 millions

Le 55 'feeder buses' vont opérer en deux shifts pendant 17 heures, soit de 5 heures à 22 heures. Vu que la fréquence est entre 7 et 12 minutes, chaque 'feeder buses' fera une cinquantaine de trajets aller-retour. En se basant sur ce service, le coût d’opération par jour est chiffré entre Rs 8 000 et Rs 15 000, dépendant de la compagnie d’autobus et du type de véhicules. Pour une moyenne de Rs 10 000 par jour, le coût d’opération d’un 'feeder bus' reviendra à Rs 300 000 par mois. Donc, environ Rs 7 millions par mois pour la flotte de Rose-Hill Transport, Rs 5,5 millions pour l’United Bus Service et Rs 3,3 millions pour la Compagnie nationale du transport. « C’est sûr que sur ces petits trajets avec un ticket ne dépassant pas Rs 10, nous n’allons pas pouvoir faire de profits », déclare un haut cadre du département des finances d’une des compagnies. « Pour un coût d’opération moyenne de Rs 10 000, il va falloir transporter 1 000 passagers par jour par autobus rien que pour les stations métro sur le trajet Port-Louis/Rose-Hill pour ‘break even’», ajoute-t-il. 

Pour réaliser des profits, un 'feeder bus' doit transporter au minimum 25 passagers du matin au soir, voire pour chaque trajet. « C’est tout simplement impossible. Même pendant les heures de pointe, nous n’allons pas pouvoir remplir le bus à l’aller et au retour. Si le matin, le bus est bondé en direction de la station, il retournera presque vide. Que les autorités comprennent cela ! D’où notre affirmation que les Feeder Buses vont rouler à perte », insiste-t-il. 

Si les 'feeder buses' viennent se greffer sur la baisse du nombre de voyageurs et le maintien de tous les emplois, les finances des compagnies d’autobus dont les opérations reposent principalement sur la desserte du trajet Port-Louis/Curepipe, y compris Vacoas et Quatre-Bornes, vont tourner au rouge. « Nous sommes tributaires d’une situation cornélienne. D’une part, avec l’introduction du Metro Express, nos recettes vont chuter considérablement, car le nombre de nos passagers va diminuer. D’autre part, nos coûts d’opération seront relativement élevés avec la décision du gouvernement de sauvegarder tous les emplois », fait-on ressortir dans les milieux de ces compagnies d’autobus. « Il ne faut pas que les autorités nous prennent pour des magiciens qui vont faire joindre deux extrémités très éloignées », fulmine un responsable. À leur avis, seul le gouvernement peut faire ce miracle en injectant des subsides dans leurs compagnies. Selon leurs dires, le problème se décline en trois étapes. 

Étape 1 : Baisse de recettes

Selon les estimations de ces compagnies du transport en commun, il y aura une chute sensible de recettes suite à la baisse du nombre de passagers par environ 50 % sur le trajet entre Curepipe et Port-Louis. Trois points sont avancés pour expliquer l’attraction du public pour le métro. 

Primo, en se basant sur l’attitude tout nouveau tout beau, on pense que les passagers vont déserter les autobus pour découvrir le métro. À leur avis, au départ, même ceux ayant des voitures vont être tentés par la découverte. 
Secundo, après la découverte, ils vont comparer les services. « Et c’est bien là où cela nous fera mal », fait-on ressortir. Dans  le métro, il y a plus de confort en sus de l’accessibilité au Wi-Fi. 

Tertio, dans le Métro, les passagers seront immunisés contre le stress de la congestion routière. « Pensez-vous qu’une personne optera pour un autobus de Curepipe à Port-Louis ou même de Rose-Hill à Port-Louis, le matin et vice versa dans l’après-midi, alors qu’avec le métro il n’y a plus de souci de longue attente dans des embouteillages ? C’est clair que nous serons défavorisés », souligne un autre interlocuteur.

Fonds de Rs 100 M

Le gouvernement a créé un fonds de Rs 100 millions pour subventionner les bus électriques qui agiront comme Feeder Buses. Rose-Hill Transport (RHT) en a déjà fait acquisition de quelques-uns au coût de Rs 4,2 million chacun. Ils transporteront les passagers vers les stations de métro à des intervalles de 7 à 8 minutes aux heures de pointe et 10 et 12 minutes en temps normal.

Étape 2 : Maintenir tous les emplois

Le gouvernement maintient qu’il n’y aura pas de perte d’emplois dans un communiqué en date du 28 août après qu’Iqbal Sheik Abbass de l’United Bus Service Employees Union (UBSEU) ait avancé qu’environ 500 employés pourraient être licenciés. Le ministère des Infrastructures publiques rassure que le Metro Express favorisera une intégration parfaite avec l’industrie du transport pour la sauvegarde des emplois. Le premier segment de 19 Feeder Routes qui seront desservies par un minimum de 55 bus et la création d’une dizaine de nouvelles routes dans un 'catchment area' de 5 à 10 km, au départ de chaque station viendront consolider les emplois. Les 'feeder buses' seront complémentaires au service du Metro Express. Les nouvelles heures d’opération (de 6 heures à 22 heures) de ce nouveau système de transport nécessiteront des ressources humaines supplémentaires. 

Concernant la retraite anticipée évoquée par les syndicats à la demande des travailleurs, le ministère affirme qu’elle est déjà à l’étude en tenant compte des implications financières et sociales. Par rapport à l’impact réel du Metro Express, le communiqué annonce que plusieurs scénarios ont déjà été présentés et les réajustements nécessaires seront pris en compte de concert avec les syndicats et les compagnies, une fois le Metro Express sera en opération.

Étape 3 : Problème financier

La baisse de recettes et le maintien de tous les emplois déboucheront sur un problème financier, fait-on ressortir dans le milieu des compagnies d’autobus. Pour la simple et bonne raison que les salaires et autres avantages aux employés représentent environ 60 % du coût d’opération. « Il y aura définitivement un trou financier à combler. Le gouvernement a proposé un plan de comblage à travers les Feeder Buses. C’est une initiative très louable mais qui ne suffit pas. Il y aura toujours un manque à gagner, car les recettes provenant des Feeder Buses n’égaleront pas celles perdues avec des passagers qui ont opté pour le Metro », explique-t-on. Cette situation, insiste-t-on, risque de culminer sur des pertes, vu que la marge de profits est faible dans le transport en commun.

À la lumière de ces faits, au sein de ces compagnies, on estime que le gouvernement devra venir à leur rescousse à travers des subsides pour éviter qu’elles s’enlisent dans la spirale des pertes financières.


Le prix du ticket

Le Premier ministre, Pravind Jugnauth, a annoncé au Parlement, le vendredi 9 août, que le prix du ticket du Metro Express, sur le trajet Curepipe/Port-Louis, sera de Rs 37 lors de sa mise en opération en 2021. Et il passera à Rs 40 en 2022 et à Rs 50 en 2023. Par la suite, le ministre des Infrastructures publiques, Nando Bodha, a annoncé qu’un Fare Review Committee effectuera un calcul scientifique et fera des recommandations pour le réajustement des tarifs lorsque le besoin se fera sentir.

À une vingtaine de jours de la mise sur les rails du Metro Express, aucune annonce n’a été faite sur le prix du ticket entre Port-Louis et Rose-Hill. Actuellement, le ticket d’autobus est de Rs 30. Non plus, la période de gratuité sur ce trajet. Et moins sur les 'Feeder Buses' : seront-ils payants ou gratuits ? C’est peu probable que leurs services soient gratuits dans la durée, car le gouvernement devra débourser environ Rs 16,5 millions par mois.

Métro : Plus de 37 000 passagers par jour 

Pendant la période d’essai en octobre 2019, Metro Express ne sera fonctionnel que pendant 4 heures, soit entre 11 heures et 15 heures entre Port-Louis et Rose-Hill. Voire hors heures de pointe. Ce n’est qu’en novembre qu’il sera opérationnel pendant 15 heures, voire entre 6 heures et 21 heures. Ce qui fait que les 'Feeder Buses' doivent être opérationnels à partir de 5 heures jusqu’à 22 heures. Soit une heure avant et une heure après les horaires du métro. Selon les estimations des consultants, le nombre de passagers qui voyageront par le métro passera de 5 000 pendant la période d’essai en octobre 2019 

(3 trains en opération pendant 4 heures seulement), à 22 500 en novembre 2019 (4 trains en opération pendant 15 heures), 37 000 en janvier 2020 (6 trains en opération pendant 15 heures) et 41 000 en mars 2020 (6 trains en opération pendant 15  heures). 

Mois Train en opération Heure d’opération Passagers par heure
Octobre 2019 3 11h à 15h 1200
Novembre 2019 4 6h à 21h 1200
Décembre 2019 4 6h à 21h 1500
Janvier 2020 6 6h à 21h 2400
Mars 2020 7 6h à 21h 2700
 

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