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Conservatisme et stagnation

Une des raisons avancées par les correcteurs des examens nationaux de Form III pour les résultats « catastrophiques » en langues, mais pas seulement, est la confusion faite entre la langue kreol et le français, mais aussi l'anglais. Pour des langues proches, de par leur origine, une telle influence sur les élèves – du primaire comme du secondaire – était pourtant prévisible et il est malheureux que des pédagogues indépendants aient choisi de garder le silence sur un sujet d'importance vitale concernant l'avenir des enfants de notre pays. Même si les médiums d'enseignement officiel chez nous sont l'anglais et le français, le kreol est officieusement omniprésent dans les classes et constitue, dans une grande mesure, un vecteur essentiel de compréhension dans le processus éducatif dans tous les écoles et collèges, stars ou pas. Cependant, là où le bât blesse, c'est son enseignement en tant que matière à part entière à côté du français, alors qu'il est connu que tout rapport rapproché au niveau de la phonétique ou de l'orthographe est susceptible de susciter de la confusion. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"5346","attributes":{"class":"media-image alignleft wp-image-10284","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"293","alt":"Policiers sequestr\u00e9s"}}]]Si l'émergence d'une conception portant sur une considération discriminante à l'égard d'une certaine composante de la population estudiantine s'avère inévitable, il convient toutefois de reconnaître que s'il y a une langue qui continue son ascension fulgurante dans de nombreux pays, y compris européens, c'est bien le mandarin, vu l'influence grandissante de la Chine dans le circuit économique mondial et l'ouverture de ce pays au monde, en ce qu'il s'agit des études tertiaires, du tourisme... À ce sujet, soulignons que le Bible Knowledge constituait, quelques années de cela, une matière à part entière au niveau du SC pour de nombreux élèves, même ceux n’étant pas de foi catholique. Dans certains milieux, on n'hésite pas à associer la décision de nos dirigeants d'introduire le kreol à l'école à des motifs bassement politiques, voire électoralistes. Dans un monde globalisé, où l'information voyage à vitesse grand V à travers l'Internet, pour un jeune qui aspire à une carrière professionnelle d'un certain échelon, une connaissance approximative des langues constituerait un sérieux handicap à son épanouissement. Or, force est de constater que la question de langues à Maurice relève d'une hypocrisie pure et simple. Alors que nos dirigeants encouragent l'enseignement du kreol à l'école, ils refusent systématiquement l'entrée de cette langue à l'Assemblée nationale, organe suprême de la démocratie, où sont prises par les représentants de toute la nation, les grandes décisions  du pays. La question de l'utilisation de la langue nationale au Parlement revient sur le tapis de temps à autre et a refait surface ces derniers temps dans le sillage de la retransmission prochaine en direct des travaux parlementaires à la télévision. Si l'ex-Premier ministre, Navin Ramgoolam, était résolument opposé à cette proposition  pour ne pas, selon ses dires, encourager l'utilisation des « swear words » à l'Assemblée nationale, l'actuel chef du gouvernement, lui, aurait même évoqué, en contrepartie, l'introduction du bhojpuri. Or, la démocratie ne peut se résumer à une question d'opposition des langues ; les affaires d'un pays doivent être débattues dans la langue la plus parlée et comprise de toute la population. Car les projets et idées pour le progrès et le développement ne proviennent pas uniquement d'une élite ; le citoyen lambda de même, qu'il soit attendant ou pas, a son mot à dire et doit pouvoir le faire par le moyen de communication qui lui convient le mieux. Mais l'intention de nos gouvernants eu égard à l'introduction de la langue kreol dans les écoles est encore une fois remise en cause lorsqu'ils refusent d'étendre son utilisation dans toutes les procédures de justice. Or, la grande majorité des justiciables ne maîtrisent pas la langue de Shakespeare et très souvent, le sort d'un accusé dans le box est décidé alors qu'il n'a rien compris des échanges le concernant entre avocats et magistrats/juges. Pourtant, la justice dans toute démocratie digne de ce nom doit être transparente, accessible mais surtout, compréhensible. Une année après l'accession au pouvoir de ce nouveau gouvernement, il est temps de sortir des sentiers battus et combattre, de manière résolue, ce conservatisme que nous ont légué les Britanniques plus de quatre décennies de cela, mais qui continue à nous emprisonner dans le carcan de la stagnation et du statu quo.
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