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Moto-école à Moka : stop à la conduite dangereuse et irresponsable

Désormais, ce n’est pas le tout de savoir conduire une moto pour obtenir son permis de conduire. Une formation en bonne et due forme, attestée par une moto-école, sera obligatoire. Les premiers aspirants moniteurs et examinateurs sont actuellement en formation à la première école du genre située à Moka. Suivez le guide…

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10 heures. Sur le parking du Sanatan College qui abrite le centre de formation, Jean-Marc Martinez, responsable pédagogique, distribue les rôles et donne les indications sur la séance sur route qui va suivre. Un des élèves jouera le motocycliste, un autre l’accompagnateur et le troisième sera observateur. Les instructions données et l’itinéraire expliqué, la petite équipe met le cap sur Bagatelle.
Le motocycliste est suivi par le formateur, l’accompagnateur et l’observateur à bord d’une voiture moto-école. Ils sont en contact radio permanent. C’est l’accompagnateur qui guide le motard. L’autoévaluation et l’anticipation des manœuvres sont les aptitudes qui seront mises à l’épreuve. 
Pendant ce temps, un autre groupe d’apprenants est en classe pour la théorie. On leur enseigne comment transmettre un message à son élève et se faire respecter, ainsi que les postures à adopter par l’enseignant pour être en accord avec ce qu’il dit. Il est aussi question de gestion de conflit et de la façon de faire évoluer son élève.
Un peu plus loin sur la piste improvisée pour les exercices hors circulation, l’initiation d’un apprenti est en cours. Il s’agit, à ce stade, de comprendre la machine et d’apprendre à la manipuler. Démarrer, arrêter, freiner, tourner...
Trois quarts d’heure plus tard, Jean-Marc Martinez et ses élèves reviennent au centre. S’ensuit le debriefing entre l’apprenant et l’accompagnateur. Commentaires et critiques fusent. La séance ne s’est pas déroulée comme sur des roulettes. 
Jean-Marc remet les pendules à l’heure et souligne la responsabilité de chacun. La prochaine fois, les rôles seront inversés. 
Ils sont 38 aspirants moniteurs et aspirants examinateurs à suivre cette formation, dont 15 policiers. Ces derniers ont un module de plus que les autres afin de pouvoir assurer les examens de conduite pour motocyclistes. Quatre experts de l’île de la Réunion se relayent pour former cette première cuvée de moniteurs et d’examinateurs. Ces cours gratuits sont une initiative du ministère des Infrastructures publiques, en collaboration avec Focal Point Ltd. Le but principal est de réduire le nombre d’accidents impliquant des deux-roues sur nos routes. 

Jean-Marc Martinez : «Il a fallu revoir toutes les bases»

Le premier constat du responsable pédagogique, Jean-Marc Matinez, c’est justement l’absence de formation des conducteurs de deux-roues à Maurice. « Les gens se sont formés par eux-mêmes, par un processus essai/erreur. Du coup, ils ont adopté de mauvaises habitudes. On note aussi beaucoup de méconnaissance technique des deux-roues. »

Ainsi, il y a eu un gros travail à abattre tant au niveau technique que pratique. « Parce que les élèves-moniteurs eux-mêmes évoluent dans leur pratique. Par exemple, on s’aperçoit que la majorité des élèves n’utilisait que le frein arrière au lieu de se servir du frein avant. Après, il y a la notion d’équilibre et de position de la moto. Ils n’avaient aucune connaissance du monde de la moto, que ce soit au niveau technique ou de la façon de faire... Il a fallu revoir toutes les bases. »

La formation comprend, d’une part, les grands principes pédagogiques et, d’autre part, une partie théorique qui couvre la réglementation, l’aspect légal et la psychologie du conducteur, etc. Et Jean-Marc Martinez de préciser : « Il y a la partie technique sur la connaissance du véhicule, qui englobe tant les deux-roues que les voitures et les poids lourds. Parce qu’en fait, on se retrouve tous ensemble sur les routes et il faut essayer d’apprendre et de comprendre nos contraintes mutuelles.»

L’expert en sécurité routière note des manques de précision dans les lois mauriciennes concernant les comportements et les règles de circulation des deux-roues. « À ce jour, il n’est pas interdit aux deux-roues de remonter une file de véhicules. Le motocycliste ne se gêne donc pas pour le faire, ce qui lui vaut des critiques des autres automobilistes contraints d’avancer pouce par pouce. Du coup, le motocycliste est stigmatisé comme étant quelqu’un qui ne respecte pas les règles. » Cette formation, pour Jean-Marc Martinez, est donc une manière de revaloriser les deux-roues à travers le comportement des formateurs et les futurs enseignements qu’ils vont donner aux apprentis.

Sébastien Gourama : «Il faut un changement de comportement»

Sébastien Gourama est un des formateurs du centre de formation Focal Point. Il estime qu’en général, nos usagers de la route ont besoin de changer de mentalité. « J’ai été choqué de voir des piétons traverser l’autoroute. Si on veut renverser la tendance à la hausse du nombre d’accidents, il faut un changement de comportement.»

La formation des moniteurs vise justement à amener les motocyclistes à changer leur manière de penser et à adopter une nouvelle mentalité. « Avant tout, cela passe par une prise de conscience de ce que nous faisons de travers et des conséquences de nos mauvaises habitudes », lance Sébastien Gourama.

L’expert en sécurité routière relève plusieurs comportements à risque des motards mauriciens. « Ils ne sont pas conscients de l’importance d’un bon équipement qui comprend les vêtements, le casque, le blouson, les gants et les chaussures. Il y en a qui ne savent même pas freiner proprement, d’autres n’ont pas de réflexes d’anticipation... Notre rôle, c’est donc de transmettre nos compétences et nos connaissances à ces aspirants moniteurs et examinateurs qui, à leur tour, devront former les futurs motocyclistes. »

La parole aux élèves...

Patrick.

Davish, âgé d’une vingtaine d’années, s’est intéressé davantage à la sécurité routière après avoir été victime, en 2010, d’un grave accident de la route. « Je me suis inscrit à cette formation pour pouvoir former les autres car c’est inacceptable d’avoir autant de motocyclistes qui meurent sur nos routes. »

Patrick a roulé pendant plus de 20 ans avec son learner. Cela fait seulement trois ans qu’il a son permis de deux-roues mauricien. Malgré ses longues années d’expérience, cet aspirant-moniteur reconnaît que « nou panse nou kondir e nou konn kondir me nou dan fos net ! » Il note que les automatismes des conducteurs de deux-roues s’avèrent souvent dangereux. « Ils ont tendance à regarder le sol ou le guidon ou encore les pneus de leur moto alors qu’ils devraient avoir le regard fixé sur le point vers lequel ils se dirigent. » Il parle aussi des bonnes postures à avoir sur une moto. « La plupart des motocyclistes se penchent en avant ou en arrière, les jambes écartées et les pieds en canard. Ce sont des petits détails qui peuvent sembler insignifiants mais qui influent sur notre maîtrise et notre équilibre à moto. »

Bushan, Veenesh et Guillano sont parmi les policiers formés pour devenir des examinateurs. Pour eux, cela s’avère utile, en vue des changements annoncés pour l’obtention d’un permis de conduire pour deux roues. « Les changements à venir sont nécessaires car nos tests sont obsolètes et loin de répondre aux besoins des motocyclistes eux-mêmes.» La méconnaissance des règles et autres mesures de sécurité est flagrante si l’on considère le fait que, selon eux, la majorité des accidents impliquant des deux-roues relève d’une mauvaise manipulation de la machine, voire d’une mauvaise anticipation. « Dans la plupart des cas, il n’y a pas d’autre véhicule impliqué. Soit le deux-roues a dérapé, soit le motocycliste a fini contre un mur ou un pylône. »

 

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