Faits Divers

Trois ans après l’Accident de Sorèze: Adeellah Emambokus: «J’ai survécu grâce à mon bébé»

Le 3 mai 2013, un terrible accident survenait à Sorèze. Les freins du bus Blue Line immatriculé 4263 AG 07 lâchent. Dix personnes sont tuées et une quarantaine blessée. Parmi les rescapés, une femme enceinte. Des passagers s’étaient mis autour d’elle pour la protéger lors de l’accident. Rencontre... Adeellah Emambokus, une rescapée de l’accident, a accouché prématurément. « J’arrive à surmonter mon traumatisme en regardant le visage de mon bébé. Il est la clé de mon bonheur. Il est le miracle sans lequel je n’aurai pas survécu », dit cette Vacoassienne âgée d’une trentaine d’années. Il y a trois ans, cette mère de famille comme les autres respirait la joie de vivre. Elle avait des rêves plein la tête et de l’énergie à en revendre. Sa vie a basculé quand elle a pris place à bord de l’autobus de la Blue Line. « J’ai été grièvement blessée au pied et cela ne me rend pas la vie facile », dit-elle.
Elle vit aujourd’hui avec des douleurs qui lui « minent l’existence ». Elle a, par exemple, du mal à marcher ou à descendre les escaliers. « Mo remersie Bondié ki finn sov lavi mo garson. Me li domaz ki mo pa kapav pran mo bebe kont kuma bizin. Mo pa finn kapav alet li », explique notre interlocutrice. Elle ne peut s’occuper de ses enfants comme elle le souhaiterait. Ce sont ses proches et son époux qui s’en chargent et prennent aussi soin d’elle. Après le terrible accident de Sorèze, elle a fait un long séjour à l’hôpital. Elle a dû prendre son courage à deux mains pour reprendre le cours de sa vie. Elle voulait être une femme indépendante et élever son enfant, mais le destin en a décidé autrement.

Le virage de la mort

Il était aux alentours de 9 heures, le vendredi 3 mai 2013. Une cinquantaine de passagers se trouvait à bord de l’autobus Blue Line. Deepchand Gunness, 50 ans, ainsi que Shakuntala Ramdaursingh, (48 ans), Ruth Marimootoo (50 ans), Amreen Lallmamode (23 ans), Delphine Pokhun (21 ans), Kamla Soobroydoo (52 ans), Elyn Jang Chuan Hu (24 ans), Devesh Cheeneebash (18 ans), Sanjay Ujoodha (48 ans) et son épouse Priya (40 ans) ont péri dans l’accident.

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Quand elle repense à sa vie d’avant l’accident, Adeellah Emambokus ne peut s’empêcher de pleurer amèrement. « J’étais très joviale, j’avais de l’ambition et j’aimais sortir en famille. Maintenant, je ne peux me permettre de faire tout cela », fait-elle remarquer tristement. Dans sa tête, elle revoit sans cesse défiler les images du drame. « Mo oblize voyaz par bis. Me aster mo ena tandanss observ sofer la. Ki dialog li ena avek kontroler. Dès que je ressens une secousse lors du voyage, je ne peux m’empêcher de trembler », soutient la rescapée. Traumatisée par cet accident, la peur fait désormais partie intégrante de sa vie. Pour ne rien arranger, Adeellah Emambokus se retrouve en difficulté financière, car elle ne peut travailler et doit compter sur l’aide de ses proches. Les autorités ne l’ont pas dédommagée jusqu’à présent pour tous les préjudices subis. Elle trouve cela très regrettable, mais garde espoir.

Jean-Paul Marimootoo: «Je n’accepte toujours pas»

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Anne-Lise Pokhun: «Mathieu demande après sa mère»

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"16623","attributes":{"class":"media-image alignright wp-image-28109","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"200","height":"280","alt":"Anne-Lise Pokhun"}}]]Mathieu n’avait que trois ans quand sa mère Delphine Pokhun a péri dans l’accident. Cette dernière, 21 ans, se rendait à Port-Louis pour récupérer sa carte d’identité sur laquelle elle avait fait inscrire son nouveau nom de famille après son mariage. « Nous n’arrivons pas à faire notre deuil. Mathieu demande toujours après sa mère », dit Anne-Lise, la grand-mère paternelle du petit. « Mathieu était très attaché à sa mère. Il ne lâche à aucun moment ce petit oreiller qu’elle lui avait cousu. Il ne laisse personne le toucher, car cet objet garde le parfum de sa mère. Il se sent auprès d’elle grâce à cet oreiller », ajoute cette bonne à tout faire âgée de 55 ans.

Jayshree Gunness: «Mon époux est mort  en héros»

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"16624","attributes":{"class":"media-image alignleft wp-image-28110","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"200","height":"280","alt":"Jayshree Gunness"}}]]De nombreux rescapés considèrent Deepchand Gunness, le chauffeur de l’autobus, comme un héros. Cet habitant de Petite-Rivière, père de trois enfants, a tout fait pour sauver le maximum de passagers. Son sang-froid a permis de ne pas alourdir le bilan. Jayshree, sa veuve, nous raconte sa vie depuis l’accident. « C’est difficile de vivre sans mon époux. Je dois gérer mes émotions pour soutenir et grandir mes enfants. La mort héroïque de mon époux m’encourage à surmonter cette douleur. Il a achevé sa mission », dit-elle. « Je sais qu’il veille sur nous. Il est toujours à nos côtés. Des fois, il nous arrive d’entendre sa voix en train de nous appeler. C’est un signe qu’il est parmi nous. On a su surmonter graduellement et accepter qu’il n’est plus là, mais il est vivant dans nos cœurs », poursuit-elle. Deepchand Gunness a été décoré par la présidence et sa veuve Jayshree est très fière que son époux ait reçu à titre posthume le President’s Badge of Honour. « C’est une grande fierté et un honneur pour mes enfants et la famille », estime-t-elle. Après la mort de son père, l’unique fils de Deepchand Gunness s’est retrouvé catapulté chef de famille. « Mon fils a trouvé un emploi dans un hôtel. L’aînée s’est mariée et la benjamine suit des cours. Je suis à la recherche d’un boulot pour subvenir aux besoins de la famille », explique Jayshree Gunness.
 

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