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Rajen Narsinghen : «Le PMO se substitue à la Cour suprême»

Rajen Narsinghen 

Le Senior Lecturer & Head of Law Department à l’Université de Maurice, Rajen Narsinghen, indique que la Cour suprême et le comité judiciaire du Conseil privé sont les deux seules instances qui détiennent les compétences en matière constitutionnelle.

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Quelle lecture faites-vous de cette crise constitutionnelle ?
Sur les agissements de la Présidente Ameenah Gurib-Fakim d’instituer une commission d’enquête, il faut lire conjointement l’article 28 (1)(b) de la Constitution et la Commissions of Inquiry Act. L’article 28 (1) (b) stipule que la Présidente doit sauvegarder la démocratie et l’État de droit. Mais à ce jour, personne n’a évoqué l’article 64 (5) de la Constitution qui stipule que lorsque la Présidente agit sans consulter ou sans l’avis du Cabinet ou d’une autre autorité, personne ne peut contester cela en Cour. La question se pose : comment le Bureau du Premier ministre aurait-il pu contester la commission d’enquête en Cour pour dire que celle-ci est anticonstitutionnelle ou illégale. Dans ce cas, je pense que même la Cour suprême se serait retrouvée dans un imbroglio.

Mais le Cabinet a quand même pris la décision d’instituer une commission d’enquête..
Oui, le Cabinet récidive aujourd’hui (vendredi) en annonçant une commission d’enquête pour déterminer si l’article 64 (1) de la Constitution a été bafoué. Mais d’après les articles 83 et 81, une lecture possible, c’est que seuls la Cour Suprême et le comité judiciaire du Conseil privé détiennent les prérogatives pour décider sur l’interprétation de n’importe quel article de la Constitution et aussi pour déterminer si les autorités se sont conformées aux dispositions constitutionnelles. Le Bureau du Premier ministre se substitue donc à ces deux instances que sont la Cour Suprême et le comité judiciaire du Conseil privé.

Est-ce à dire que cette commission n’a donc pas de raison d’être ?
C’est un peu un non-sens et un gaspillage de fonds publics que d’instituer une commission d’enquête qui, au final, résultera en un va-et-vient incessant entre la commission et la Cour suprême.

Pourquoi ?
Ce qui va se passer, c’est que les avocats de la Présidente, si jamais elle est convoquée, vont saisir la Cour suprême pour arguer que seule l’instance (ndlr, la Cour suprême) peut interpréter son utilisation de l’article 28(1) (b) de la Constitution et de la Commissions of Inquiry Act.

Puis, il est fort probable que ses avocats vont, une fois de plus, arguer sous l’article 31(A) de la Constitution, qu’elle a agi dans les paramètres de ses fonctions et de dire qu’elle est donc couverte par l’immunité. Cette commission d’enquête deviendra donc risible, sinon comique, lorsque la Présidente refusera d’aller déposer.

Qu'est-ce que le gouvernement aurait du faire, selon vous ?
Si le Premier ministre et le Cabinet estimaient que la Présidente a bafoué l’article 64 (1), ils auraient dû tout simplement saisir la Cour suprême. Ils ne se seraient pas retrouvés dans une impasse, car l’article 64 (5) stipule, je le rappelle une fois de plus, que lorsqu’une décision est prise, personne ne peut la contester. De plus, j’estime que si le gouvernement ‘means business’, il aurait dû venir avec une ‘full fledged Commission of Inquiry’ sur les agissements de la Présidente, sur toute l’affaire Sobrinho ainsi que toutes les prétendues ramifications autour.

 

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