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Patricia Adèle Félicité : «Vivre l’esprit de Noël au quotidien est essentiel pour lutter contre la pauvreté»

Patricia Adèle Félicité analyse l’impact des changements socio-économiques sur les célébrations de Noël des personnes vivant dans la précarité à Maurice. Elle insiste sur l’importance de la solidarité et de l’équité dans un contexte où Noël dépasse les frontières culturelles et sociales.

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Comment pensez-vous que les changements sociaux, culturels et économiques affectent les célébrations de Noël des personnes vivant dans la pauvreté ?
Noël, pour les personnes en situation de précarité, représente des dépenses liées à la fête et au désir de faire plaisir à la famille, aux enfants, ce qui devient une charge budgétaire importante. Cependant, je constate un changement de mentalité chez certaines personnes qui investissent davantage dans l’éducation et adoptent une approche plus pratique pour les cadeaux. 

À travers l’accompagnement des familles à Bambous, on observe une réflexion accrue avant les dépenses. En parallèle, d’autres personnes font des largesses terribles, dépensant sans compter et ne réalisant pas la véritable valeur de l’argent. Ainsi, avec les mutations culturelles et économiques, on distingue ces deux profils de personnes, mais il ne faut pas généraliser. 

Ceux qui sont conscients des difficultés de la vie réfléchissent deux fois plus, bien que le niveau de vie et le style de vie poussent certains à la consommation, comme en témoigne la multiplication des Marchés de Noël récents à travers le pays. Pour les repas festifs, beaucoup préfèrent commander plutôt que de préparer à la maison, ce qui devient difficile pour ceux qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts.

Comment les inégalités sociales, si elles persistent, pourraient-elles influencer les célébrations de Noël dans les prochaines décennies ?
Face aux inégalités sociales, deux tentations coexistent : celle de la consommation excessive et celle de la frugalité volontaire. La situation risque d’empirer car chacun aspire à un peu plus, influencé par ce qui se passe à l’étranger. Cependant, on ressent chez les Mauriciens une valeur de solidarité toujours présente pour aider et soutenir les autres. Cette solidarité nécessite toutefois un renforcement, car beaucoup ne réalisent pas encore que de nombreuses personnes vivent sans électricité, sans eau courante et vont souvent dormir le ventre vide.

Comment les organisations sociales pourraient-elles s’adapter pour soutenir les personnes dans le besoin pendant la période des fêtes, compte tenu des évolutions attendues ?
Il est nécessaire d’innover en continuant à sensibiliser sur la précarité des plus vulnérables, qui peuvent devenir invisibles. Ces personnes ont divers besoins, notamment pour finir le mois, ce qui est difficile pour de nombreuses familles. Avec l’augmentation du niveau de vie, la pauvreté perdure mais change également de visage, touchant même ceux qui travaillent mais peinent à joindre les deux bouts.

Face aux changements à venir, quelles pourraient être les barrières supplémentaires auxquelles seraient confrontées les personnes défavorisées pour profiter pleinement des festivités de Noël ?
Tant qu’il n’y aura pas de justice sociale en matière de droits, la pauvreté persistera. Le calcul des allocations pour les personnes inscrites sous le registre social spécifie qu’un adulte peut avoir environ Rs 3 500, soit Rs 116 par jour pour couvrir les dépenses d’eau, d’électricité, de loyer et de nourriture. Cette situation rend Noël semblable à un jour ordinaire pour beaucoup, sans rien de spécial, ce qui pourrait changer si des repas solidaires étaient partagés en exprimant une compassion envers les personnes défavorisées. 

Cela me rappelle l’homélie du père Maria Paschal Sundaram dimanche dernier, soulignant les coûts extravagants des soirées du réveillon de Noël au restaurant par rapport à la simplicité des repas à la maison. Trouver un équilibre dans les festivités est essentiel, évitant l’opulence au profit de la solidarité et de la fraternité.

Quelles stratégies ou interventions sociales pourraient être mises en place pour garantir que les personnes dans le besoin bénéficient également des changements positifs liés à Noël dans les années à venir ?
Les équipes de Caritas font beaucoup en invitant les personnes au partage et en organisant des rencontres et des repas avec plusieurs familles en situation de précarité. Inviter à la solidarité pendant les Marchés de Noël est une façon de rappeler les différentes manières de vivre la période. Il est également crucial d’investir dans des programmes de développement à long terme qui garantissent la dignité des personnes, comme l’accès au logement. Un système de protection sociale est nécessaire pour assurer un niveau de vie décent tout au long de l’année.

Comment expliquer que la pauvreté persiste malgré l’investissement dans la lutte contre ce fléau ?
Bien que des investissements soient réalisés, il est essentiel de mettre en place des programmes et des projets à long terme de manière coordonnée. La collaboration de toutes les parties prenantes, de l’État à la société civile en passant par les personnes en situation de précarité, est nécessaire pour une approche globale efficace.

Tout cela en espérant que Noël sera différent à l’avenir pour ceux dans le besoin…
Vivre l’esprit de Noël au quotidien, avec la conscience que tout le monde a besoin d’un minimum vital, est essentiel pour lutter contre la pauvreté.

 

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