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Rashila Ramchurn : un peintre dans l’engagement sociétal

Rashila Ramchurn s’est toujours  intéressée à l’art. Rashila Ramchurn s’est toujours intéressée à l’art.

Elle ne cesse d’explorer les voies du ‘street art’. Aujourd’hui, elle s’est investie dans un courant plus large qu’elle a intitulé le SmArt Mob. Il s’adresse à un public adulte alors que le ‘street art’, dit-elle, implique davantage les jeunes.

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L’art contemporain mauricien ne cesse de s’enrichir en dépit de l’absence de moyens financiers, d’espaces d’exposition et de l’indifférence totale de l’État et du secteur privé, qui auraient pu jouer leur rôle de mécénat. Qu’à cela ne tienne. Des artistes comme Rashila Ramchurn ou encore Krishna Luchoomun poursuivent leur bout de chemin.

Il y a quelques années, Rashila Ramchurn se faisait connaître grâce à un happening artistique dans le Nord, où elle avait initié des jeunes au ‘street art’. « L’idée était de démocratiser l’accès à l’art, car je suis intimement convaincue qu’il existe des talents cachés chez bon nombre de jeunes. » Pour y arriver, elle fonde son argument sur la théorie du déconstructivisme cher au philosophe Français Jacques Derrida et qui, plus près de nous, n’est pas sans rappeler la démarche de Michel Onfray, partisan de la dissémination jusqu’au citoyen lambda de la philosophie.

Rashila Ramchurn semble se rapprocher de cette démarche après une première expérience avec les jeunes. « Depuis petite, indique-t-elle, je me suis toujours intéressée à l’art et toutes mes études, jusqu’à celles de doctorat actuellement, se concentrent sur l’art avec le souci de le mettre à la portée de tout le monde. Je m’emploie, par tous les moyens, à l’extirper de sa gangue élitiste, qui ne permet pas son épanouissement à travers la recherche créative. »

Public des rues

En 2011, le mouvement qu’elle initie, le ‘street art’ participe à ce souci de rendre la création artistique ‘visuelle’, donc soumise au regard critique du public des rues. En même temps, cette démarche impose aux artistes en herbe de travailler sous une double contrainte : celle de se livrer au regard du public et l’obligation de créer. « Ces contraintes font partie de la réalité de l’artiste dans ses moments de création, car en se soumettant au regard des autres, il s’imprègne aussi d’une réalité plus vaste que son univers. Elle nous plonge dans notre propre société et nous en devenons les témoins à travers nos travaux. En même temps, c’est la rue qui se transforme en galerie, mais elle est plus que cela, car elle n’est pas ce monde fait de murs qui confinent les créations artistiques. Au contraire, elle les libère et les expose dans un univers composé de toutes les couches sociales et ethniques de la société mauricienne. C’est en cela que le ‘street art’ est si particulier, car des travaux sont donnés à voir aux gens qui ne fréquentent pas forcément les galeries. Quelque 2 000 jeunes avaient participé à ce mouvement dans 50 endroits avec le soutien personnel du Premier ministre d’alors, Navin Ramgoolam », fait ressortir Rashila Ramchurn.   

La thérapie par la peinture

Aujourd’hui, avec le mouvement SmArt Mob, elle souhaite que la peinture serve la justice sociale. « Il faut que l’art arrive à briser les barrières culturelles pour permettre de comprendre les êtres humains. Il s’agit d’inciter les citoyens à réfléchir sur eux-mêmes, à s’interroger sur leurs habitudes de consommation, leurs valeurs et leurs priorités, explique Rashila Ramchurn. SmARt Mob va au-delà des limites étroites, brise les barrières invisibles qui nous empêchent d’avancer sans que l’on puisse voir avec les yeux naturels. Il me paraît nécessaire de faire valoir l’héritage qu’on a reçu, une solidarité qui nous unit par le sentiment de sacrifice. Nous sommes tous différents, mais tous les mêmes. »

L’artiste donne déjà à voir quelques travaux qui s’inspirent du monde de l’enfance et de la manière dont les enfants conçoivent le monde. « À travers mes études de la thérapie par la peinture, je me suis rendue compte que lorsque l’on donnait des travaux à des enfants, certains dessinaient des maisons vides alors que dans le passé, ils peignaient leurs parents et leurs chiens… Il y a certainement une lecture sociale et culturelle que ces dessins doivent nous inspirer. »

Pour Rashila Ramchurn, qui commente son glissement vers cette nouvelle forme, le ‘street art’ est devenu ‘anachronique’ car aujourd’hui, l’art doit être en mesure de refléter les perversions sociales de Maurice afin de remplir aussi la fonction d’outil de réflexion.

 

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