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Premiers pourparlers russo-ukrainiens, au 5e jour de l'invasion russe

Des délégations russe et ukrainienne ont entamé lundi des pourparlers pour tenter de stopper la guerre en Ukraine, au cinquième jour d'une invasion russe qui a déjà poussé plus de 500.000 Ukrainiens à fuir leur pays.

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Ces premières négociations interviennent alors que les forces de Vladimir Poutine rencontrent une vive résistance de l'armée ukrainienne, et que les sanctions d'une ampleur inédite adoptées par les Occidentaux ébranlent l'économie russe.

Selon la présidence ukrainienne, Kiev va demander lors des discussions - organisées dans une résidence du président bélarusse Alexandre Loukachenko, à la frontière ukraino-bélarusse - "un cessez le feu immédiat et le retrait des troupes (russes) du territoire ukrainien".

Le président Zelensky, qui ne participe pas aux négociations et dont la délégation est conduite par le ministre de la Défense Oleksiï Reznikov, a appelé depuis Kiev les soldats russes à "déposer les armes".

Il a également demandé à l'UE une intégration "sans délai" de l'Ukraine. "Je suis sûr que c'est juste. Je suis sûr que c'est possible", a-t-il lancé.

Le processus d'intégration d'un nouveau pays à l'UE prend habituellement des années. Le président du Conseil européen Charles Michel a souligné qu'il y avait "différentes opinions" sur ce sujet qui nécessite l'unanimité.

Le chef de la délégation russe, le conseiller du Kremlin Vladimir Medinski, a lui indiqué vouloir "trouver un accord" avec Kiev qui soit "dans l'intérêt des deux parties".

Le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a refusé d'énoncer les exigences russes, soulignant que les négociations devaient se faire "dans le silence".

L'agence bélarusse Belta diffusait des images de la salle des négociations, avec une longue table couverte d'une nappe blanche, une dizaine de chaises de chaque côté, et les drapeaux des trois pays dans le fond.

"Vous pouvez vous sentir en sécurité totale, c'est notre responsabilité sacrée", a déclaré aux délégations en les accueillant le chef de la diplomatie bélarusse, Vladimir Makeï.  

Pas de victoire majeure

Sur le terrain, Kiev a indiqué lundi que l'armée russe avait tenté dans la nuit de prendre d'assaut la capitale - où un couvre-feu était en place une grande partie du weekend - mais que les attaques avaient été repoussées.

Dès la levée du couvre-feu lundi matin, les habitants faisaient la queue, dans le calme, devant les rares magasins d'alimentation encore ouverts.

La ville est désormais hérissée de barricades de fortune, pneus, mobilier, vieille Lada en travers de la route, gardées par des volontaires armés, bandeaux jaunes aux bras.

L'armée russe a assuré que les civils pouvaient quitter "librement" Kiev et accusé le pouvoir ukrainien de les utiliser comme "bouclier humain", laissant planer le spectre d'un assaut de grande envergure.

L'armée ukrainienne a indiqué que les forces russes avaient subi de lourdes pertes au nord-ouest de l'Ukraine, et avaient été arrêtées, au sud-est de Kiev, dans la localité de Slobojanski. 

Mais elles poursuivaient leur offensive sur Marioupol, important port du sud-est, selon Kiev.

Si la Russie a reconnu pour la première fois dimanche des pertes humaines, sans les chiffrer, elle a aussi affirmé lundi avoir établi sa "suprématie aérienne" sur toute l'Ukraine.

Vladimir Poutine a lui franchi un nouveau cap dans la menace d'élargir le conflit, affirmant dimanche avoir mis ses forces nucléaires en "état spécial d'alerte", face aux "déclarations belliqueuses de l'Otan" et aux sanctions "illégitimes" imposées à la Russie.

Les Etats-Unis ont dénoncé une escalade "inacceptable", le secrétaire général de l'Otan Jens Stoltenberg fustigeant lui une attitude "irresponsable" de Moscou.

Sanctions économiques 

Pendant le weekend, les Européens ont durci leurs sanctions économiques contre la Russie, en excluant plusieurs banques russes du système interbancaire international Swift et toute transaction avec la banque centrale de Russie, et en fermant leur espace aérien aux avions russes - mesure également prise par le Canada.

Les effets commençaient à se faire sentir : la Banque centrale européenne a constaté la "faillite ou faillite probable" de la filiale européenne de la banque russe Sberbank, la première du pays.

Pour défendre l'économie et la monnaie nationale, qui battait des records historiques de faiblesse face à l'euro et au dollar lundi, la Banque centrale de Russie a annoncé relever de 10,5 points, à 20%, son taux directeur.

Poutine se concentrait lundi matin sur ces problèmes économiques, selon son porte-parole. "Les sanctions sont lourdes, elles posent problème (...) mais la Russie a toutes les capacités nécessaires pour compenser les dégâts," a indiqué Dmitri Peskov.

L'ensemble des marchés mondiaux ont replongé dans le rouge lundi, craignant une flambée des prix de l'énergie pouvant renforcer l'inflation actuelle.

Soutien militaire européen inédit 

Si les pays européens sont pour la plupart membres de l'Alliance atlantique - qui a annoncé qu'elle n'enverrait pas de troupes en Ukraine - ils ont annoncé dimanche des mesures inédites de soutien militaire à Kiev: déblocage de 450 millions d'euros pour financer des livraisons d'armes et envoi d'avions de combat à Kiev.
Ils ont aussi banni les médias d'Etat russes RT et Sputnik. Moscou n'a pas annoncé dans l'immédiat de représailles visant les médias occidentaux.

La Maison Blanche a annoncé que le président Joe Biden s'entretiendrait à nouveau avec ses alliés lundi à 16H15 GMT, pour "coordonner" une "réponse unie" face à l'attaque russe.

Le président français Emmanuel Macron, président en exercice de l'UE, devait participer à cette visioconférence puis dîner avec le chancelier allemand Olaf Scholz et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.

Réfugiés toujours plus nombreux

Le flot de réfugiés fuyant l'Ukraine ne cesse de grossir. Depuis jeudi, plus de 500.000 réfugiés ont fui vers les pays voisins, a indiqué lundi le Haut-Commissaire de l'ONU pour les réfugiés. L'UE a dit s'attendre à plus de sept millions de personnes déplacées.

Une majorité se rend en Pologne, où une importante communauté ukrainienne était déjà installée avant le conflit. Mais Roumanie, Slovaquie, et Hongrie - pays tous membres de l'Otan - sont aussi concernés.

Connu pour ses positions anti-migrants, le Premier ministre hongrois Viktor Orban a assoupli les restrictions aux demandes d'asile, et les Hongrois ont accouru à la frontière avec l'Ukraine pour proposer bols de goulash, offres d'hébergement et réconfort.

Au passage frontalier de Medyka, en Pologne, Katarzyna Jasinska, 25 ans, tendait une veste chaude pour enfant à un Ukrainien. "Il y en a qui sont venus sans rien du tout ou juste avec un sac à main. En fuyant, ils n'ont pas eu le temps d'emmener quoi que ce soit avec eux", dit cette technicienne vétérinaire, émue aux larmes.

Des centaines de milliers de personnes aux couleurs jaune et bleu de l'Ukraine ont défilé en Europe pendant le weekend pour dénoncer l'invasion russe, et les drapeaux ukrainiens fleurissaient sur les comptes d'Européens sur les réseaux sociaux.

Le bilan du conflit jusqu'ici reste incertain. L'Ukraine a fait état lundi de 352 personnes tuées, dont 16 enfants, depuis jeudi et de plus de 2.000 personnes blessées.

L'ONU a elle indiqué lundi avoir enregistré 102 civils tués, dont 7 enfants, et 304 blessés, mais a averti que les chiffres réels "sont considérablement" plus élevés.

Les 193 membres de l'Assemblée générale des Nations unies devaient se réunir lundi en "session extraordinaire d'urgence" pour se prononcer sur le conflit.

La France devait soumettre une résolution sur l'aide humanitaire à l'Ukraine au Conseil de sécurité. La Russie y détient un droit de veto qui exclut toute condamnation formelle de l'offensive.

AFP

 

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