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Un combat loin d’être gagné

Le mois de décembre débute chaque année par la commémoration de la Journée mondiale de la lutte contre le SIDA. À un moment où l’épidémie commence à marquer le pas, l'annonce du président Donald Trump de réduire drastiquement, dans le budget de 2018, les cotisations des États-Unis à la lutte contre le virus avait sonné comme un véritable coup de semonce lors de la conférence internationale sur le SIDA tenue fin juillet dernier à Paris.

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En conséquence de cette décision hautement déplorable, il va sans dire que le programme de thérapie antirétrovirale, qui a permis de réduire presque de moitié le nombre de décès en 10 ans, soit de 1,9 million en 2005 à un million en 2016, selon un récent rapport de l'ONUSida, sera forcément perturbé.

Même si le cap de 50% de personnes séropositives sous traitement est aujourd'hui dépassé, 1,8 million de nouvelles infections ont été enregistrées en 2016, soit une contamination toutes les 17 secondes en moyenne.  Certes, ce chiffre, toujours selon le rapport, est en baisse régulière année après année, très loin du maximum de 3,5 millions de nouvelles infections en 1997, mais le rythme est beaucoup trop lent pour permettre de juguler l'épidémie.

Et avec la réduction des dotations américaines qui s'élevaient à 4,9 milliards de dollars en 2016, l'objectif de seulement 550 000 nouvelles contaminations à l'horizon de 2020 s'éloigne de plus en plus. Car, pour réduire la charge virale dans l'organisme et entraver la transmission entre partenaires, les patients doivent essentiellement suivre le traitement antirétroviral tout au long de leur vie. Or, cette thérapie est coûteuse et, par conséquent, toute tendance à la baisse du soutien financier risque de mettre en péril le but fixé par l'ONUSida d'atteindre un taux de 90% de personnes séropositives sous traitement et avec une charge virale indétectable d'ici 2020.

Autre facteur qui a considérablement ralenti la lutte contre le virus, c'est bien évidemment le refus pendant des années des laboratoires pharmaceutiques de céder leurs droits d'exploitation des brevets de médicaments qu'ils détiennent.

Comme ce fut le cas pour l'AZT (Azidothymidine), inhibiteur de la transcriptase inverse, enzyme essentielle pour la réplication du virus dans les lymphocytes T4. Ce n'est qu'après une lutte acharnée que le laboratoire britannique concerné avait fini par léguer ses droits à un fabriquant sud-africain de génériques. Ce qui a, dans une grande mesure, permis, en l'espace de deux décennies de traitement antirétroviral, de transformer l'infection du VIH d'une sentence de mort à une maladie chronique parfaitement gérable. Car, sans traitement, les séropositifs développent la maladie qui affaiblit le système immunitaire, les exposant aux autres infections comme la tuberculose, maladie qui est ainsi devenue en 2016, la première cause de mortalité chez les personnes atteintes du VIH. Ces deux pathologies sont perçues donc comme un couple à hauts risques.

Aujourd'hui, bien que les bases scientifiques existent pour mettre fin à la pandémie du SIDA, les chercheurs reconnaissent que c'est effectivement une absence de fonds qui constituent l'obstacle majeur à la réalisation de leurs objectifs.

Il est malheureux que pour une cause sanitaire planétaire si cruciale, tous les dirigeants des pays riches ne jouent pas toujours franc jeu. Brillant souvent par leur absence lors des conférences internationales sur le sujet, ils traînent souvent les pieds lorsqu'il s'agit de passer à la caisse.

S'il est vrai que la surprenante variabilité génétique du VIH rend la tâche de la mise au point d'un vaccin bien plus complexe, force est de reconnaître,  que c'est effectivement le manque aigu de moyens thérapeutiques nécessaires qui avait favorisé la prolifération rapide du pathogène durant les 10 premières années de son apparition en 1981.

Et même après son identification en 1983 par les Professeurs Luc Montagnier et Françoise Barré-Sinoussi – qui ont d'ailleurs été recompensés par le prix Nobel de médecine en 2008 –, les décideurs politiques mondiaux avaient tardé à réagir.

Aujourd'hui, la communauté scientifique se trouve à la croisée des chemins. Alors que les coupes budgétaires annoncées par Donald Trump priveraient 830 000 patients, majoritairement africains, selon l'ONUSida, d'un traitement antirétroviral vital et des centaines de milliers d'Américains pauvres d'une assurance santé de base, des milliards de dollars sont déboursés pour le déploiement des boucliers anti-missiles en Corée du Sud et en Républiques baltes. Comme quoi, le combat contre la pandémie est encore loin d’être gagné.

 

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