Interview

Sanjay Mungur : «L’État accompagnera les PME durant leurs transition»

Sanjay Mungur, CEO d’Empretec Mauritius Sanjay Mungur, CEO d’Empretec Mauritius

Après moins d’un an d’études dans le milieu des PME, suivant une commande du ministère du Business, Enterprise and Cooperatives, la compagnie Empretec Mauritius vient de rendre son rapport public. Son CEO, Sanjay Mungur, explique ci-dessous les grandes lignes de ce document et les perspectives de développement pour les PME.

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Quelles ont été les principales étapes de l’étude d’Empretec Mauritius ?
Notre expérience du secteur des PME date d’une vingtaine d’années, donc nous ne partions pas de nulle part. À cette expérience, nous avons conjugué celle de nos relations avec des pays africains, mais aussi plus loin avec le Chili ou encore l’Estonie. À chaque étape de nos ateliers de travail avec les PME locales et les institutions de tutelle, nous avons fait valider nos propositions.

Aviez-vous des références ?
Oui, elles sont quelques grosses compagnies de textile ou dans le secteur touristique, nées vers la fin de années 1990 et qui avaient connu des débuts modestes avant de connaître une croissance de grande envergure. Ce qui nous importait, entre autres, dans notre étude, c’était de connaître les facteurs qui expliquent une certaine stagnation chez certaines PME. Il existe à Maurice 42 % de PME qui réalisent un chiffre d’affaires de Rs 2 millions, mais certaines d’entre elles pêchent par un manque de vision de développement. Les PME ne peuvent plus opérer comme avant sous peine de stagner, voire disparaître. Mais l’État les accompagnera en expertises et en conseils durant leurs phases de transition.

Pourquoi ne parviennent-elles pas à se développer davantage ?
Chaque entreprise a sa réalité et son identité en fonction des circonstances de sa mise sur pied, de son produit, du niveau professionnel de sa main-d’œuvre, de son marché et des concurrents. Elle peut aussi être une entreprise familiale, ce qui peut parfois être la source de ses problèmes pour son essor, lorsque surgissent des divergences et la question de succession et l’âge des responsables. Ce sont ces facteurs qu’il faut étudier. Mais certains petits entrepreneurs n’ont pas les moyens de les identifier, car ils n’ont fait que produire sans jamais s’attarder, par exemple  sur la comptabilité, l’évolution du marché, sa modernisation. C’est là que les institutions de tutelle interviennent en lui apportant l’expertise qui lui faisait défaut.

L’accès au financement, illustré par la réticence des banques aux prêts, a souvent été décrié par certaines PME. Est-il justifié ?
Aucune banque ne consentira un prêt sans se couvrir. Cependant, elle est prête à le faire lorsqu’un dossier bien ficelé lui est présenté, avec des garantis à l’appui. Si le produit est fiable, chiffres à l’appui et certifiés par un professionnel, n’importe quelle banque sera prête à jouer le jeu.

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«Il existe à Maurice 42 % de PME qui réalisent un chiffre d’affaires de Rs 2 millions.»

Est-ce que l’État, lui, prête-t-il de d’argent ?
Non, il intervient en termes de conseils et créant les opportunités destinées à favoriser la mise en contact des PME avec les potentiels acheteurs étrangers, notamment durant les foires internationales. En fait, son rôle est d’améliorer l’environnement des affaires, grâce à un écosystème dynamique. Nous pensons que c’est aux entrepreneurs de trouver eux-mêmes le financement nécessaire, soit en puisant dans leurs économies, ou grâce à des emprunts auprès de leurs amis, parents ou auprès des banques.

Vous faites état de la nécessité aux PME de se conformer aux normes internationales. Pourquoi ?
Parceque les perspectives de croissance se trouvent à l’international, en raison de l’étroitesse de notre marché. À ce titre, il faut mettre l’accent sur la formation et la qualité du produit, avant de prospecter le marché international.

Est-ce que tous les petits entrepreneurs peuvent-ils passer le cap de la formation dont une bonne partie est liée à l’informatisation et ses nouvelles techniques ?
S’ils n’y arrivent pas, ils doivent recruter des professionnels à plein-temps ou à temps partiel. Ce sont là des opportunités d’emplois pour les jeunes diplômés. Mais, la formation est une étape décisive dans le développement d’une entreprise. C’est aussi une responsabilité qui revient aux institutions, et qui fait partie d’un accompagnement régulier aux cotés de ces PME.

Beaucoup de PME parlent d’une certaine incohérence politique consistant d’une part à libéraliser l’importation et, d’autre part,  tenir discours favorable à la production locale ?
Je pense qu’il faut un certain protectionnisme au nom de notre patrimoine.  L’Éthiopie, par exemple protège certains de ses produits en taxant des importations provenant des pays-membres du Comesa, dont il est pourtant membre. À Maurice, il existe certains éléments protectionnistes qu’il faut faire valoir.

De quelle manière l’expérience d’Empretec mauricien a-t-elle contribué à cette étude ?
Nous nous sommes, par exemple, inspirés de la politique de l’Estonie, qui offre des passeports électroniques aux entrepreneurs étrangers, dont l’accès est simplifié grâce à la disponibilité d’une base de données sur le pays. À Maurice, nous recommandons d’offrir quelque 5 000 passeports aux entrepreneurs du monde entier, en tenant évidemment compte de leur profil. Ils peuvent éventuellement nouer des partenariats avec des Mauriciens. À travers le monde, des entrepreneurs recherchent des occasions d’affaires dans un environnement qui leur est favorable, aussi convient-il de créer ces conditions.

Ce plan bi-quinquennal n’est-il pas tributaire des facteurs économiques internationaux devenus très volatils ?
Bon, il faut déjà savoir que c’était le souhait du ministre de rédiger un plan sur la durée, mais en même temps, ce document est une étude qui met aussi l’accent sur des idées d’ordre général. C’est une boîte à outils qui, je le souhaite, sert de référence. Il revient à toutes les parties concernées par l’avenir des PME de veiller aux ajustements que peuvent provoquer des mutations économiques et financières au niveau international.

Une partie de vos recom-mandations a trait aux entre-prises dites environnementales ?
Oui, c’est un domaine où les perspectives sont réelles, les investissements rentables.  Prenons l’exemple des énergies alternatives, comme les éoliennes ou les capteurs solaires. Dans les prochaines années, leurs coûts deviendront très accessibles et à Maurice, les conditions sont plus que favorables pour leur exploitation, car le marché est très capteur. Tout le monde souhaite faire des économies, il suffit de que le gouvernement examine la législation existante.

Qu’adviendra-t-il de ce plan si le pouvoir change de mains aux prochaines élections générales ?
Je vous signale que ce gouvernement peut tout aussi rester au pouvoir. Cela dit, il faut faire ressortir que ce document n’a aucune coloration politique, son seule ambition est de s’inscrire dans la continuité.

 

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