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Après une rencontre avec le PM : Léa Ratna reste à Maurice

Pravind Jugnauth et Léa Ratna Pravind Jugnauth et Léa Ratna se sont rencontrés lundi après-midi au PMO.

Pravind Jugnauth promet une enquête pour situer les responsabilités.

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« Hon. Pravind Jugnauth Prime Minister, Help me please. » Cet appel de détresse lancé par Léa Ratna au chef du gouvernement, le samedi 25 mai 2019 dans les colonnes du Défi Plus, n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Elle a pu rencontrer le Premier ministre (PM) le lundi 27 mai au bâtiment du Trésor. Au final, la Mauricienne n’aura pas à rentrer à Madagascar comme demandé par le Passport and Immigration Office (PIO) dans une correspondance. Le PM a promis l’ouverture d’une enquête pour « situer les responsabilités ».

Afin de mieux comprendre l’affaire, remontons au samedi 25 mai 2019, date à laquelle l’appel de Léa Ratna a été publié en exclusivité par Le Défi Plus.  Née à Madagascar, Léa Ratna vit à Maurice depuis une vingtaine d’années. Son but, lorsqu’elle arrive au pays pour la première fois, est de décrocher un emploi dans le textile. C’est comme cela qu’elle fait la connaissance de l’homme qui deviendra son époux par la suite. Ils ont deux enfants, aujourd’hui âgés de neuf et 12 ans.

Le PM : « Ou enn sitwayen morisien »

Triste coup du sort, le mari de Léa Ratna meurt dans un accident de la route en novembre 2018. Elle se retrouve seule, avec ses deux enfants. Comme un malheur ne vient jamais seul, l’usine où elle travaille ferme ses portes. Mais les tribulations de la jeune femme sont loin d’être finies. Dans une lettre en date du 14 mai 2019 que Léa Ratna réceptionne le 21 mai, le PIO la somme, en vertu de l’article 6 de l’Immigration Act, de quitter le territoire mauricien au plus tard le 24 mai.

S’ensuivent les pleurs, les nuits d’angoisse, la peur de devoir abandonner ses enfants, les démarches demeurées vaines, puis l’appel lancé au Premier ministre pour qu’il apporte son aide… Un appel entendu et qui mène à un heureux dénouement. Entre-temps, l’affaire soulève un tollé sur la Toile. Le PM, qui n’était pas au pays, apprend la nouvelle et demande à son personnel de contacter Léa Ratna. Il veut la voir. Une rencontre est fixée à lundi après-midi. Elle a lieu à 13 h 15 au Prime Minister’s Office (PMO). Nous y assisterons avec la permission de Pravind Jugnauth. Zoom sur ce tête-à tête.

La rencontre a lieu en présence de Ken Arian, Senior Advisor au PMO. Une trentaine de minutes plus tard, la nouvelle tombe : Léa Ratna, citoyenne mauricienne, reste. Pravind Jugnauth évoque « une possible erreur liée à un manque de communication ». Il présente ses sympathies à Léa Ratna avant de lui demander de s’expliquer.

D’emblée, la jeune femme parle de ses enfants. « Zot inn dir mwa papa nepli la, aster la twesi to pou ale. Ki nou pou fer ? » dit-elle. émue. Pravind Jugnauth la réconforte et lui demande ses documents. Quelques minutes plus tard, il lui lance : « Depi le 28 novam ou enn sitwayen morisien. Mo mem inn donn sa lotorizasion la. Mo bien tris pou tou bann traka ki sa let la inn koz ou ek ou fami, sirtou ki ou finn perdi ou mari e ou deza dan problem. »

Le PM a ajouté : « Quand j’ai lu cet article dans Le Défi Plus, j’ai demandé qu’on prenne immédiatement contact avec cette maman afin de voir de quoi il en retourne. J’ai demandé des explications au PIO. J’ai voulu comprendre pourquoi ils ne l’ont pas appelée pour vérifier son statut avant de lui envoyer une telle lettre. Selon leur version, ils lui auraient demandé à plusieurs reprises de venir au bureau, en vain. » Léa Ratna rétorque que tel n’a pas été le cas.

Pravind Jugnauth promet « de réclamer une enquête pour situer les responsabilités ». Il dira qu’il « y a eu une faille quelque part. Soit la lettre a été envoyée de manière automatique sans aucune vérification préalable, soit il y a un manque de communication entre mon bureau et le PIO, ou alors il s’agit d’une erreur. Quoi qu’il en soit, cette affaire a causé du tort à cette dame et à ses proches ».

Le chef du gouvernement nous explique qu’il fera en sorte de remédier à ces manquements dans les plus brefs délais. « Fode pa ki bann erer koumsa repete e ki lezot fami soufer », dit-il. Pravind Jugnauth maintient que « cela n’a rien à voir avec les amendements apportés à l’Immigration Act ».

À Léa Ratna, il dira : « Ou enn sitwayen morisien. Ou ena tou drwa pou res isi. Personn pa pou kapav tir ou depi la. » Il ajoute qu’il fera personnellement le suivi avec le PIO pour rectifier le tir. 

Quant à Léa Ratna, elle a tenu à remercier Pravind Jugnauth, les membres de sa famille et tous ceux qui l’ont soutenue dans ces moments pénibles. « Aster la mo kapav dormi trankil », a-t-elle confié.

Me Erickson Mooneapillay : « C’est une erreur fondamentale du PIO »

Me Erickson Mooneapillay, responsable de DIS-MOI Maurice, avait assisté Léa Ratna dans le cadre du projet Pro Bono Clinic visant à prodiguer des conseils juridiques aux personnes qui n’ont pas les moyens. Il est allé à la rencontre de Léa Ratna au PMO, en compagnie d’Eddy Sadien. À sa sortie, il a déclaré : « C’est un heureux dénouement pour Léa Ratna. Le Premier ministre a confirmé qu’elle pourra rester au pays. C’est une erreur fondamentale de la part du PIO. Elle n’aurait jamais dû recevoir cette lettre, car elle a non seulement le statut de résident mais elle est aussi citoyenne mauricienne. Elle est déjà passée par deux douloureuses épreuves en une année : son mari est décédé dans un accident de la route et elle a perdu son emploi. La lettre du PIO l’avait plongée dans le gouffre. »


L’ASP Manoj Luchan, responsable du PIO : « Nous avons suivi les procédures »

Dans une déclaration exclusive au Défi Quotidien, l’assistant surintendant de police (ASP) Manoj Luchan, patron du Passport and Immigration Office (PIO), a soutenu qu’il y a eu « un problème de communication entre Léa Ratna et les officiers du PIO ». Il affirme que « ce n’est que lundi matin que le bureau de l’Immigration a appris qu’elle détenait la citoyenneté mauricienne ».

Manoj Luchan soutient que « Léa Ratna a été sollicitée par téléphone à de multiples reprises dans le courant de la semaine dernière, mais en vain. Nous avons suivi les procédures. Notre dernier recours a été de lui adresser une lettre par la poste. Mais la correspondance que Mme Léa Ratna a réceptionnée courant de la semaine dernière n’est que la phase préliminaire. La question d’expulsion ne se pose pas. D’ailleurs, le dossier n’était pas arrivé à ce stade »
Selon le responsable du PIO, ceux qui sont dans ce type de situation reçoivent tous ces lettres (NdlR : conformément aux règlements). Il précise que le document contient une clause stipulant que ces personnes peuvent solliciter le Prime Minister’s Office (PMO) et exposer leur cas par écrit. Et que c’est le bureau du Premier ministre qui décide ensuite de la marche à suivre.

« Dans le cas de Mme Léa Ratna, elle aurait pu nous exposer ses raisons. Le PMO aurait pris une décision et une solution aurait pu être trouvée », explique Manoj Luchan. « J’ai rectifié le tir en adressant à Mme Léa Ratna une lettre par voie postale lundi après-midi. Dans le second document, le PIO lui demande de ne pas tenir compte de l’ancienne lettre, précisant qu’elle peut rester à Maurice sans crainte et qu’elle bénéficiera de tous les privilèges en tant que Mauricienne. Elle réceptionnera la lettre probablement ce mardi », a conclu le patron du PIO.

 

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