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1 500 victimes et 1 336 cas d’agression recensés depuis début 2022 : une insécurité liée à la situation économique

La police est sur le qui-vive.

Le constat est alarmant. Environ 1 500 personnes ont été victimes d’agression depuis début 2022. Cette recrudescence de cas serait liée à la situation économique du pays et au fléau de la drogue. Au niveau de la Crime Prevention Unit (CPU), on avance que ce phénomène gagne du terrain depuis le confinement de 2021. Le sociologue Ibrahim Koororuth dit craindre le pire, si la situation économique ne s’améliore point.

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Les femmes et les aînés sont  des cibles privilégiées."

Depuis le début de l’année, la police a procédé à 1 336 arrestations pour des délits ciblant des personnes âgées, des femmes, ou des jeunes étudiants. Il s’agit de meurtres, agressions sexuelles ou encore de vols et vols avec violence, mais aussi des cas de violence domestique. Les retraités, la gent féminine ou encore les jeunes sont souvent des cibles faciles dans les quatre coins de l’île. Depuis janvier, plus de 1 000 cas relatifs ont été enregistrés, pour environ 1 500 victimes. Rien que le mois de mars, quatre femmes ont été victimes de meurtre. 614 cas de violence domestique ont été recensés, dont certaines victimes sont des personnes âgées. La police a procédé à 121 arrestations concernant ces cas durant les deux premiers mois de l’année. Des fois, les victimes ont retiré leurs plaintes, avant même que la police ne procède aux interpellations des suspects.

La majorité des agressions ou meurtres sur les retraitées sont survenus lors de la réception de l’argent de leur pension. Elles sont six femmes à y avoir laisser la vie. Les femmes sont aussi des cibles privilégiées aux côtés de nos aînés. 

Au sein de la Crime Prevention Unit, on affirme mener une lutte contre les cas de délinquance juvénile. Selon la Children’s Act, les enfants sont conscientisés sur les délits, surtout les offenses de vol et de ‘bullying’. « Pou bann zenfan se enn zoue, me sa ena souvan bann consekens grav e sekel ki perdire pendan lontan », souligne-t-on au sein de la CPU. La Brigade pour la Protection des Mineurs accentue également un travail en parallèle sur le terrain en ce sens.

Depuis début 2022, avec une restructuration du Field Intelligence Office, et le lancement du Crime Intelligence Office, les Casernes centrales affirment avoir un meilleur « Picture of Facts » sur le terrain. Un système bien établi a été mis sur pied pour surveiller les faits et gestes des ‘Habitual ‘ ou encore les ‘Prolific Offenders’. « ‘Nou fer projektion kouma voler pou al kokin e avek ban Forecasting Exercises’, on a plus de résultats », souligne un haut gradé aux Police au Police Head Quarters (PHQ).

À titre d’exemple, mardi, à Quatre-Bornes, une voiture volée a été retrouvée, une demi-heure après que la police a été alertée. Autre fruit du nouveau Crime Intelligence office axé sur l’Intelligence Gathering, est l’arrestation d’Hansley Neptune, après environ trois ans de cavale. Il n’y a rien de nouveau à cela, mais on a restructuré et formalisé certains aspects dans le fonctionnement des unités, précise un collaborateur du PHQ. L’ADSU et la NCG ont aussi réalisé de grosses saisies de drogue en mer et à terre, grâce à des renseignements.

Proies faciles

Les personnes âgées sont des proies faciles pour les malfrats, car ces dernières arrivent difficilement à se défendre. Toutefois, depuis ces deux dernières années, on affirme n’avoir eu d’autres choix que de réduire les campagnes de sensibilisation avec contact humain, pour cause de Covid-19. Mais durant les fins de mois, surtout lorsque les salaires et les pensions sont remis aux bénéficiaires, la police intensifie les patrouilles dans des endroits stratégiques. « Nou get la bank, lapost, ATM, sipermarse etc. ». Ces exercices ont un double objectif : l’éducation et la sensibilisation, mais aussi des interventions en cas d’attaque sur des proies faciles par des voleurs et autres malfrats. « L’aide des Neighbourhood Officers est d’une aide précieuse pour la police », confie-t-on au Police Head Quarters.

anil kumar dipLe commissaire de police Anil Kumar Dip : « Un système d’Intelligence Gathering fructueux »

Anil Kumar Dip, le patron des Casernes centrales, est sur le pied de guerre. Il explique qu’aujourd’hui, à l’ère des avancées technologiques, les malfrats sont aussi équipés. Mais il souligne qu’avec l’apport des technologies du projet Safe City et le nouveau système d’Intelligence Gathering implémenté aux Casernes centrales, la police arrive à mieux détecter des cas, tout en assurant un meilleur niveau de sécurité. « Depuis que j’assume le poste de chef de la police, j’ai apporté des modifications dans le système pour améliorer l’Intelligence Gathering ». C’est ce qui nous aide en grande partie à être plus efficaces dans le combat contre la criminalité et la prévention. Anil Kumar Dip cite, en exemple, l’arrestation d’Hansley Neptune, les saisies de drogue ou encore les démantèlements de réseaux de voleurs à travers l’île. « Rien que durant la semaine écoulée, dans la Western Division, une voiture volée sous le nez du propriétaire, un retraité, a été retrouvée en moins d’une heure », relate le commissaire de police.

 

Calvaire d’un retraité de 82 ans : « Zot pa finn respekte mo laz »

Il y a deux semaines, Raj, 82 ans, un retraité vivant seul dans sa maison au Ward 4, Port-Louis, a été ciblé par deux malfrats. Durant la nuit, alors qu’il dormait, deux individus sont entrés par effraction chez lui, avant de le bâillonner et le ligoter. Ils ont fait des retraits sur son compte, après l’avoir tabassé et subtilisé ses cartes bancaires. Les deux malfrats, Bryan Herwin Pondard, 33 ans, un habitant de Pailles, et Louis Darren Grenade, 24 ans, ont fait des aveux après leurs arrestations par la CID de Port-Louis Sud. « Zot pa finn respekte mo laz », souligne la victime. Face à deux hommes masqués dans la nuit, alors qu’il était au lit, Raj a su qu’il avait affaire à des « move dimounn ». L’homme de 82 ans explique avoir pu garder son calme et sa lucidité. « Mo pa finn panike kan ariv sa, mo dir mo donn zot seki zot rode, sa fini laem zot pa pou bless mwa… », a-t-il lancé au Défi Plus. Or, le traumatisme y est toujours, et depuis, Raj ne vit plus seul chez lui. Ses proches ont préféré l’héberger pour des raisons de sécurité. « Enn dimounn sa laz la pa fasil pou defann li », précise un voisin du retraité.

 


Mario Maudarbaccus, travailleur social : « Une ruse bien rodée : les agresseurs prétendent être des cueilleurs de fruits »

Le travailleur social Mario Maudarbaccus fait ressortir que le taux de criminalité croissant est plus qu’alarmant. L’insécurité, dit-il, prend une tournure démesurée et les auteurs de ces délits emploient plusieurs ruses afin d’amadouer leurs proies. « C’est le fléau de la drogue synthétique qui est à l’origine de la dégradation des mœurs dans le pays. Les consommateurs de cette substance chimique ont tendance à avoir recours au vol afin d’avoir de l’argent pour se procurer leur drogue », avance Mario Maudarbaccus. Le pire, poursuit notre intervenant, est le fait que les consommateurs de drogues chimiques de déplacent à travers le pays, sous prétexte de chercher du travail, entre autres. C’est ainsi, selon Mario Maudarbaccus, qu’ils arrivent à commettre leurs délits.

« Depuis quelque temps, nous constatons que les auteurs d’agressions emploient une ruse particulière. Pourvus d’un bâton, ou d’un morceau de fil de fer, ils prétendent cueillir des fruits de saison. À travers cette ruse bien rodée, ils sont en train d’analyser tout ce qui se passe dans le voisinage. C’est ainsi que, tôt ou tard, ces individus, qui sont armés de couteaux, finissent par entrer dans des maisons afin de commettre des vols avec effraction », explique Mario Maudarbaccus. Le travailleur social appelle à la vigilance du public. « Fermez vos portails à clé et vos portes à double tour. Avec le temps qui court, vous n’êtes même pas en sécurité chez vous », prévient-il. 

Mario Maudarbaccus est d’avis que la force policière doit effectuer plus de patrouilles dans certains endroits isolés du pays. Le travailleur social vote également en faveur de la réintroduction du ‘Neighbourhood watch’. « Les gens ont peur de s’aventurer en pleine rue durant la journée. La police doit prendre ses responsabilités. La situation est catastrophique. ‘Dimounn pe gayn per’. Il semblerait qu’il n’y ait plus de ‘Law and Order’ dans le pays », se désole Mario Maudarbaccus.

Shiva CoothenShiva Coothen : « La prévention, notre priorité »

L’inspecteur Shiva Coothen, du Police Public relations office (PPRO), affirme que la prévention est une priorité des Casernes centrales. Il affirme que le CP a délégué tous les Divisional Commanders pour s’organiser, en vue de protéger les plus faibles de la société. Il précise que la nouvelle stratégie a permis de diminuer les cas de vol de métaux, depuis quelque temps. « boukou operation pe fer e pe port frwi ». Il affirme que les Scrap Metal Dealers sont ciblés, comme des receleurs, lorsqu’ils achètent les métaux volés. « Si pena marse pou ekoul sa pa pou ena vol la ». D’emblée, l’inspecteur Coothen réclame plus de vigilance. Il explique que beaucoup de cas de vol sont le fruit de négligence des victimes. « ‘Ena dimounn less zot loto en mars koumsa mem. Ena sorti less laport ouver’. D’autres transportent de grosses sommes d’argent sans prendre de précaution », fait-il comprendre.

 

Recrudescence dans le nombre de cas de violence : la Crime Prevention Unit met en cause le deuxième confinement

Au niveau de la Crime Prevention Unit (CPU), on indique que les officiers effectuent de campagnes d’information sur le terrain. Lors des causeries, fait-on comprendre, les policiers de la CPU et ceux de la Brigade pour la protection de la famille brossent un tableau de la situation. Mais, souligne-t-on, il faut mener plus de campagnes afin de toucher plus de monde. « Nous avons remarqué une recrudescence dans le nombre de cas d’agressions depuis le confinement de 2021. Il y a un bon nombre de personnes qui se sont retrouvées au chômage du jour au lendemain et leur seul recours est de voler, voire agresser, afin de pouvoir avoir de l’argent », fait ressortir la CPU.

Autre élément contribuant à l’insécurité dans le pays, selon la CPU, est la prolifération des voleurs de vieille ferraille. Ces derniers, souligne-t-on, font irruption dans la cour des gens sans aucun scrupule, afin de collecter les vieux métaux. « Certains collecteurs de vieux métaux se permettent d’agresser physiquement les propriétaires réticents », précisent nos intervenants. Outre le vol de vieille ferraille, il y a également le fléau de la toxicomanie qui est à l’origine de l’insécurité dans le pays. « Nous sommes en présence d’informations selon lesquelles les patients sous méthadone sont à l’origine de plusieurs cas d’agression à travers le pays », fait remarquer la CPU.

Ibrahim KoodoruthLe sociologue Ibrahim Koodoruth : « Nous craignons le pire si la situation économique ne s’améliore pas »

Le sociologue Ibrahim Koodoruth attribue cette recrudescence de violence au taux de chômage croissant et à la cherté du coût de la vie. « Le deuxième confinement a entraîné des pertes d’emplois considérables dans le pays. Un bon nombre de personnes sont sans emploi depuis une année. Les opportunités, pour eux, de trouver du travail sont réduites. Ils ne peuvent joindre les deux bouts. Et en sus de cela, le coût de la vie ne cesse de s’accroître. La pauvreté gagne du terrain dans le pays », fait remarquer le sociologue Ibrahim Koodoruth. Selon notre intervenant, la situation pourrait se détériorer davantage avec le contexte économique international. Une recrudescence de la violence, redoute-t-il, n’est pas à écarter. 

« Nous craignons le pire si la situation économique du pays ne s’améliore pas », fait part le sociologue. Mais comment endiguer la situation ? Selon Ibrahim Koodoruth, « il faut à tout prix relancer l’économie avec un gouvernement fort et visionnaire, car le taux de criminalité est en train de gâcher l’image du pays ». « Le gouvernement doit introduire une méthode de bonne gouvernance, afin que la population puisse sortir gagnante. Il y aura plus de création d’emplois et le taux de criminalité chutera considérablement », propose le sociologue.

Autre facteur contribuant au taux de criminalité, indique, par ailleurs, Ibrahim Koodoruth, est la drogue synthétique. « Bon nombre de jeunes se laissent influencer par le fléau de la drogue chimique. Une fois qu’ils sont dépourvus de moyens financiers, ils commencent à voler et à agresser les gens, afin de pouvoir subvenir à leur dépendance à la drogue », déplore le sociologue. 

Elle se jette sur le conducteur et lui vole son argent - Kumar : « J’ai eu la peur de ma vie »

Kumar, un homme de 26 ans, domicilié dans la région de Sébastopol, a eu la peur de sa vie, le lundi 21 mars dernier. Il était en voiture lorsqu’il aperçoit une femme au beau milieu de la route menant vers Beau-Bassin. L’individu arrête son véhicule. La femme s’approche, saute sur le capot de la voiture et lui demande une somme de Rs 100. Le jeune homme refuse. La femme fait irruption dans le véhicule à travers la fenêtre, arrache le sac du conducteur, lui dérobe une somme de Rs 9 400 et tente ensuite de faire main-basse sur son téléphone portable. Pris de panique en voyant un homme arriver avec une arme tranchante en main, le conducteur de 26 ans démarre en trombe tout en repoussant la femme. Blessé aux bras lors de l’agression, Kumar a alerté la police de Coromandel. Une déposition a été consignée au poste de Coromandel.

Dans une déclaration téléphonique, la victime fait ressortir que l’agression s’est déroulée en plein jour. Soit aux alentours de 8 heures. « Je ne m’attendais pas à me retrouver dans une telle situation. J’ai eu la peur de ma vie ce jour-là », lâche-t-il. La victime précise, par ailleurs, qu’il a l’habitude de croiser son assaillante dans la région où il a l’habitude de véhiculer. « Je condamne sévèrement ce dont j’ai été victime. On m’a volé d’une telle manière que les images sont en train de hanter mon quotidien », confie-t-il.

 

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